La dernière née du Théâtre des Gens de la Place fait rire autant qu’elle choque de par un texte saisissant
Jeudi le 14 septembre, à la salle Anaïs-Allard-Rousseau de Trois-Rivières, avait lieu la première de la nouvelle production du Théâtre des Gens de la Place : Nino. Le jeune enfant, à l’occasion de son premier anniversaire, ne cesse de pleurer. Les convives, parents, ami(e)s et famille boivent du vin pour tenter de s’apaiser eux-mêmes des cris infantiles. Malgré les conseils et les réprimandes, rien n’y fait : le bébé hurle. Mais ce n’est pas ses cordes vocales qui vont bientôt se déchirer, mais bien les liens unissant le petit noyau étant venu exprès pour célébrer la fête de Nino.

Une dramaturgie rythmée et maîtrisée
Ce qui marque le plus tout au long de la représentation, c’est la qualité du texte sur lequel se sont reposés les comédiens. En effet, Rébecca Déraspe fournit à la troupe un matériau de base à la fois rythmé et incisif. La prémisse est assez banale : un huis clos qui fera ressortir les animosités et les secrets de famille. Tantôt drôle, surprenant, poignant et même vulgaire, le texte de Déraspe marque tous les points et fournit à la distribution toutes les occasions de briller.
Cette distribution est composée de Jolaine Baril (que la communauté uqutérienne connait bien pour ses talents d’improvisatrice), Emmie Massicotte, Laurie Pleau, Simon Potvin et Maxime Tanguy. Toutes et tous justes et brillant, incarnant parfaitement les archétypes qu’ils doivent endossés pour cette soirée : la tante qui se veut meilleur mère que la mère, la mère, justement, épuisée, le vieil amant faussement sage, et j’en passe. Encore une fois, par la finesse de l’écriture, chaque comédien campe aisément son rôle dans cette soirée qui tourne à la misère.

Décors et mise en scène
Les décors plaisent d’emblée au public : l’on pouvait avant même le début de la représentation entendre l’appréciation du public à ce sujet. On se serait véritablement cru dans un modeste appartement québécois, appartement où de jeunes parents peinant à rejoindre les deux bouts élevant un enfant en bas âge. Félicitons Carol Bouliane, Lausanne Dubois, Luc Pedneault pour la confection des décors.
La mise en scène, assurée par Benoit Pedneault (assistance à la mise en scène Marie-Andrée Leduc), est quand à elle plus convenue. Malgré l’espace restreint, les acteurs se déplacent et donnent une impression de vraisemblable à travers la seule pièce visible de cet appartement. On peut se questionner cependant sur le bien fondé de laisser un bébé pleurer pendant la quasi entièreté du spectacle. Là est la prémisse, j’en conviens, mais les cris sont quelques peu sonores. Surtout pour le public qui est au plus près des enceintes de son, et éloigné de la voix des comédiens.

Nino vaut la peine d’être vu, cela est certain. C’est surtout la dramaturgie brillante de Déraspe qui nous reste en tête après la représentation. Mais la présence des comédiens (et surtout des comédiennes) n’est pas en reste. Cette première pièce de la saison lance très bien la programmation 2023-2024. Elle donne envie aux habitués comme aux néophytes de se rendre au théâtre. Chapeau bas!
