Éditorial: Édito moralisateur – Le gaspillage

0
Publicité

La session est déjà bien entamée, ce qui veut dire qu’on approche de la date d’abandon sans échec. Dans quelques semaines, les classes se dégarniront à cause de ceux et celles qui décident de ne pas suivre des cours pour lesquels ils et elles ont payé. Certains diront qu’il s’agit d’une démarche salutaire pour leur moyenne, mais c’est plutôt un symptôme d’un grand mal qui frappe l’université.

Ces mots semblent forts? Ce n’est pas gratuit. La question est un non-sens, ne serait-ce que d’un point de vue économique. Les cours à l’université coûtent cher et voilà que certains paient pour un tel service pour ensuite refuser de le recevoir. C’est comme d’aller faire l’épicerie pour ensuite tout jeter aux vidanges une fois chez nous au lieu de garnir son réfrigérateur.

Certains rétorqueront que cette mesure sert à se défaire d’un cours pour lequel on allait de toute façon avoir une mauvaise note.

Premièrement, ayant déjà déboursé pour le cours, pourquoi ne pas le suivre tout de même? Il sera de toute façon nécessaire de le reprendre, aussi bien avoir une longueur d’avance en ayant déjà vu la matière. Si justement le cours s’annonce ardu, ce grand coup de pouce s’avèrera probablement salutaire. Aussi bien en profiter.

Deuxièmement, il conviendrait de rappeler à certains qu’en s’inscrivant à l’université, ce n’est pas un bulletin qu’on achète, mais bien une formation. En effet, contrairement à ce qui semble de plus en plus répandu comme mentalité, le fait de donner de l’argent à l’université ne constitue pas une garantie d’avoir une mention d’excellence sur son diplôme.

Rappelons-le encore, l’université est une institution d’enseignement, ce n’est pas une imprimerie à diplômes. On se demande donc bien quel raisonnement peut pousser quelqu’un à payer pour un service pour ensuite refuser de s’en prévaloir.

Épargnons-nous l’argument d’autorité évident: «Si l’administration nous permet de le faire, ce ne doit pas être une mauvaise chose». Si vous payez un plombier d’avance, mais que vous le rappelez avant qu’il soit passé pour lui dire que vous allez apprendre à vivre avec un marécage dans votre sous-sol, est-ce que vous vous attendez à ce qu’il rouspète?

Bien sûr que non.

Compétition

Revenons cependant à un argument cité plus haut. Il est question d’une aversion pour les «mauvaises notes». Bien malin est celui qui peut donner une définition générale d’une mauvaise note, malgré que celles-ci semblent être la plus grande phobie d’un nombre grandissant d’étudiants.

Pour ceux-ci, il est préférable de payer dans le vide plutôt que de courir la chance de voir une note sous-optimale inscrite à son bulletin, ne serait-ce que temporairement. En effet, même si cette pratique est douteuse pour des raisons similaires, il est toujours possible de reprendre un cours déjà fait. Dans ce cas, la nouvelle note efface l’ancienne.

Les deux démarches ont en commun cependant le fait de ne pas se contenter de la note reçue ou projetée. Il s’agit évidemment d’une situation qui touche plus les programmes d’études compétitifs. Il s’agit généralement de baccalauréats qui n’ont pas nécessairement de valeur en soi, mais qui servent de passerelle à un autre programme plus prestigieux.

Rappelons-le encore, l’université est une institution d’enseignement, ce n’est pas une imprimerie à diplômes.

Ainsi, le but même de suivre ses cours est complètement tordu. Il ne devient question que de remplir la série d’exigences du programme dans lequel il est question d’être accepté, au détriment bien sûr de l’apprentissage lui-même. Et au sommet de cette liste, se situe immanquablement le «rendement scolaire».

Des comportements comme des étudiants qui cachent leurs notes de cours en classe pour ne pas que les voisins puissent les copier, jusqu’au caviardage de sections intéressantes dans les livres réservés à la bibliothèque, sont le fruit d’une compétitivité hors du commun entre collègues de classe.

Dans un tel paradigme scolaire, ceux-ci ne sont plus des confrères, mais des ennemis potentiels, qu’il convient de tenter d’empêcher de réussir. Bien sûr, il devient de plus en plus difficile de saluer la réussite d’un ami, quand celle-ci semble un écueil à notre propre réussite. De cette manière, la compétition empoisonne les relations et seul reste le besoin viscéral d’avoir la note.

Mais la note ne sera pas une consolation quand vous aurez des doutes sur votre orientation de carrière. Elle ne vous remontera pas le moral quand vous vivrez une petite déprime passagère ou quand votre chat sera malade.

La note n’est pas une fin en soi, elle n’est pas non plus une définition de votre personne. La note est une appréciation plus ou moins objective de votre performance à une tâche en lien avec le cours. C’est une lettre sur un papier.

Publicité

REPONDRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici