Ce que l’inuktitut nous apprend sur la zoologie et la botanique inuit : Une conférence captivante

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M. Louis-Jacques Dorais nous invite à découvrir les secrets de l’inuktitut pour la Journée internationale des Inuits

Capture d’écran de M. Louis-Jacques Dorais, anthropologue, linguiste et conférencier. Crédits : Journaliste

Lors d’un midi-conférence en collaboration avec l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) et l’Institut nordique du Québec (INQ), qui a eu lieu le 7 novembre dernier sur le campus, Monsieur Louis-Jacques Dorais, anthropologue et linguiste d’expérience, nous invitait dans son univers, celui de la langue inuktitute. Monsieur Dorais, qui a enseigné pendant près de 40 ans au Département d’anthropologie de l’Université Laval et qui est professeur émérite depuis 20141, nous a partagé son expertise sur la langue inuite, avec un regard tourné vers la zoologie et la botanique afin de souligner la Journée internationale des Inuits.

Organisée par Mme Rachel Hussherr, professionnelle de recherche à l’UQTR et présentée par M. Samuel Rainville à la direction aux relations et à l’engagement auprès des Premiers Peuples à l’UQTR, la conférence avait lieu à la Passerelle du Pavillon de la Santé au 3e étage et était aussi diffusée en direct sur Zoom. Les spectateurs venus écouter M. Dorais prendre la parole sur un sujet si intéressant étaient nombreux autant dans la salle qu’à distance. Des collations gratuites étaient également offertes à l’auditoire.

Capture d’écran du public lors de la conférence Ce que l’inuktitut nous apprend sur la zoologie et la botanique inuit. Crédits : Journaliste

Là où tout prend racine

M. Louis-Jacques Dorais ouvre la conférence en répondant à des questions sur son parcours. On lui demande comment sa carrière a débuté, et il répond que c’est le hasard qui l’a un jour poussé à ouvrir un livre sur les Inuits, dans lequel on décrivait ce peuple comme « pas propre ». Contre toute attente, c’est ce qui éveille sa curiosité sur cette population nordique. Après s’être envolé pour le Nunavik en 1965 en tant qu’étudiant, il découvre, sans surprise, que ces propos ne pourraient pas être plus loin de la vérité. 

M. Dorais poursuit sa présentation en introduisant les bases de la langue inuktitute, reflet des croyances des Inuits et de la manière dont ils perçoivent le monde qui les entoure. Certains ne sont pas conscients du sens qui se cache derrière la morphologie des mots qu’ils utilisent, c’est pourquoi l’analyse morphosémantique de l’inuktitut peut nous en apprendre beaucoup. Dans le livre Words of the Inuit qu’il a écrit en 2020, M. Dorais a fait l’analyse linguistique de plus de 1400 mots inuits, puis s’en est servi pour offrir une analyse à petite échelle à certains chercheurs et usagers de la langue inuktitute. Effectivement, il est parfois difficile de trouver le sens sous-jacent des mots qui peut demeurer vague, même pour les locuteurs de l’inuktitut.

Le règne animal selon les Inuits

Nous entrons ensuite en plein cœur du sujet alors que M. Louis-Jacques Dorais aborde le règne animal et la manière dont les Inuits le classifient. Il nous apprend que les animaux sont répertoriés en six grandes catégories selon leur habitat : les mammifères terrestres qui vivent sur nuna (la terre ferme), les poissons qui vivent dans imaq (l’eau, la mer, les rivières, etc.), les oiseaux qui évoluent une bonne partie de leur vie dans sila (l’air), les mammifères marins qui vivent à la limite de l’eau et l’air, les mollusques et crustacés, qui vivent dans les zones de rivage, puis finalement, les insectes, les vers, les araignées, et toutes autres créatures du même genre, y compris les reptiles. Les noms de plusieurs espèces décrivent également de manière explicite certains aspects distinctifs de l’apparence ou du comportement de l’espèce.

Notre conférencier revient sur la troisième classe qui est gouvernée par sila. Ce terme désigne l’élément de l’air, mais pourrait aussi être comparé au chi dans le taoïsme chinois. En fait, il s’agit également du système qui gouverne tous les mécanismes de l’univers, allant du mouvement des astres au destin de chaque être humain. Une sorte d’intelligence qui nous lie chacun entre nous, à la nature, et à tout ce qui se trouve dans l’univers.

La conférence prend ensuite une tournure plus interactive et ludique avec un jeu de devinettes. À l’écran, M. Louis-Jacques Dorais proposait onze descriptions désignant le nom d’un animal et le public était invité à trouver les réponses. Les tentatives lancées dans la salle allaient bon train. Saurez-vous trouver les onze solutions? Découvrez les réponses à la fin de l’article!

De quel animal s’agit-il? Capture d’écran de la conférence de M. Dorais. Crédits : Journaliste

La vision inuite du monde végétal

Pour l’autre moitié de la conférence, on passe alors à la morphologie et à la sémantique des termes désignant les végétaux. Pirurtuit (le pluriel de pirurtuq) signifie « ça devient quelque chose », c’est-à-dire qui croît, qui pousse, qui se développe. Donc, dans les yeux des Inuits, les végétaux sont des êtres qui croissent. Ils sont, pour leur part, divisés en trois grandes catégories, selon leur habitat et leur taille : les algues, ou tininnimiutait, qu’on retrouve entre les eaux et les rivages, les arbres, ou napaartuit, signifiant « qui se tiennent debout », et enfin la végétation de sol, ou nunajait pirurtut, qui signifie « morceaux de sol qui croissent ». M. Dorais souligne ensuite un fait intéressant : pourquoi les Inuits ont-ils un mot pour désigner les arbres si ceux-ci ne poussent pas au nord? Pour les populations inuites, le bois est en fait une ressource indispensable, notamment pour la construction de kayak. Ils trouvaient du bois de flottage provenant du sud.

Un mot de la fin et un auditoire conquis

Alors que la présentation de M. Louis-Jacques Dorais tirait à sa fin, il conclut en disant « […] ils ont une façon très particulière de voir les êtres vivants qui les entourent, êtres vivants avec lesquels ils entrent en relation—les animaux, les plantes, les gens qui vivent dans les villages et sur le territoire, qui sont constamment en contact avec eux. Et on a besoin de ces relations avec eux. » Il nous remercie dans sa langue choisie, l’inuktitut.

S’en est suivi une période de questions de la part du public, allant à la signification spirituelle derrière les mots, à la classification de certains animaux insoupçonnés, au développement de l’inuktitut dans la modernité, jusqu’à l’avenir et à la transmission de la langue. L’auditoire semblait très intéressé par le sujet que nous présentait notre conférencier, qui n’a d’ailleurs pas eu le temps de répondre à tout le monde, tellement l’intérêt était vif. La conférence s’est donc terminée sur une chaleureuse main d’applaudissement.

Voici les solutions au jeu de devinettes!

Capture d’écran des onze solutions aux devinettes. Crédits : Journaliste
  1. https://blogue.uqtr.ca/evenements/midi-conference-uqtr-inq-ce-que-linuktitut-nous-apprend-sur-la-zoologie-et-la-botanique-inuit/ ↩︎
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