La période référendaire écossaise – peu importe son résultat serré (55,4 % contre 44,6 %) – est une occasion idéale pour réfléchir sur notre appartenance au système fédéral canadien et sur les différents coûts qui y sont reliés. Car si l’indépendance a un prix, la dépendance en a un aussi.
Pas besoin de reculer jusqu’à la répression brutale des Patriotes en 1837-38 par l’armée anglaise, ni aux propos racistes de Pierre-Elliot Trudeau à l’encontre des Canadiens-français, ni à l’échec navrant de la Constitution canadienne en 1982, ou plus récemment au fameux scandale des commandites du PLC (Parti Libéral Corrompu) du p’tit gars de Shawinigan, Jean Chrétien, et ses quelques tentacules vénéneux (Conseil pour l’unité canadienne, Option Canada), pour fonder les bases de l’indépendantisme québécois.
Pas besoin non plus d’aller piger dans les nombreux sondages qui démontrent clairement la chute brutale de l’appartenance des jeunes Québécois(es) à l’identité canadienne. Non, tout se passe ici et maintenant. En effet, chaque jour qui passe depuis l’élection en janvier 2006 de Stephen Harper au poste de Premier ministre du Canada, nous donne des raisons supplémentaires pour faire du Québec un pays entièrement indépendant.
Que ce soit l’incompétence totale des dirigeants de Transport Canada et des entreprises ferroviaires canadiennes dans le dossier de la catastrophe de Lac-Mégantic (juillet 2013), l’inaction du gouvernement fédéral lors des inondations du Richelieu (mai 2011), l’intention d’abolir la commission canadienne du blé (alors que 40 à 45% de l’économie agricole québécoise est dans la gestion de l’offre), le désir d’implanter une réforme de l’assurance-emploi au désavantage principalement du Québec et des Maritimes, la place ridicule laissée au français dans les grands évènements ou les festivités de l’État fédéral (Jeux de Vancouver à l’hiver 2010) et le dénigrement du bilinguisme obligatoire pour les plus hautes fonctions du pays canadian, l’abolition controversée du registre des armes à feu (avril 2012) dont le Québec attends toujours les données qui lui appartiennent, le remplacement du programme de la Fondation canadienne des bourses du millénaire par des prêts étudiants (janvier 2010), le retrait aussi controversé des peintures d’Alfred Pellan au profit d’un tableau de la reine d’Angleterre (juillet 2011), l’adoption d’une motion vide et insignifiante pour reconnaître la «nation québécoise» (27 novembre 2006), la volonté de commémorer voire célébrer à outrance sur nos terres la «victoire» anglaise sur les Français (1759-2009), l’augmentation des mesures pénitentiaires et répressives pour les jeunes contrevenants, la réforme urgente mais avortée du Sénat canadien (qui coûte 100 millions d’argent public chaque année pour des gens non élus mais nommés par le parti au pouvoir), le scandale du péage imposé sur le nouveau pont Champlain à Montréal, le remplacement du prix Thérèse-Casgrain par un hommage au Premier ministre Harper, les coupures honteuses chez Poste Canada (décembre 2013), puis la volonté crasse de criminaliser davantage la prostitution (les clients dit-on) et le cannabis[1] au lieu de les encadrer – de toute façon, des lois ne feront jamais disparaître ni l’usage récréatif des drogues ni la vente de sexe.
Rajoutons à cette liste exécrable des perversités du système fédéral et des mauvaises actions de Stephen «Heil» Harper, le désir du Premier ministre du Canada d’aller de l’avant avec la Commission nationale des valeurs mobilières malgré le refus unanime du Québec, la répression violente des manifestants du G8 à Toronto (juin 2010), la défense de l’exploitation du pétrole sale et polluant dans les sables bitumineux jusqu’au projet de forages exploratoires par TransCanada à Cacouna en passant par le soutient accru au développement de pipelines qui défendent le modèle économique actuel, mais désuet basé sur la dépendance à l’or noir, l’exclusion du Canada du Conseil de sécurité (soit le plus puissant organe de l’ONU, octobre 2010), le désir de Stephen Art-Peur de donner plus de poids aux juges de la Cour suprême plutôt qu’aux élus du peuple, l’abandon de l’obligation de remplir le recensement de Statistique Canada, le refus de créer une commission nationale d’enquête sur la situation précaire des Amérindiens, le laisser-faire qui permet à ADM de détruire l’aérogare de Mirabel (le fédéral serait propriétaire de l’endroit), le financement accru et sans précédent des activités militaires au détriment de la science, des recherches en environnement et dans les énergies vertes, tout en effectuant de nombreuses coupures dans les milieux communautaires et coopératifs, dans les subventions aux artistes (promotion outre-mer, bourses de soutient) ou encore dans les institutions culturelles comme Radio-Canada. Alouette!
