L’économie du pays : L’hiver vient ! la crise de l’énergie dans l’Union Européenne (UE).

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Crédit: Sarah Gatner

Dans la saga du jeu de trône (ou Game of Thrones) de Georges R. Martins, le pays de Westeros a des structures saisonnières très étranges. L’été et l’hiver peuvent durer de longues périodes sans que personne ne sache quand ils vont basculer. L’annonce de l’hiver dans cette saga exprime le sentiment que des périodes sombres se profilent à l’horizon. Même si les choses vont bien pour certains acteurs (été), elles ne vont pas durer éternellement. Car bientôt, l’hiver avec sa vague de froid et de ténèbres va tout faire basculer.

Cette interprétation métaphorique reflète un peu la situation actuelle de l’UE sur le plan énergétique. Après un long été en approvisionnement, les réserves en énergie de certains pays diminuent depuis quelques mois. Cette diminution entraîne déjà des conséquences économiques désastreuses tels que l’augmentation des coûts de l’électricité et du gaz. Dès lors, l’hiver qui s’en vient s’annonce particulièrement froid comme celui du pays de Westeros.

Rappel du rôle de l’énergie dans l’économie

Dans une précédente chronique, nous avons montré comment l’énergie était vitale pour l’économie. Vitale à tel point que pour certains économistes, l’économie n’est que de l’énergie transformée. De ce fait, l’énergie occupe une place de choix dans les intérêts des pays. Parce que rien ne se fait et rien ne se vend qui ne consomme de l’énergie. Que ce soit pour produire les engrais, pour cultiver les patates ou pour fabriquer les voitures, il faut de l’énergie. Cette énergie peut se présenter sous plusieurs formes qui ont évolué au fil du temps.

Une centrale nucléaire en France. Crédit: pixabay

jusqu’à la fin du 18e siècle, le bois était le seul combustible à faire tourner les machines. Il aurait pu continuer son histoire énergétique si son utilisation massive n’entraînait pas une explosion des coûts. Aussi, c’est dans le sous-sol de la terre que l’on est allé chercher ses alternatives, notamment les énergies fossiles. Par rapport au bois, les ressources fossiles sont de fabuleuses concentrations d’énergie. Par exemple, un puit de pétrole qui en surface occupe à peine un demi hectare, peut fournir durant 20 ans l’équivalent énergétique de 10 000 hectares de forêt. Il n’est donc pas surprenant que de nos jours, les énergies fossiles représentent 84,3% de la consommation énergétique mondiale.

Les causes de la crise de l’énergie dans l’UE

La répartition des ressources fossiles sur l’ensemble de la planète est très hétérogène. Le Moyen-Orient recèle à lui seul près de la moitié des réserves mondiale de pétrole et 43% des réserves de gaz naturel. La Russie, 29% des réserves gazières et de charbon ainsi que 8% des réserves pétrolières. L’Europe ne possède que 6% des réserves mondiales du charbon, 2% du gaz et 1% du pétrole.

Pour alimenter sa croissance, l’UE est contrainte d’acheter de l’énergie à l’étranger. Des statistiques de 2020 montrent que certains pays dépendent presque exclusivement de sources d’approvisionnements extérieures. C’est le cas de Malte (97,2 %), du Luxembourg (95,1 %), et de Chypre (92,8 %). Entre 2008 et 2019, le Danemark, les Pays-Bas, la Lituanie et la Pologne sont devenus de plus en plus dépendants des importations d’énergie. On constate également une dépendance croissante en République tchèque, en Allemagne et en Belgique.

Europe, dépendance au gaz russe. Crédit: Eurostat.

Au cours des 60 dernières années, la Russie a été le principal fournisseur en énergie de l’Europe. Celle-ci lui offrait des tarifs préférentiels. Mieux, l’Europe achetait l’énergie à crédit auprès de la Russie. En 2020, les volumes d’importation de l’Europe à partir de la Russie se présentaient comme suit: 40,4 % du gaz, 29,8 % du pétrole et 42,4 % des combustibles solides. Or, il se trouve qu’à la suite de la guerre en Ukraine, l’UE a décidé d’appliquer plusieurs sanctions économiques à la Russie. L’une des principales sanctions consiste à cesser d’acheter 90 % des approvisionnements en énergie de l’UE à la Russie d’ici à la fin de 2022, en vue de priver la Russie de revenus importants. L’UE s’est donc coupé d’une source d’approvisionnement importante et les conséquences ne se sont pas fait attendre.

Les premières conséquences de la crise de l’énergie dans UE

De nombreux observateurs sont unanimes que les sanctions économiques contre la Russie ne fonctionnent pas. Au contraire, elles sont un boomerang et les habitants de l’UE doivent en subir des conséquences. Les factures de gaz et d’électricité explosent. Dans certains pays, les prix sont multipliés par 4 par rapport à leur niveau d’il y a à peine 1 an. Actuellement, les populations se préparent physiquement et mentalement à un hiver froid. Ce qui sera très compliqué pour les foyers modestes et les personnes vulnérables.

Crédit: FMI

Grande difficulté pour l’Allemagne

Pire, l’arrêt des gazoducs Nord Stream 1 et Nord Stream 2 reliant la Russie à l’Allemagne sous la mer baltique va causer de sérieux problèmes à l’industrie allemande. En effet, l’Allemagne, première économie de l’UE, importe 65% de son gaz de la Russie et celui-ci transite essentiellement par ces gazoducs qui viennent d’être sabotés. L’arrêt des gazoducs va tout simplement provoquer un ralentissement de la production industrielle en Allemagne. Et par effet boule de neige, tous les partenaires de l’Allemagne vont subir ce ralentissement.

Par ailleurs, ces derniers mois, on observe un changement de direction de la dépendance énergétique de l’UE. Elle se tourne désormais vers les pays de l’Ouest, membres de l’Otan. Dans cette perspective, les États-Unis se sont engagés à livrer 15 milliards de mètres cubes de gaz en 2022. Une quantité qui vient s’ajouter aux 25 milliards de mètres cubes déjà prévus. Pourtant, le gaz américain est du gaz de schiste produit par la fracturation hydraulique. Une méthode interdite dans plusieurs pays européens pour des raisons écologiques.

On a comme impression que pour sortir de cette crise de l’énergie, l’UE va devoir sacrifier ses objectifs écologiques. Ce qui sera un autre désastre. Soit le début d’un hiver comme celui du pays de Westeros.

Références

Martin, G. R. (2011). A game of thrones (Vol. 1). Bantam.

https://www.economist.com/leaders/2022/09/08/how-to-deal-with-europes-energy-crisis

https://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/products-datasets/product?code=nrg_ti_oil

https://www.cre.fr/Actualites/hausse-des-prix-pour-l-hiver-prochain-la-cre-interroge-les-acteurs-de-marche-sur-leurs-strategies-et-leurs-anticipations

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