Toujours dans la recherche d’un peu de légèreté, pour faire changement, je continue cette semaine de vous partager ce qui me fait du bien. Pour me rappeler ces petites choses qu’il ne faut pas sous-estimer et vous faire découvrir, peut-être, des bonheurs insoupçonnés à votre tour. Il nous faut ces niaiseries-là parfois pour mieux respirer dans un monde qui, lorsqu’on le laisse faire, peut nous accabler et nous désabuser assez vite. Nous couper le souffle, dans le mauvais sens. Et c’est souvent, étonnamment, les aspects les plus simples et les plus basiques de la vie qui nous redonnent de l’oxygène. Manger, boire, contempler, créer, donner la vie, faire l’amour. Parfois je me demande si on ne vit pas juste pour ça, au fond? Et j’ai des grands instants de lucididididididi. Et j’ai des grands instants de lucididité.
5. Jean Leloup et sa folie. Il est complètement sauté et oui, il fait son tour en psychiatrie plus souvent que la normale. Il est imprédictible, insondable, impétueux. Mais il est la preuve que le génie aime coucher avec la folie, et qu’ils font de très beaux enfants. La profondeur peut être cachée dans la simplicité la plus évidente. Tout ce que Leloup peut partager en deux phrases débiles; la tristesse, la peur, la mort, la fuite ou l’amour. En parlant de poissons-chats, d’Indiens et de fourmis, d’une pieuvre dans un bac chinois. Du non-sens qui veut tout dire… Personne n’écrit aussi librement que lui, avec un sarcasme aussi joyeux. Vous avez souvent dansé en chantant combien le monde est à pleurer et que la vie est laide, vous? On entre peu à peu dans son univers, et on ne veut plus en sortir. Touche pas à ma guitare. J’suis un cowboy. J’me lève tard.
6. Les nuits de tempête. Il y en avait une, le soir du 1er février. Une petite tempête de neige qui débute un peu après l’heure du souper. On sort marcher et bien que ce soit le chaos sur les routes et en ville, à pied c’est le calme plat. Il ne fait pas trop froid, il neige vite des flocons comme des confettis. Comme si on tamisait du sucre glace sur nos têtes. La neige ne fait pas mal, elle est tiède quand elle fond sur les joues. Le ciel est rose-orangé, comme s’il avait mis un voile. Il fait clair sans qu’on puisse se l’expliquer, même à 1h du matin. Tout est à off, le temps s’arrête. On a l’impression qu’on possède la rue toute entière pendant que tout le monde dort. On a juste envie d’aller glisser ou de se coucher sur le dos, pour regarder le ciel opaque et cette lumière diffuse. C’est comme si on se faisait offrir une journée de calme en pleine nuit d’hiver.
7. Le café. Un expresso plein d’huile de café, avec une mousse de crema bien épaisse et dorée qui colle à la lèvre supérieure. Un expresso simple avec de la crème fouettée dessus, qui fond en mêlant son sucre à l’amertume. Un allongé avec du lait chaud, un cappuccino avec un peu de sucre brun qui colle à sa mousse soyeuse pour fondre comme un météorite brulant sur la surface de la lune. J’exagère? Absolument pas.
8. Les lettres. Le cadeau du temps et de l’écriture au plomb de quelqu’un qu’on aime. Les timbres qu’on colle et les enveloppes cachetées (à la cire pour les romantiques). C’est devenu une faveur pleine de chaleur et empreinte de respect, une lettre. Une intention noble, en comparaison avec la froideur et l’automatisme du courriel et du texto. Face à cette identité virtuelle que l’on travaille à bâtir sans qu’elle ne nous ressemble. Il me semble que l’on se doit d’être un peu plus honnête en écrivant une lettre. Un peu plus soi-même. On doit s’appliquer et écrire droit, connaitre l’adresse de son destinataire. Connaitre son nom complet, son vrai. Choisir comment on a envie de signer. Si l’on ajoute quelques x à la fin, ou seulement un. Avec un peu d’aisance, on peut oser un post-scriptum avec une pointe d’humour. C’est peut-être la nostalgie d’un temps trop peu connu, mais il me semble qu’une lettre écrite intègrement de sa main vaut plus que tous les cadeaux ou les billets de 50 au creux d’une carte pré-usinée.
Il nous faut ces niaiseries-là parfois pour mieux respirer dans un monde qui, lorsqu’on le laisse faire, peut nous accabler et nous désabuser assez vite. Nous couper le souffle, dans le mauvais sens. Et c’est souvent, étonnamment, les aspects les plus simples et les plus basiques de la vie qui nous redonne de l’oxygène.
Je pourrais étendre cette liste indéfiniment. Tellement de petites choses peuvent rendre la vie plus douce, c’est évident. Il suffit de leur prêter attention, de voir ce qui est beau dans les choses simples. Cynisme est trop souvent synonyme de pessimisme, mais il en est bien autrement. Vous savez, on peut devenir cynique à force d’un trop grand idéalisme. À force de voir la beauté dans une tasse de café, la laideur s’en retrouve exacerbée, intenable. On voit trop clairement que la vie est laide, et trop bien que le monde est à pleurer. Mais il vaut mieux en rire. Mais il vaut mieux l’écrire.