
Les équipes sportives sont des groupes assez complexes à analyser. Qu’est-ce qui fait que des athlètes jouent bien ensemble ? Comment faire en sorte de créer une chimie entre un ensemble d’individus ayant tous des objectifs et des intérêts personnels ? La cohésion est un des facteurs ayant été associés à la performance d’équipes sportives. Dans les prochaines lignes, je vais vous expliquer ce qu’est ce concept et vous donner quelques trucs pour développer celui-ci.
Avant de parler en détail de la cohésion, il est d’intérêt de définir ce qu’est une équipe sportive :
- deux individus ou plus
- qui possèdent une identité, des buts et des objectifs communs
- qui partagent un destin commun
- qui présentent des modèles d’interaction et des modes de communication structurée
- qui ont des perceptions communes sur la structure du groupe
- qui sont interdépendants
- qui ont une attraction interpersonnelle réciproque (des amitiés peuvent se développer, p. ex.)
- et qui se considèrent comme un groupe.
Qu’est-ce qui fait qu’un groupe d’individus est meilleur qu’un autre ? Qu’est-ce qui explique que des équipes qui, sur papier, semblent moins bonnes que d’autres vont surprendre et offrir des performances exceptionnelles ?
Un élément essentiel est le concept de cohésion de groupe. La cohésion est définie comme un « processus dynamique qui se reflète dans la tendance d’un groupe à se soutenir et rester uni dans la poursuite de leurs objectifs instrumentaux et/ou pour la satisfaction des besoins affectifs de ses membres » (traduction libre [FL1] ). Autrement dit, une équipe cohésive poursuit un but commun, se serrent les coudes dans la poursuite de ce dernier et ses membres développent généralement des relations affectives (comme de l’amitié).
La cohésion serait principalement influencée par quatre grands facteurs [FL2] :
- Facteurs environnementaux
- Facteurs personnels
- Facteurs liés au leadership
- Facteurs d’équipe
Dans les prochaines lignes, je vais définir chacun de ces éléments et expliquer un peu plus comment vous pouvez favoriser le développement de ceux-ci dans votre équipe.
Facteurs environnementaux
La proximité est l’un des facteurs environnementaux importants au développement d’une cohésion. Il est important de favoriser les contacts et les interactions entre les membres du groupe dans le but de développer des affinités et de bonnes amitiés. Les coéquipiers qui s’entraident à l’extérieur du contexte sportif seront plus facilement portés à s’aider dans leur sport.
Un deuxième élément environnemental important est le fait de se sentir distinct des autres équipes. Cela se fait généralement de soi avec les uniformes, mais il est possible de favoriser davantage ce sentiment d’unité par le biais de devises ou de gestes porteurs de sens. L’équipe des Hurricanes de la Caroline dans la Ligue nationale de hockey (LNH), par exemple, a démontré un bon exemple de leur caractère distinctif en préparant des célébrations insolites après leurs victoires à domicile lors de la dernière saison. D’autres équipes, comme l’équipe de France de Soccer lors de la Coupe du monde de 2006, vont plutôt utiliser une devise à forte connotation (« vivre ensemble, mourir ensemble »).
Une autre bonne façon de développer ce caractère distinctif peut être en plaçant l’accent sur l’histoire de l’équipe ainsi que ses traditions. Un.e entraineur.e d’une équipe qui a une histoire riche en succès aurait tout à son avantage à miser sur les précédentes réussites de celle-ci pour motiver ses troupes et pour forger l’identité de son groupe.
Facteurs personnels
L’un des éléments personnels essentiels à la réussite d’une équipe est que les athlètes ne soient pas victimes de «paresse sociale». Ce phénomène se produit quand des individus vont réduire leurs efforts lorsqu’ils sont en groupe. Pour qu’une équipe fonctionne à son plein potentiel, chaque membre doit fournir un effort maximal et il est parfois nécessaire que ceux-ci se sacrifient personnellement pour le bien de l’équipe.
Un autre facteur individuel nécessaire au bon fonctionnement d’une équipe est la satisfaction de ses membres. Il est essentiel que chaque athlète connaisse bien son rôle et qu’il soit valorisé dans celui-ci. L’entraineur.e a un rôle essentiel à jouer et il est important qu’il.elle développe de bonnes relations avec chacun.e de ses joueurs.euses. Lorsque des insatisfactions se présentent, il est essentiel de les aborder tôt et de crever l’abcès. Une insatisfaction non réglée peut rapidement devenir un cauchemar si le.la joueur.euse en question a une influence considérable sur ses coéquipiers.ères.
Facteurs liés au leadership
Les leaders d’une équipe incluent les entraineurs.es, le.la capitaine et ses assistants.es et, parfois, d’autres membres de l’équipe qui n’ont pas un titre précis, mais qui démontrent des qualités de meneur.euse. Les comportements de ces individus, leur façon de mener leur groupe et la relation entre les leaders et les autres membres sont des éléments importants pour développer une bonne cohésion de groupe. Les leaders doivent démontrer l’exemple sur le terrain, mais aussi en dehors de celui-ci. Aussi, il est important que les leaders incluent chaque membre de l’équipe dans le processus de décision pour créer une plus grande cohésion. Chaque individu doit avoir le sentiment de faire partie de quelque chose de plus grand qu’eux.
Facteurs d’équipe
Il s’agit de la catégorie qui comprend le plus grand nombre d’éléments. Les facteurs d’équipe incluent autant les succès antérieurs du club, les aptitudes et la stabilité de l’équipe ou encore la volonté de réussite du groupe . Certains de ces éléments sont hors du contrôle du personnel d’entraineur (les succès antérieurs et la stabilité de l’équipe, par exemple), mais il est important malgré tout que les entraineurs.es connaissent l’influence de ces facteurs sur la cohésion de l’équipe.
Aussi, il est important que les rôles des membres d’une équipe soient complémentaires. Certains rôles sont formels (le.la capitaine ou la position des joueurs.euses, par exemple) tandis que d’autres sont informels. Il est important que les rôles formels soient clairs et bien définis. