Je me souviens… Au pouvoir, citoyens!: Les véritables origines du Parti Libéral du Québec (partie 2)

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Il existe présentement 19 partis politiques au Québec, et le Parti Libéral du Québec (PLQ) est le plus vieux. Or, le manque total de vision du gouvernement Couillard nous invite à relire l’histoire de ce parti qui aura dirigé le Québec, entre 1867 et 2018, pendant près d’un siècle.

La Révolution tranquille des libéraux de Jean Lesage (1960-1967) et Robert Bourassa (1970-1976, 1988-1994) avait permis au Québec de se moderniser à plusieurs égards, en développant notamment son autonomie énergétique. L’apport du PLQ à l’édification du Québec d’hier à aujourd’hui est sidérant. Sous son impulsion, le Québec s’est doté d’importants outils de justice sociale et de développement économique: assurance-hospitalisation (1962), nationalisation de l’hydroélectricité grâce à René Lévesque sous le thème «Maîtres chez nous» (1963), création du premier ministère des Affaires culturelles (1961) et du premier ministère de l’Éducation (1964), création de la Caisse de dépôt et de placement du Québec (1965), assurance-maladie (1970), première loi en matière de protection de l’environnement (1972), régime d’allocations familiales (1973), aide juridique (1973) puis la Charte québécoise des droits et libertés de la personne (1975).

Même si Bourassa était devenu en 1970 le plus jeune Premier ministre dans l’histoire du Québec, à seulement 36 ans, l’héritage qu’il aura légué (malgré son inexpérience ou les controverses et diverses crises sociales telles le Front commun de 1972-74) est éloquent.

La loi proclamant le français comme la seule langue officielle de l’État du Québec (1974) doit également être largement saluée. Encore en 1990, à la suite de l’échec de l’entente constitutionnelle du Lac Meech avec le Canada – et refusant l’option indépendantiste fortement suggérée par le célèbre rapport de Jean Allaire (1991) – le Premier ministre Bourassa affirmait fièrement: «Le Canada anglais doit comprendre de façon très claire que, quoi qu’on dise et quoi qu’on fasse, le Québec est, aujourd’hui et pour toujours, une société distincte, libre et capable d’assumer son destin et son développement». Cela dit, d’après le péquiste Jean-François Lisée, Robert Bourassa a malheureusement «gaspillé la fenêtre historique pendant laquelle la réforme interne du Canada était envisageable».

Même si le PLQ s’est désaffilié du PLC depuis 1955, devenu alors un parti distinct et autonome, il a été réellement un parti revendicateur qui ne se conformait pas à tout ce que voulait Ottawa… jusqu’à tout récemment. John James Charest (un ex-conservateur de l’équipe de Brian Mulroney, avec Lucien Bouchard), préservait encore un minimum de nationalisme québécois grâce à son adhésion au fédéralisme asymétrique.

Ce minimum semble avoir disparu avec Philippe Couillard dont l’empressement à signer la Constitution canadienne démontre un abandon de toute revendication québécoise auprès du fédéral. La disparition du français dans ses discours internationaux, sans parler des coupes annoncées dans les relations internationales, démontre son manque de volonté pour défendre le fait français et la spécificité québécoise. Ainsi, le PLQ détruit plus que jamais son engagement historique, selon Claude Ryan (ex-chef du PLQ), de veiller à toujours affirmer et défendre le caractère français du Québec.

L’actuel PLQ fait aussi piètre figure avec son nouveau règlement sur la «protection» des sources d’eau potable, publié en juillet 2014, qui permet selon Greenpeace de «forcer les municipalités et les citoyens québécois à tolérer les forages pétroliers à une distance quatre fois moindre, soit 500 mètres». Le cas de Restigouche laisse perplexe quant à la volonté réelle du gouvernement Couillard de protéger d’une part notre eau, ce bien collectif essentiel, d’autre part nos régions vulnérables contre l’industrie. Abandonnée par le pouvoir politique, cette municipalité de la Gaspésie est poursuivie pour 1,5 millions de dollars par une compagnie pétrolière, Gastem (présidée par un ancien ministre libéral).

Quel héritage ?

