Nous faisons partie des gens qui sont privilégiés d’habiter dans cette partie du monde. En effet, avec l’éclosion du COVID-19 ne faisant aucune distinction de sexe, d’âge ou de classe sociale, nous pouvons nous rassurer dans le confort de nos logements. Cependant, la situation n’est pas vécue avec équité au niveau mondial.
Que ce soit par le manque de structures ou par manque de jugement (notamment chez nos voisins), la crise est différente selon l’endroit sur le globe. En plus de la peur concernant la maladie et la perte d’un proche, s’ajoute la peur de l’effondrement de notre système économique et politique.
Si cela ne fait même pas 1 mois que la situation a été déclarée pandémique par les autorités, on observe déjà la restriction des libertés. Cette dernière n’est cependant pas définie de la même façon partout. On oppose souvent, en sciences politiques et en éthique, les libertés positives aux libertés négatives. Principalement utilisées comme clivages à l’époque de la Guerre froide, les libertés positives sont celles associées à l’égalité des ressources (accès à l’hébergement, à la nourriture, etc.). Elles ont été revendiquées par les régimes socialistes d’avant 1989, considérant que les droits de vote et la liberté de presse ne servaient à rien si on avait des gens dans les rues qui crevaient de faim.
Russie et Turkménistan
La situation actuelle met à mal nos libertés d’accès, mais aussi nos libertés individuelles. Le tout a commencé progressivement, dans des pays de l’ancien Bloc de l’est. Notamment en Russie et au Turkménistan. La Russie a pu tester son nouveau système de caméras de surveillance ; plus de 170 000 caméras épient tous les recoins de Moscou. Cette mise en place d’un système de surveillance est utilisée dans le cadre de la lutte contre le Coronavirus, afin de retrouver les contrevenant.e.s au confinement, notamment grâce à la reconnaissance faciale. Ce système de contrôle mis en place par le gouvernement russe est mis sous le prétexte de punir les récalcitrant.e.s au confinement. Cependant, dans ce pays où la répression est forte et le gouvernement est autoritaire, on imagine facilement les bienfaits d’avoir chaque citoyen.ne fiché.e pour garder le tout en place.
Au Turkménistan, où le président a été élu démocratiquement à 97% (on s’entend que…), la situation est encore plus absurde. On assiste à une véritable tentative de cacher à tous et toutes l’existence même de la pandémie. Là-bas, plus aucune mention du Coronavirus n’est légale, que ce soit dans le cadre d’un bulletin télévisé ou dans les brochures médicales. Même le port du masque est illégal. On pense donc que le fait de ne pas en parler règlera tous les problèmes.
Le quatrième pouvoir
Certes, les pays occidentaux sont bien loin de se buter aux mêmes problèmes. Cependant, ici, les médias gouvernent le discours public. Considérés par certains politicologues comme «Le quatrième pouvoir» (pour accompagner le pouvoir judiciaire, exécutif et législatif), les médias ont tendance à influencer l’opinion publique. Ils ne nous disent pas quoi penser, mais comment bien penser à propos de quel sujet.
La pandémie de la COVID-19 occupe la majorité de la représentation médiatique des dernières semaines. Bien que la situation s’y prête, on commence déjà à voir que les gens ne parlent pas vraiment d’autre chose… Ça fait longtemps que je n’ai pas entendu parler de Wet’suwet’en. Pendant que la lumière des projecteurs est braquée sur les développements mondiaux concernant le développement de la maladie, c’est le temps de nous passer sous le nez les forages pétroliers ou les magouilles politiques des coulisses.
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La mise en place des Lois sur la santé publique crée aussi tout un climat de peur et de paranoïa au sein de la population. Des mesures coercitives ont été mises en place, et il faut être extrêmement prudent.e.s dans ce temps-là, puisque l’histoire nous prouve que ce genre de situation peut déraper très rapidement.
Il y a quelques semaines, le gouvernement avait comme idée de pouvoir géolocaliser les personnes atteintes du Coronavirus, afin d’être certain que ces derniers respectent les consignes. Par la suite, des pouvoirs exécutifs supplémentaires ont été octroyés aux corps policiers, pour leur permettre de donner des contraventions et d’entrer dans les résidences sans mandat. Déjà sur l’île de Montréal, les services de Police en ont profité pour rentrer dans le Fattal, une célèbre résidence marginale dans Saint-Henri. Les policier.ère.s, bien entendu, ne portaient pas de masques, et sont entré.e.s dans l’ensemble des résidences.
Profilage et paranoïa
Ce nouveau pouvoir va bien sûr causer des problèmes de profilage. On observe déjà que dans plusieurs villes canadiennes, les policier.ère.s donnent des contraventions salées aux sans-abris, car ils et elles ne respecteraient pas les mesures de distanciation sociale. Le danger est palpable pour les groupes marginalisés.
Finalement, les corps policiers incitent à dénoncer les rassemblements intérieurs et extérieurs. Les contraventions et les dénonciations pleuvent, et la paranoïa monte. Le nombre de dénonciations est tellement haut que les autorités ont spécifié de ne rapporter que les cas les plus graves…
La situation anxiogène doit être réglée sans tourner les citoyen.ne.s les un.e.s envers les autres. Restons critiques et vigilant.e.s. Nos sociétés libérales en dépendent.
En attendant le couvre-feu, je reste chez moi.