ÉDITORIAL: L’humain approximatif ― «Avait juste à pas l’faire», lettre à tous les «cultureduviolsceptiques»

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Vous avez probablement remarqué la nouvelle campagne de sensibilisation à propos du consentement sexuel. En effet, plusieurs murs de l’UQTR arborent des affiches sur lesquelles est inscrite la phrase suivante: «Sans oui c’est non!» J’ai toujours été mitigé vis-à-vis des grandes campagnes publicitaires de ce genre. Celle-ci me fait plutôt penser à une mauvaise propagande du «Non» lors du référendum de 1995. Par le passé, nous avons pu voir d’édifiantes publicités sur les dangers de l’alcool au volant, la fumée secondaire ou la violence familiale. Permettez-moi de douter de leur efficacité, à voir le nombre de personnes fumer aux portes des espaces publics, malgré les poumons noirs imprimés sur le paquet. Je profite des récents événements, qui se sont déroulés lors d’une initiation à l’Université de Montréal, pour parler de la culture du viol.

Y’en a pas de problème ici!

Tout le monde sait qu’au fond, ce n’est pas super gagnant de conduire son véhicule saoul, que fumer n’est pas terrible pour la santé. Personne ne le contredira. L’ennui avec la culture du viol, c’est qu’il existe beaucoup de gens qui la réfutent, qui sont, pour résumer: des «cultureduviolsceptiques». J’ai eu, à plusieurs reprises, des discussions avec ce type d’individus niant tout simplement le problème. Qui nient le fait qu’il existe dans nos écoles, dans notre travail et dans notre société en général, d’autres personnes subissant constamment les pressions du harcèlement sexuel. C’est simple, à l’instant où tu passes un commentaire ou un geste non sollicité, c’est du harcèlement. Cela n’a rien à voir avec la liberté d’expression. Ce n’est pas à toi, ni à moi d’ailleurs, de décider ce que la personne doit être capable d’apprécier ou d’endurer. Malheureusement, certains n’ont pas compris encore, et ce sont souvent les femmes qui en sont les victimes.

Il n’y a pas seulement les personnes qui n’y croient pas qui encouragent la culture du viol, mais aussi ceux qui blâment la victime. On reproche alors à la victime d’avoir manqué de jugement, comme si c’était elle qui était dans le tort.

L’époque néo-victorienne

Au 19e siècle, la société était divisée en deux sphères distinctes. Il y avait d’un côté la sphère publique, occupée par les hommes, et de l’autre, la sphère privée, occupée par les femmes. Le travail et la politique étaient alors considérés comme des espaces crasses et pouvant mettre en danger la pureté de la femme. Elle devait donc se contenter d’être une bonne mère au foyer, éternellement mineure aux yeux de la loi. Si je fais ce petit retour en arrière, c’est pour répondre aux commentaires des gens qui affirment que «c’était mieux avant». Personnellement, je ne m’ennuie pas du temps où l’homosexualité et le féminisme étaient considérés comme des maladies mentales. Je ne pense pas que notre société soit en train de perdre toutes ses valeurs si chères à nos prédécesseurs. D’une certaine manière, l’ère victorienne n’est pas si lointaine, les Québécoises ne pouvant voter que depuis 1940. Quand on observe le nombre de femmes en politique, on se rend compte qu’il y a encore pas mal de chemin à faire.

La faute de la victime

Il n’y a pas seulement les personnes qui n’y croient pas qui encouragent la culture du viol, mais aussi les personnes qui blâment la victime. On lui reproche alors d’avoir manqué de jugement, comme si c’était elle qui était dans le tort. En croyant que c’est à la victime de faire attention, on banalise le fait qu’il existe des agresseurs. Les dires de la victime sont aussi souvent remis en question: «Elle l’accuse pour l’argent!», ou encore : «Elle cherche l’attention». Certains vont même jusqu’à dire que la victime l’a cherché; c’est ça qu’elle voulait et c’est bien fait pour elle!

L’effet de groupe

Pour en revenir à l’initiation assez dégradante qui s’est tenue à l’Université de Montréal, j’ai lu dans des commentaires concernant l’article: «Avait juste à pas l’faire!» Si seulement les choses étaient aussi simples, je crois qu’il n’y aurait jamais eu de Seconde Guerre mondiale.

On peut lire sur le site psychologiesociale.com, tenu par la psychologue Elisabeth Deswarte, que d’être dans un groupe peut mener les gens à voir des comportements antisociaux. Dans la vie, s’il y a bien quelque chose qu’on hait tous, c’est de se sentir obligé de faire quelque chose. Je ne suis pas nécessairement contre les initiations. En fait, son but est de souder des liens entre les nouveaux étudiants et les vétérans.

L’éducation

La meilleure solution pour améliorer la qualité de vie de tout le monde est sans nul doute l’éducation. Dès le plus jeune âge, il serait important d’enseigner aux futurs citoyens comment vivre en société, et de leur apprendre à respecter les personnes qui nous entourent. J’ai grandi dans une famille assez libérale, dans laquelle je pouvais parler de tout. Malgré cela, rendu à l’adolescence, je dois avouer que j’étais parfois maladroit avec ma blonde de l’époque. J’avais de la misère à communiquer mes craintes et mes désirs. Avec du recul aujourd’hui, je constate qu’il manquait quelque chose à mon éducation. Je n’imagine pas dans les foyers où la sexualité et les relations interpersonnelles sont un tabou. Je crois aussi que les étudiants devraient être plus au courant des programmes offerts par l’UQTR. Il y a notamment un programme de sexologie que tous les étudiants peuvent suivre. Je vous y invite fortement.

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