L’élection des officiers de l’Association générale étudiante (AGE) est un moment important pour toute communauté universitaire, car on y dessine l’avenir décisionnel de l’association étudiante. Cette année, l’AGE a été le théâtre de candidatures de haute qualité, reflétant l’engagement et le dynamisme des étudiants de l’université. Cependant, malgré les efforts louables des candidats et de la directrice des élections, le taux de participation des étudiants lors du vote électronique reste préoccupant. À travers ce texte, je m’interroge sur les raisons sous-jacentes à ce désintérêt apparent pour la vie associative en examinant les contraintes temporelles et financières auxquelles sont confrontés de nombreux étudiants. Au-delà des aspirations individuelles, il s’agit de comprendre les enjeux systémiques qui peuvent influencer l’engagement étudiant et la participation démocratique au sein de l’université. Dans le fond, est-ce que les étudiants s’en foutent vraiment ou est-ce seulement un mirage ? Constat : un peu des deux selon moi.
Des candidates de choix
Cette année, sans se prononcer sur les candidats des années précédentes, l’AGE recevait des candidatures de choix. Concernant les candidats du conseil exécutif, trois officières déjà en poste se représentaient. Il s’agit de Chloé Séguin à la Coordination générale, Élodie Gagnon à la coordination aux communications ainsi que Nora Tremblay au poste de Secrétaire général. Une nouvelle candidate, Judith Lessard se joindra prochainement à l’équipe, en tant que coordinatrice à la vie associative.
Les trois jeunes femmes déjà en poste ont démontré leur maîtrise des compétences nécessaires. Le trio est arrivé en cours de mandat, suite à plusieurs démissions. Il a donc dû rapidement relever des défis au sein de l’AGE. Par exemple, les postes de coordination générale étaient vacants depuis plusieurs mois, nécessitant un redressement immédiat. Chloé Séguin a dû s’investir intensément pour régler certains dossiers tout en s’attelant à de nouvelles responsabilités. Par exemple, sur la rédaction du nouveau plan stratégique.
Malgré la lourde charge de travail, les trois étudiantes ne se sont pas découragées. Ce qui est remarquable, c’est qu’elles n’ont pas pris les étudiants pour acquis. Chacune à leur manière, elles ont mené leur campagne électorale en cherchant à établir une relation de confiance avec l’électorat étudiant. Au lieu de fournir le strict minimum, elles ont décidé de s’investir pleinement et de démontrer qu’elles pouvaient aller encore plus loin.
Quant à Judith Lessard, son implication préalable au sein de son association de programme, l’Association étudiante du baccalauréat en éducation préscolaire et primaire (AÉBÉPEP), est notable. Comme le rapporte mon collègue Robin Marques dans son article sur le débat des candidats, Judith aspire à rénover le local 1078 du pavillon étudiant, qui, entre nous, manque grandement d’amour. Elle espère aussi assurer la pérennité de la Coupe des Associations et répondre aux besoins des associations étudiantes. Il est donc évident que Mme Lessard a compris les tâches et la mission inhérentes à la coordination à la vie associative. Contrairement à plusieurs candidats qui, par le passé, se sont présentés sans réelle connaissance du poste, cela témoigne du sérieux et de la motivation de Judith Lessard à s’impliquer efficacement.
Directrice des élections et manque de quorum
Pour l’instant, il y a trop de postes restés vacants pour avoir le quorum. Par contre, Le conseil exécutif ou le conseil d’administration peut déclencher une élection partielle suivant […] la vacance d’un poste ou d’un siège, peut-on lire dans les statuts et règlements généraux de l’AGE. Il n’est donc pas nécessaire de paniquer pour l’instant.
Il serait tentant de blâmer la directrice des élections, Annie Chiasson, pour cette situation. Cependant, en réalité, cela ne lui est pas imputable. Mme Chiasson a démontré un engagement constant tout au long du processus électoral. Autant par ses stratégies de communication que par ses efforts de sollicitation directe auprès des étudiants. D’ailleurs, ce problème de faible engagement étudiant n’est pas nouveau, comme en témoigne le nombre de postes vacants lors des élections précédentes.
