Hommage d’Ottawa à un ancien soldat nazi : le calme après la tempête

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Volodymyr Zelensky et Justin Trudeau ont applaudi Yaroslav Hunka, qui était présent dans la tribune. PHOTO : LA PRESSE CANADIENNE / PATRICK DOYLE

Cela faisait plusieurs jours qu’Ottawa était sous pression dans cette affaire qualifiée du « plus grand embarras diplomatique » de l’histoire du pays par le chef de l’opposition conservatrice, Pierre Poilièvre.  L’orage semble finalement s’être calmé après la démission du président de la Chambre des communes et les excuses de Justin Trudeau.

Retour sur le contexte

Lors du passage du président ukrainien Volodymyr Zelensky à Ottawa le 22 septembre dernier, Anthony Rota a fait applaudir dans l’enceinte du parlement Yaroslav Hunka, vétéran ukrainien de 98 ans, accusé d’avoir combattu dans la SS.

Il avait présenté cet homme comme un « héros ukrainien », venant de sa circonscription électorale. Les députés de tous les partis, Justin Trudeau, son gouvernement et Volodymyr Zelensky, de confession juive, se sont levés pour applaudir Yaroslav Hunka, ignorant les détails de son passé.

Selon l’association de défense de la communauté juive au Canada, les Amis du Centre Simon Wiesenthal (FSWC), Yaroslav Hunka a servi dans la 14e division Waffen Grenadier de la SS, une unité militaire nazie dont les crimes contre l’humanité pendant l’Holocauste sont bien documentés. La 1re Division ukrainienne était également connue sous le nom de Division SS Galicie, une unité de volontaires placée sous le commandement de la SS.

Un hommage scandaleux

Pour le chef conservateur Pierre Poilievre, « Il s’agit d’une grave erreur de jugement de la part de Justin Trudeau, dont son bureau du protocole est chargé d’organiser et d’approuver tous les invités et programmes des visites d’État de ce type », a-t-il écrit sur X, en demandant les excuses du premier ministre. Le groupe de défense les Amis du centre Simon Wiesenthal a publié le 24 septembre, un communiqué affirmant que la division « était responsable du massacre de civils innocents avec un niveau de brutalité et de méchanceté inimaginable ».

De son côté, l’ambassadeur de Russie au Canada, Oleg Stepanov, a parlé de « commémoration scandaleuse », demandant au Premier ministre canadien de s’excuser auprès de la Russie pour les « multiples crimes de guerre » commis par cette brigade SS à l’encontre du peuple russe. En Pologne, le gouvernement a lancé une enquête pour vérifier si ce vétéran ukrainien n’avait pas commis de crimes sur son territoire, en vue de son éventuelle extradition.

La démission du président  de la Chambre des communes

Le président de la Chambre des communes, Anthony Rota, au Parlement à Ottawa, le 25 septembre 2023. BLAIR GABLE / REUTERS

Élu pour la première fois en 2004 sous la bannière libérale, M. Rota, 62 ans, a été réélu à cinq reprises. Il était le président de la Chambre depuis 2019, un poste clé du système parlementaire canadien, au-dessus des partis. Il assumait de nombreuses responsabilités administratives et diplomatiques ainsi que les liens avec le Sénat et la Couronne, c’est-à-dire la représentation du roi Charles III, chef d’État en titre du Canada.

Anthony Rota s’était excusé dimanche 24 septembre une première fois pour cette invitation, expliquant « être le seul responsable de cette initiative ». Mais ses excuses n’avaient pas suffi devant la polémique qui menaçait de retomber sur le Premier ministre canadien.

De nombreux membres du gouvernement étaient aussi montés au front : Mélanie Joly, la ministre des Affaires étrangères avait ainsi estimé que M. Rota n’avait pas le choix et devait démissionner, parlant de « honte pour les Canadiens ». Chose qu’il fera finalement le 26 septembre dernier.

Les excuses de Justin Trudeau et la fin de la tempête

Le Premier ministre a qualifié l’hommage de « terrible erreur » et de « violation de la mémoire de ceux qui ont cruellement souffert aux mains du régime nazi ». Il a également indiqué qu’Ottawa avait déjà contacté Kiev et le président Volodymyr Zelensky pour leur présenter des excuses.

« Le président de la Chambre était l’unique responsable de l’invitation lancée à cet homme et de l’hommage qui lui a été rendu », a dit M. Trudeau lors d’un point de presse. Pour le politologue Frédéric Boily de l’Université de l’Alberta, les excuses du premier ministre sont « une tentative de calmer le jeu, mais trop tard ». Quant à la restauration de la réputation du Canada à l’étranger, M. Boily croit qu’il faudra du temps.

Références

https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/2013402/justin-trudeau-excuse-soldat-nazi-hommage

https://www.france24.com/fr/am%C3%A9riques/20230928-hommage-%C3%A0-un-ex-soldat-nazi-ukrainien-le-fiasco-canadien-qui-fait-les-choux-gras-de-moscou

https://information.tv5monde.com/international/hommage-un-ex-soldat-nazi-le-president-du-parlement-canadien-demissionne-2669158

https://www.ouest-france.fr/monde/canada/hommage-a-un-ex-soldat-nazi-au-parlement-canadien-justin-trudeau-presente-ses-excuses-40667cc0-5dec-11ee-8071-b3df98b851e9

https://www.ledevoir.com/politique/canada/798717/deputes-ont-honore-homme-combattu-nazis

https://www.lemonde.fr/international/article/2023/09/26/hommage-a-un-ancien-soldat-nazi-sous-pression-le-president-du-parlement-canadien-demissionne_6191131_3210.html

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