Alors que l’achat local semble sur les lèvres de tous et toutes, que le Panier bleu fait fureur et que les frontières sont fermées comme jamais, qu’en est-il de la mondialisation? Phénomène répandu depuis la deuxième Guerre mondiale, la mondialisation est-elle morte et enterrée?
La mondialisation n’est pas un phénomène d’hier. Prenant principalement base à l’issue de la 2e Guerre mondiale, le commerce international s’intensifie. En 1947, on signe le General Agreement on Tariffs and Trade (GATT), un traité jugé fondateur du commerce international. Le graphique ci-gauche illustre bien la tendance du libre-échange: le commerce international évolue bien plus rapidement que la production totale: les produits voyagent plus qu’il ne s’en créent. Et il y a des raisons à cela…
Des bienfaits de la mondialisation
La mondialisation est un phénomène jugé positif depuis un bon moment. Dès Adam Smith, père de l’économie, on constatait les bienfaits d’une mondialisation. En se spécialisant, on devient bon et plus efficace. On réalise l’impossible. Il existe une série indescriptible d’exemples, mais pensons simplement à une automobile: les pièces d’une voiture voyagent plusieurs fois les frontières, du minerai à la voiture finale.
L’importation et l’exportation de biens est importante au Canada. En 2015, on importait l’équivalent de 34% de notre production annuelle, tandis qu’on exportait 32% de celle-ci. Le Canada est dépendant de ces activités internationales et c’est normal. Ce serait reculer que de sombrer dans le protectionnisme économique. Il faut acheter local, mais cela ne constitue pas bannir l’international pour autant. Il faut simplement donner une place aux produits québécois dans les étalages, leur donner une visibilité et permettre le choix aux consommateurs et consommatrices par la suite.
La machine qui transforme le blé en voiture
La mondialisation, c’est augmenter nos possibilités de consommation! Café, orange ou sucre de canne, tant de produits qui ne seraient pas disponibles sans la mondialisation… Souhaitons-nous réellement retourner au cannage des légumes pour l’hiver et se circonscrire à certains légumes et fruits? Je ne crois pas. La mondialisation, c’est des possibilités et un plus grand bien-être!
À titre d’exemple, Steven E. Landsburg expliquait l’existence de deux façons de produire des automobiles. Outre la production nationale, il expliquait l’autre méthode comme suit :
«Vous récoltez le blé, le chargez sur les navires, et dirigez les navires vers l’est dans l’océan Pacifique. Après quelques mois, les navires réapparaissent chargés de Toyotas. (…) Nous pourrions tout aussi bien supposer que le Japon est une machine géante avec des rouages mystérieux qui transforment le blé en voitures.»
– Steven E. Landsburg
Alors on fait quoi?
Au Québec, la conception de systèmes électroniques et les industries à fort potentiel de valeur ajoutée sont nos forces. On a un salaire minimum élevé, ainsi produire des crayons de plomb au Québec, c’est peut-être pas notre force, les Chinois les font pour beaucoup moins cher. Toutefois, quand un produit repose sur une forte compétence technique, on est plus que concurrentiels. Pourquoi ne pas se concentrer sur ces créneaux?
Oui, on se trouve au dépourvu quand on a besoin de biens comme les blouses, les masques, mais est-ce pour autant que l’on doit en produire de manière auto-suffisante dans le futur? Je ne crois pas. Pourquoi ne pas plutôt concevoir de forts traités de libre-échange avec des clauses pour le matériel médical? Ainsi, on serait prêt-e-s pour ce genre de situation, tout en se concentrant dans nos domaines de prédilection. Et rien n’empêche de se « recycler » en temps de crise comme certaines entreprises viennent de le faire. Mais par pitié, n’abandonnons pas nos créneaux d’expertise pour devenir « autosuffisants ». Est-ce que je fais mon jardin chez moi, élève mon propre bœuf, produit mon propre lait, de peur d’en manquer? Non, on s’est muni-e-s de chaines d’approvisionnement fiables. Munissons-nous d’outils pour s’approvisionner de manière fiable: des traités internationaux.
Certes, les mesures de prévention sanitaire aux frontières seront accrues. Mais il faut faire la différence entre achat local et consommation protectionniste. On peut acheter des biens venant de l’international et on doit continuer de le faire dans une certaine mesure. Simplement, il faut être conscient-e-s de toutes les possibilités qui s’offrent à nous et cela passe entre autres par un meilleur affichage de nos produits locaux. Mais la mondialisation, c’est bien aussi!
Source:
Perspective Monde, importations et exportations canadiennes (lire ici)