Taux de participation et démocratie participative
Ce qui est particulièrement préoccupant, c’est le taux de participation alarmant des étudiants de l’université. Sur une population étudiante de près de 15 000 individus, seulement 1% d’entre eux ont exercé leur droit de vote. Cela signifie que moins de 150 étudiants ont pris part à l’expression de leur avis sur l’avenir de l’AGE. Il est important de rappeler que chaque session, tous les étudiants contribuent financièrement à cette association par le biais de leur cotisation sur leur état de compte. Sans disposer des chiffres exacts, il est à souligner que l’AGE détient des actifs financiers considérables, en partie alimentés par les fonds des étudiants de l’UQTR. En véritable gouvernement étudiant à petite échelle, il est alarmant de constater que seule une infime minorité se prononce pour l’ensemble de la communauté étudiante.
L’année précédente, lors d’une assemblée générale extraordinaire, il avait été décidé que les élections se dérouleraient désormais par voie électronique. Le but de cette mesure était de favoriser une plus grande participation des étudiants. Cette décision avait été prise en réponse à un constat récurrent de faible participation aux élections étudiantes lors des années précédentes. Cependant, il semble que cette mesure n’ait pas eu l’effet escompté, et le taux de participation demeure désespérément bas.
Les étudiants s’en foutent ?
Tout d’abord, il est légitime de se demander si les étudiants sont véritablement indifférents à la vie associative ou si d’autres facteurs entravent leur implication. Au cours de mes deux dernières années passées au Zone Campus, j’ai eu l’occasion de discuter avec de nombreux étudiants pour comprendre ce qui les empêchait de s’impliquer davantage dans la vie étudiante. Généralement, les réponses obtenues étaient vagues et désordonnées. En creusant davantage, il était évident que bon nombre d’entre eux connaissaient peu, voire rien, de l’AGE ou de la vie étudiante en général.
Pour les personnes avec une meilleure connaissance de la vie associative, plusieurs raisons peuvent expliquer partiellement le manque d’implication. D’abord, très simplement, le bénévolat n’est plus (s’il l’a déjà été) à la mode. Ensuite, l’inflation, ou simplement le prix de la vie font en sorte que les étudiants doivent travailler des 10, 15, 20 voire même plus d’heures chaque semaine. L’implication étudiante demande parfois plusieurs heures par semaine, et étant donné que de moins en moins de personnes s’impliquent, la charge de travail de chaque poste s’alourdit davantage. Finalement, une autre raison souvent évoquée s’articule autour de la compétition universitaire ou la nécessité d’obtenir de bonnes notes. Les étudiants doivent passer beaucoup de temps devant leur écran pour étudier. Est-ce que les professeurs donnent une charge de travail trop lourde ou est-ce une question d’une organisation inadéquate ? Difficile à dire.
Je me rappelle d’une personne qui m’avait marqué alors que je faisais des recherches pour mon reportage sur les études en psychologie à l’UQTR. Cette personne était une jeune maman et expliquait qu’elle s’était toujours beaucoup impliquée dans sa communauté. Avant d’avoir son enfant, elle caressait le rêve de devenir psychologue. Elle s’était donc inscrite au baccalauréat en psychologie. Elle m’expliquait qu’elle n’avait pas le temps de s’impliquer dans la vie associative et que cela l’a peinait beaucoup.
Cette personne n’est pas la seule. Certes, je n’ai pas l’impression que sa condition représente l’ensemble des autres étudiants. J’ai donc de la difficulté à me positionner, car d’un sens, je vois les gens qui s’impliquent et qui sont épuisés. Je comprends qu’en voyant cela, le reste des étudiants n’aient pas envie de vivre la même situation. Par contre, s’impliquer activement dans sa communauté étudiante permet de créer des liens solides d’amitié en plus de développer un sentiment de compétence. Un moteur puissant dans de futures carrières bien souvent.