*
Disons-le franchement, appartenir au Canada – malgré l’absence sidérante de signature officielle de la part du Québec depuis 1982 – a un prix. Par exemple : le Canada soutient et défend, EN NOTRE NOM, le retrait de nombreux forums écologistes et du protocole de Kyoto (décembre 2011) alors que le Québec atteint ses cibles, la militarisation de l’espace ainsi que du Grand Nord canadien et bien sûr, un appui fidèle et inconditionnel aux agressions massives de l’État d’Israël sur le peuple Palestinien (juillet 2014).
Tout ce qui nous liait encore psychologiquement ou économiquement au Canada vient d’être anéanti en moins d’une décennie par le Parti Conservateur de Harper.
Déjà que le parti au pouvoir – conservateur-monarchiste – n’a que cinq sièges sur 75 au Québec, cela démontre la capacité du gouvernement fédéral canadien, pour la première fois depuis le pacte confédératif de 1867, de gouverner sans nous. Le Québec n’est plus la balance du pouvoir. D’ailleurs, cette géopolitique est loin de s’évanouir considérant que la grande majorité des nouveaux sièges ajoutés à la Chambre des communes ne seront pas chez-nous : sur les trente nouvelles circonscriptions à l’élection de l’automne 2015, ou avant, seulement trois seront au Québec. Le projet d’une «union efficace» est désormais impossible, car tout ce qui nous liait encore psychologiquement ou économiquement au Canada vient d’être anéanti en moins d’une décennie par le Parti Conservateur de Harper, aussi charismatique qu’une boîte de céréales non sucrées.
Ne venez pas pleurer pour la péréquation d’à peine 10 milliards de dollars alors que le Québec envoie, chaque année, près de 45 milliards à Ottawa (50% de nos impôts). Une somme que le gouvernement fédéral se permet bien de nous remettre selon ses propres intérêts ou ses partenaires qui ne sont pas très souvent de notre bord de la frontière. À ce sujet, il faut absolument lire l’ouvrage de Stéphane Gobeil, intitulé «Un gouvernement de trop» (VLB éditeur, 2012), dans lequel l’auteur démontre clairement que la souveraineté du Québec permettrait d’épargner des sommes colossales. J’aurai l’occasion d’y revenir.
Pour l’instant, et surtout pour conclure, rappelez-vous entre autres du soutien indécent et scandaleux à l’industrie automobile (principalement en Ontario) à coups de milliards, un gaspillage de fonds public au détriment de l’industrie des pâtes et papier (principalement au Québec) encouragée et soutenue ridiculement avec à peine 200 millions de dollars…
*
Dans son livre «Aux pays des merveilles» (2006), le très détestable André Pratte, éditorialiste en chef de La Presse (lire La Paresse), voulait donner une nouvelle tactique aux fédéralistes pour contrer le projet de pays des séparatistes. Pratte raconte qu’à l’issue de son débat contre Jimmy Carter, lors des élections présidentielles américaines de 1980, Ronald Reagan avait frappé un grand coup en suggérant aux États-Uniens de faire leur choix après s’être posé la question suivante : «Êtes-vous dans une meilleure situation aujourd’hui qu’il y a quatre ans?».
Et vous, chers lecteurs, pensez-vous que le Québec est dans une meilleure position qu’en 2006? Est-ce que le peuple canadien est mieux représenté dans le monde? Disons-le franchement, êtes-vous fiers de l’aplaventrisme du Québec devant ce pays qu’on appelle le Canada, dominé massivement par les intérêts de l’économie pétrolière de l’Ouest?
[1]Rappelons que la marijuana est une herbe thérapeutique utilisée dans la médecine chinoise depuis des millénaires. Des études récentes démontrent que l’huile de cannabis peut détruire les cellules cancéreuses!