Les Combustibles par le TNC : La littérature brûle aussi vite que la morale

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Le Théâtre des Nouveaux Compagnons présente Les Combustibles d’Amélie Nothomb

La nouvelle mouture du Théâtre des Nouveaux Compagnons est un franc succès. En effet, la première de la pièce Les Combustibles d’Amélie Nothomb fut présentée devant une salle comble et enthousiaste jeudi dernier. Cette pièce prend pour prétexte la guerre, le froid et le manque de ressources pour confronter ses protagonistes à leurs propres immondices. Ils devront alors décider quels livres ils doivent brûler pour rester au chaud. La question n’est plus de savoir combien de temps ils pourront rester en vie, mais combien de temps réussiront-ils à rester humains?

Un jeu juste et prenant

Les Combustibles est une pièce en huis clos comportant trois personnages : Le professeur de littérature, Daniel, son assistant et Marina, l’amoureuse de ce dernier. Si la guerre et l’ennemi « barbare » ravage le dehors, c’est surtout au sein même de l’appartement du professeur que les trois personnages seront confrontés à l’horreur.

La constatation est aussi vieille que La guerre du Péloponnèse de Thucydide : en temps de guerre et de crise, la morale ordinaire ne tient plus. Alors, un professeur cynique devient répugnant, une étudiante désespéré devient calculatrice et un amant romantique, brutal.

La force de cette représentation est que les acteurs jouent juste dans chacun des registres du texte de Nothomb. Car si Les Combustibles nous confronte aux noirceurs de l’âme humaine poussée dans ses derniers retranchements, elle fait également rire à foison. Drôles, touchants, tantôt dans la retenue, tantôt dans l’emportement : ce sont trois comédiens de talents qui font vivre la pièce de l’écrivaine belge.

La distribution de la pièce. De gauche àn droite : Éric Ahern dans le rôle du professeur ; Camille Beauchemin dans le rôle de Marina et Samuel Fortin dans le rôle de Daniel. Crédits : TNC

Une métaphore de nos civilités

Le spectateur cultivé qui voit cette pièce pour la première fois pourra se demander pourquoi il ne reconnait pas les auteurs dont parle abondamment les personnages lettrés et avides de bouquins. C’est que toutes les références littéraires ont été inventées par l’autrice. Le fond de la pièce n’est donc pas de savoir s’il vaut mieux brûler Platon que Flaubert, mais bien s’il peut être légitime de brûler des livres, tout simplement. Quand Nothomb parle de livres, elle parle de la littérature dans son entièreté. L’on peut alors se demander qui sont les véritables « barbares », car à mesure que les pages disparaissent dans les flammes, le savoir-vivre part en fumée au même rythme.

Jusqu’où la guerre peut-elle nous mener? Mettre au feu ce que nous avions chéri jusque là et commettre l’impensable en temps de paix? Trahir, mentir, revirer complètement nos conceptions du bien et du mal? La force de la pièce est de poser ces questions à la salle sans pour autant y amener de réponses claires. On sort divertit de cette représentation, mais tout de même sous un certain choc, un choc littéraire et artistique qui, je peux vous l’assurer, nous habite de longues heures durant.

Distribution

Le professeur : Éric Ahern

Marina : Camille Beauchemin

Daniel : Samuel Fortin

Mise en scène de Gabriel Godbout, assisté de Cynthia Paris

Les Combustibles est présentée jusqu’au 21 janvier 2024 par le Théâtre des Nouveaux Compagnons, à la salle Louis-Philippe-Poisson.

Ne manquez pas, en avril prochain, à la salle Anaïs-Allard-Rousseau la pièce Intérieurs par le TNC.

Crédits : TNC
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