Petite bulle d’histoire : Henri VIII, l’ogre aux six épouses. Partie 3

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Portrait par Camille Limoge
Crédit: Camille Limoge

À la fin des années 1530, Henri VIII, veuf depuis trois ans, souhaite se remarier. Il est du devoir du roi de produire des héritiers légitimes et cette tâche nécessite une jeune épouse en santé et de bonne famille. Thomas Cromwell, devenu comte d’Essex, suggère une alliance entre l’Angleterre et le duc de Clèves. Ce dernier, converti au luthéranisme durant la réforme, est un allié de choix contre les catholiques. Pour sceller cette alliance, il propose le mariage d’Henri et d’une des sœurs du duc.

Une quatrième alliance

Au printemps 1539, les négociations s’intensifient entre la cour anglaise et le duché de Clèves. Le peintre de la cour, Hans Holbein le jeune, est chargé de faire le portrait des jeunes femmes de Clèves, pour que le roi sélectionne sa favorite. Ayant considéré les portraits d’Anne de Clèves, et de sa sœur cadette Amelia, Henri choisit d’épouser Anne.

Anne de Clèves en 1539 par Hans Holbein le jeune. Crédit Wikimédia.
Anne de Clèves en 1539 par Hans Holbein le jeune. Crédits: Wikimédia.

Le 1er janvier 1540, Anne de Clèves traverse la Manche et arrive en Angleterre. Elle n’est plus qu’à quelques kilomètres de Hampton Court et de son futur époux, qu’elle n’a jamais rencontré.

Une rencontre désastreuse

Malheureusement, l’impatient Henri, dans son esprit caricaturalement romantique, décide de surprendre Anne avec l’un de ses tours préférés. Dans la tradition de l’amour courtois contemporaine, il est dit que si deux individus doivent être ensemble, s’ils sont réellement des âmes-sœurs, ils se reconnaitront toujours et ce qu’importe les circonstances de leur rencontre. Henri décide de tester cette notion et se rend, à l’improviste, à la rencontre d’Anne déguisé en humble chevalier.

Cela dit, personne n’avait prévenu Anne qu’Henri pourrait agir de cette façon et cette tradition lui était entièrement inconnue. De plus, en 1540, le roi n’est plus le bel homme athlétique qu’il avait été jadis et les portraits qui circulent de lui sont complètement obsolètes.

Ainsi, lorsqu’un chevalier inconnu s’approche d’Anne et l’embrasse, cette dernière est confuse et particulièrement inconfortable. Elle répond avec politesse, mais se désintéresse rapidement de ce grossier personnage. Henri, offusqué qu’elle ne lui porte pas davantage d’attention, quitte la pièce. Il revient peu de temps après vêtu d’un élégant manteau de velours mauve. Anne comprend rapidement son erreur, mais le mal était déjà fait.

Le roi est extrêmement déçu de cette première rencontre et par l’apparence de la jeune Allemande. Dès cet instant, Henri tente de dissoudre ses fiançailles. Mais, inquiet des conséquences que cela engendrerait sur l’alliance diplomatique avec Clèves, il ne peut s’y résoudre. Le couple est marié le 6 janvier 1540, mais le roi refuse (selon ses dires) de consommer son union avec cette femme qu’il ne désire pas.

La plus chanceuse de toutes

Quelques mois après la cérémonie du mariage, Anne est informée de la volonté du roi d’obtenir l’annulation du mariage. Il se justifie en plaidant la non-consommation de l’union, raison acceptée par l’Église et par la cour. Anne accepte gracieusement et l’annulation est proclamée le 9 juillet 1540.

Après leur séparation, Henri et Anne deviennent bons amis et elle obtient le titre honoraire de « sœur bien-aimée du roi ». À ce titre, elle a préséance sur toutes les femmes du royaume à l’exception de l’épouse du roi et de ses filles. De plus, elle reçoit de riches propriétés, incluant Richmond Palace et le château d’Hever, qui lui garantissent de bons revenus et une extraordinaire autonomie.

Anne survit à Henri et est la dernière de ses six épouses à mourir.  

La fleur sans épine

Catherine Howard vers 1540 par Hans Holbein le jeune. Crédit Wikimédia.
Catherine Howard vers 1540 par Hans Holbein le jeune. Crédits: Wikimédia.

Trois semaines après l’annulation de son mariage précédent, le roi épouse une très jeune aristocrate sans fortune : Catherine Howard. Née entre 1520 et 1525, probablement plus près de cette dernière date, Catherine est placée par son oncle, le duc de Norfolk, à la cour d’Henri comme demoiselle d’honneur d’Anne de Clèves. Jeune, séduisante et frivole, cette dernière attire rapidement l’attention du roi, au grand bonheur de son oncle qui voit en elle la possibilité de gagner du pouvoir à la cour.

Malheureusement, la jeune femme est très peu instruite et manque de maturité pour assumer les responsabilités d’une favorite royale et encore moins d’une reine. Malgré cela, le roi est ensorcelé par celle qu’il surnommera sa « fleur sans épine » et il l’épouse le 28 juillet 1540.

Henri adore sa nouvelle épouse qu’il couvre de bijoux et de cadeaux onéreux. Mais, malgré sa richesse et son importante ascension sociale, Catherine ne trouve que peu d’attrait dans sa relation conjugale. Il faut dire que l’obésité du roi et l’odeur putride d’un ulcère permanent sur la cuisse de ce dernier la dégoutent profondément. Qui peut la blâmer?

Sans épine et sans tête

En 1541, Catherine s’engage dans une relation extraconjugale avec un favori de son époux, le séduisant Thomas Culpeper. Les rencontres entre les amants sont organisées sans subtilité par Lady Rochford, la plus vieille dame d’honneur de la reine. Rapidement, la conduite légère de Catherine est dévoilée au grand jour et celle-ci est accusée de trahison et d’adultère. De plus, elle admet avoir eu, préalablement à son mariage, une conduite indigne d’une dame de son rang et de l’avoir volontairement dissimulé au roi.

Le 21 janvier 1542, le Parlement anglais déclare la trahison royale comme punissable de mort. Il en fait de même pour toute femme, qui n’étant pas vierge au moment d’épouser un roi, ne dévoile pas son état et contre toute épouse de prince ou de reine convaincue d’adultère. 

Catherine Howard est décapitée le 13 février 1542, seulement deux ans après son mariage.

Survivre à son roi

Portrait présumé de Catherine Parr. Crédit nationaltrustcollections.org
Portrait présumé de Catherine Parr. Crédits: nationaltrustcollections.org

Le 12 juillet 1543, Henri épouse en sixième noce Catherine Parr, elle-même veuve deux fois. Le roi est vieux, malade et obèse, mais semble apprécier la compagnie de son épouse. C’est durant ce mariage, sans doute sous l’influence de sa femme, qu’Henri réintègre ses filles, Marie et Élisabeth, dans l’ordre de succession.

Catherine est une femme cultivée et mature, aux vues religieuses complexes. En 1546, un ordre d’arrestation est édicté contre elle pour ses opinions perçues comme trop réformatrices selon l’Église. Adroitement, elle prétend devant le roi n’avoir voulu que le distraire de sa douleur, provoquée par son ulcère, et réussit à échapper à une condamnation.

Henri VIII meurt le 28 janvier 1547, faisant de Catherine une des femmes les plus riches d’Angleterre. Elle épouse en quatrième noce son amour de jeunesse, Thomas Seymour et donne naissance à son seul enfant, Marie Seymour, le 30 août 1548. Affectée par une fièvre puerpérale, elle décède seulement six jours après l’heureux évènement.

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