La plume de travers : Saga, un space opéra familial

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Étienne Gélinas : La plume de travers. Crédit : Sarah Gardner.

Une fois n’est pas coutume, cette semaine j’ai décidé de vous parler d’une bande-dessinée. Plus spécifiquement d’un comicbook américain scénarisé par Brian K. Vaughan et illustré par Fiona Staples. Les comics ont bien souvent la fâcheuse réputation de ne livrer que de puériles histoires de super-héros, et il est vrai que le marché est dominé par les « Big Two », Marvel et DC (Superman, Batman, Spider-man, Iron-Man etc.) Cependant, cette semaine nous nous tournons vers l’éditeur indépendant Image Comics pour traiter du chef-d’œuvre moderne Saga. Bien plus qu’une simple histoire de science-fiction, cette bande-dessinée se veut une allégorie de l’acceptation de l’autre et des guerres pour toujours injuste à travers un contexte de Space Opéra

Une écriture intimiste pour des émotions cosmiques

Depuis 2012, la scénarisation est assurée par Brian K. Vaughan (Y the last man, Ex Machina etc.). Reconnu depuis plusieurs années comme l’un des scénaristes phares de la bande-dessinée américaine indépendante, cet auteur livre avec Saga un succès fracassant. L’histoire se déroule dans un monde fantastique où deux races extraterrestres sont en guerre depuis des temps immémoriaux, sans que personne ne puisse réellement se souvenir pourquoi. Marko, alors prisonnier de guerre, vivra pourtant une histoire d’amour avec Alana, sa geôlière. S’en suivra la naissance d’une enfant, Hazel, considérée comme une aberration par les deux peuples extraterrestres. Évidemment, ceux-ci se lanceront à leur poursuite pour éliminer l’enfant, symbole d’une paix possible. et rapatrier les parents fautifs.

L’éducation de cette enfant permettra même une réflexion approfondie sur la parentalité, l’accommodement à la culture de l’autre et l’acceptation de la différence.

Le récit est d’autant plus touchant qu’il est raconté par Hazel elle-même, le premier numéro débutant par sa mise au monde. Le suspens ne provient donc pas de savoir si elle survivra, mais plutôt de savoir comment elle pourra faire sa place au sein de cet univers ou tous, presque sans exceptions, lui veulent du mal. L’éducation de cette enfant permettra même une réflexion approfondie sur la parentalité, l’accommodement à la culture de l’autre et l’acceptation de la différence.

Les personnages principaux de Saga, le couple interdit de Marko et Alana. Crédits : Image Comics

Une œuvre pourtant pas en manque d’action

Mais Space Opéra oblige, Saga n’est pas en manque de péripéties et de scènes d’action. En effet, l’œuvre suivra la fuite effrénée des trois protagonistes à travers la galaxie. Car de nombreuses factions cherchent à cacher les preuves de cette union interdite. Notamment, le Prince Robot IV, issue d’une aristocratie d’homme à tête de télévision. Ce personnage, bien plus nuancé et attachant qu’il ne peut l’apparaître au départ, sera d’ailleurs l’occasion de parler des horreurs de la guerre et des cas de PTSD (stress post-traumatique souvent associé aux vétérans de guerre).

Qui a dit que la bande-dessinée n’était qu’un médium destiné aux enfants!

Hazel, la véritable protagoniste et narratrice de Saga. Crédit : Image Comics.

Cette épopée cosmique sera d’ailleurs l’occasion de découvrir une multitude de peuple aux mœurs, aux coutumes et aux valeurs variées. Car outre son aspect intimiste et familial, ce qui est le mieux réussit dans Saga, c’est cette peinture d’un univers complexe et cohérent. Tout de même, il faut dire que l’auteur a eu plus de 50 numéros pour élaborer son univers. Et celui-ci est loin d’être issu d’un livre pour enfants édulcoré. En effet, l’on peut y rencontrer des chasseurs de primes violents et avares, des esclavagistes sexuels, et des simili-fascistes en quête d’une pureté raciale fantasmée. Qui a dit que la bande-dessinée n’était qu’un médium destiné aux enfants!

Une illustratrice de grand talent

La dessinatrice est également la même depuis le tout début de la série. Il s’agit de Fiona Staples, une dessinatrice canadienne, entre autre récipiendaire des prestigieux prix Eisner et Hugo. Son dessin se distingue par des aplats de couleurs vives, réalisés entièrement sur ordinateur. Ce style permet de donner à Saga un aspect fantastique et réjouissant, malgré les propos souvent lourds et matures de l’œuvre. Staple livre en effet un style graphique bien éloigné des standards de la bande-dessinée américaine, et l’on peut reconnaître au premier coup d’œil son trait distinctif.

Le style de Staples et comme un déversement d’anarchie dans un dessin d’enfant

La couverture du prochain numéro de Saga à paraître. Crédits : Image Comics.

Les dessins de Staples se prêtent d’ailleurs bien aux explosions interstellaires et autres combats galactiques. Car dans ce domaine, le réalisme n’est plus de mise, mais plutôt les explosions de couleurs criardes et fantasmagoriques. Le style de Staples et comme un déversement d’anarchie dans un dessin d’enfant. De quoi ravir autant les afficionados de l’art séquentiel que les intéressés plus novices.

Pour finir, rappelons qu’après une pause de plus de deux ans, Saga reprendra ce mois-ci. En effet, le numéro 55 de la série est prévu pour le 26 janvier prochain. De quoi ravir tous les fans qui n’attendaient que le retour de ce chef-d’œuvre qui nous a fait bien trop longtemps languir!

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