Lapalme doit bien se retourner dans sa tombe, lui qui avait écrit qu’«être libéral, c’est être socialement juste». Se réclamer de l’esprit libéral, c’est vouloir en même temps le progrès de l’individu et celui de la société. C’est faire avancer les libertés individuelles et le bien général de la société. Où en est-il cet engagement du PLQ envers la justice sociale? Où se cachent ces valeurs de liberté, de progrès et de réforme inhérentes au Parti Libéral?

Le refus obstiné pendant deux ans et demi, sous Charest, de déclencher une enquête sur l’industrie de la construction témoigne plutôt d’une fermeture totale au changement. Les commissions bidons comme celle sur la révision des programmes étatiques semblent plutôt des spectacles pitoyables de pseudo-démocratie où tout est déjà joué d’avance.

Où en est-il cet engagement du PLQ envers la justice sociale?

Attendons quand même avec impatience le rapport final de la commission Charbonneau, entre avril et novembre prochain, car le PLQ, le «véhicule favori des corrupteurs» selon Le Devoir d’après l’analyse du politicologue libéral Denis Saint-Martin, a déjà été averti qu’il serait particulièrement blâmé pour son mode de financement.

Ayant renié la plupart de leurs promesses électorales, un programme qui aurait pu, selon l’historienne Lucia Ferretti, s’intituler «Pour en finir avec l’égalité des chances!», il n’est pas étonnant que la cote de popularité de ces (néo)libéraux descende à vue d’œil. À la mi-décembre, le taux d’insatisfaction, en hausse de 11%, a atteint 64%. Certains députés libéraux tels que Pierre Paradis, Laurent Lessard et Jacques Daoust, ont déjà commencé à hausser le ton face à leur propre parti. La manière libérale semble être une culture de la confrontation plutôt que de la concertation. Pas facile la démocratie au pays des bandits!

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Ayant été élu le 7 avril avec à peine 40% du suffrage, le Premier ministre ne saurait donc prétendre, comme il l’a fait le 6 septembre 2014, et dire ainsi parler en leur nom, que «les Québécois souhaitent que le pacte qui lui a donné naissance [au Canada] soit réaffirmé». En effet, il veut signer la constitution canadienne d’ici le 1er juillet 2017 (pour le 150e du Canada) alors que ses prédécesseurs, sans doute plus expérimentés, ont tous refusé.

Selon l’ancien chef Claude Ryan, dans son petit livre Les valeurs libérales et le Québec moderne (2002), le PLQ avait aussi refusé de s’associer aux célébrations du rapatriement de la Constitution en 1982, tout comme il s’opposa en 1997 au Renvoi sur la sécession à la Cour suprême, ainsi qu’à la Loi C-20 (loi sur la clarté référendaire de Dion) en 1998.

Passant de patriote bas-canadien à une certaine forme d’autonomisme, le PLQ est désormais nationaliste canadien et fédéraliste à outrance, sans parler de l’aplaventrisme devant le monstre du capitalisme par la marchandisation du savoir. Même les jeunes libéraux prônent les péages sur les ponts, la privatisation de la SAQ et l’abolition des cégeps, privilégiant plutôt un système d’éducation axé sur les besoins de l’entreprise!

La menace de la ministre de la Culture de couper dix millions aux conservatoires de musique et art dramatique, pourtant créés par le PLQ, est une autre preuve de «la culture de l’inculture» au Parti Libéral selon l’expression de la citoyenne Geneviève St-Germain, totalement indignée: «Paradoxal, non, quand le premier ministre Couillard a pratiquement basé sa dernière campagne électorale sur la nécessité de revalorisation des dites régions.»

Les politiques d’austérité (camouflées sous le terme malhonnête de rigueur ou d’équilibre budgétaire), la dilapidation des régions, la privatisation de la santé et de l’éducation, ainsi que le démantèlement programmé de l’État-providence, n’ont rien à voir avec l’héritage progressiste du Parti Libéral. Aussi, les nombreuses coupes dans les services aux classes moyennes et aux moins nantis témoignent d’un abandon des intérêts du peuple québécois.

Ce néo-PLQ est assujetti plus que jamais à Ottawa, victorieux «dans l’art de ramper dans la négation de ce que nous sommes» écrivait récemment Pierre Schneider. Nous n’avons pas des idéalistes au pouvoir, mais selon un terme emprunté à Jean Barbe, des irréalistes.

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