Depuis la réforme de 2001, les cours de formation professionnelle et sociale ne sont plus présents dans les écoles. L’éducation à la sexualité est pratiquement inexistante et les sujets abordés ne sont parfois traités qu’en surface. Évidemment, il revient aux parents d’accomplir cette tâche, mais il est d’autant plus de la responsabilité des professeurs, ainsi qu’à l’ensemble des employé.e.s dans les établissements scolaires, y compris le concierge et la madame de la cafétéria, d’éduquer les jeunes à la sexualité!
Jouer à touche «pipi»
Les enfants ont naturellement tendance à vouloir connaître, apprendre et découvrir. Par indiscrétion, ils et elles démontrent un intérêt avide à la sexualité, non pas à la génitalité. Les enfants vivent une sexualité qualifiée de «prégénitale», grandement différente de la sexualité génitale, puisqu’elle ne vise pas la pénétration ou le coït. Elle est davantage vécue par des jeux d’exploration faits seul.e ou à plusieurs, par des questionnements, par l’examen du corps et par la fameuse masturbation.
Les premières interventions réalisées auprès des enfants sont pour la plupart répréhensibles et rendent l’acte, pourtant si naturel, malsain et vicieux. Les enfants comprennent que l’accessibilité à leur corps ne leur est pas permise, et les adultes renforcent leur déni de la sexualité infantile, toutefois très apparente! L’intervention elle-même fait partie de l’éducation sexuelle de l’enfant.
Dans les faits, les parents sont souvent la première source d’information sur la sexualité. La façon dont celle-ci sera abordée dans la famille influencera les premières expériences de l’enfant dans la manière d’explorer sa propre sexualité, mais aussi celle dans la rencontre avec l’autre.
Les parents sont souvent la première source d’information sur la sexualité.
Les curieux.ses adolescent.e.s
Le développement sexuel est présent dans les étapes du développement humain. Qui plus est, la question de la sexualité est au cœur de l’adolescence. Durant cette période, la sexualité devient accessible à la génitalité. Les ados présentent le désir d’explorer et de connaître les préceptes de la sexualité. La curiosité se fait ressentir! D’où l’importance de leur offrir une éducation sexuelle adéquate.
Vers qui les adolescent.e.s se tournent pour obtenir des réponses à leurs questions? Quelques-un.e.s pourront en discuter ouvertement avec des membres de leur famille. Pour les autres, l’embarras et la pudeur mutuelle ne laissent que très peu de place à l’aisance dans la discussion.
Certes, les jeunes gens peuvent se diriger vers un.e professeur.e, un.e surveillant.e ou toute autre personne de confiance; cependant, la gêne de revoir, par exemple, l’enseignant.e dans son cours, peut d’ailleurs être gênant pour certain.e.s.
Il est donc préoccupant de savoir que ce ne sont pas toutes les écoles qui sont munies d’un.e professionnel.le qualifié.e pour permettre l’éducation sexuelle. Mais encore, le docteur Réjean Thomas, particulièrement connu pour son implication sociale dans la province, mentionne connaître des changements dans les comportements sexuels des jeunes. Il remarque que l’usage du condom n’est pas assez valorisé, et ajoute que les adolescent.e.s banalisent le fait d’avoir des relations sexuelles non protégées: «Le condom c’est pas cool!». Un discours inquiétant, notamment lorsque le Ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) dénombre dans ses rapports une augmentation des infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS) durant la période 2010 à 2015, qui se traduit par une hausse de diagnostics de gonorrhée (90%), de chlamydia (41%) et de syphilis (34%).
Un modèle qui ne fonctionne pas
Cela fait maintenant 17 ans que le modèle d’éducation à la sexualité est le même dans les écoles, et il n’a toujours pas fait ses preuves! Dans ce modèle, tout le monde est concerné par l’éducation à la sexualité, les parents, les professeur.e.s et la communauté. Est-ce une responsabilité partagée ou une déresponsabilisation commune? Étant donné que nombreux.ses ne considèrent pas qu’ils ou elles ont ce rôle.
Est-ce une responsabilité partagée ou une déresponsabilisation commune?
Les interventions ponctuelles réalisées au sujet de la jupe trop courte ou les french kiss trop longs ne sont pas suffisantes pour éduquer les jeunes d’aujourd’hui. Généralement, l’adolescent.e va minimiser, s’il ou elle ne nie pas, ce que l’adulte a vu ou lui a demandé.
Le programme préoccupant
Les professeur.e.s sont sollicité.e.s pour enseigner le programme d’éducation sexuelle qui devra s’appliquer à compter de septembre 2018. Puisque ce programme n’est pas un cours, Josée Scalabrini, présidente de la fédération des syndicats de l’enseignement, mentionne être inquiète de la façon dont les informations seront transmises aux élèves. Les professeur.e.s partagent ses inquiétudes.
De plus, le programme n’inclut pas les sujets traitant de l’avortement et de la réalité des transgenres. Or, ce sont des sujets sensibles qui doivent être démystifiés. Les adolescent.e.s posent des questions, surtout sur les sujets qui traitent de l’identité sexuelle. Ils et elles sont curieux.ses et veulent des réponses. La sexologue Geneviève Labelle exprime que s’il n’y a personne pour leur donner des réponses, ils et elles en trouveront ailleurs et pourraient obtenir des informations erronées.
L’éducation à la sexualité permet de contribuer favorablement au développement des enfants et des adolescent.e.s.
Cela étant dit, l’éducation à la sexualité n’est pas que transmettre des informations concernant les agressions sexuelles et le consentement, les relations non protégées, les infections transmissibles, etc. Francine Duquette définit l’éducation à la sexualité comme une façon d’inviter les jeunes à mieux se comprendre, et aussi à mieux comprendre leurs relations avec les autres, et ce, en tenant compte des réalités d’aujourd’hui. Pour résumer, l’éducation à la sexualité permet de contribuer favorablement au développement des enfants et des adolescent.e.s.
BIBLIOGRAPHIE
Laplanche J. (entretien avec). Dossier sexualité. Enfances-psy, 2001
Becker, E. (2008). Quand la sexualité des adolescents devient «préoccupante»…. L’information psychiatrique, volume 84,(7), 675-683. doi:10.3917/inpsy.8407.0675.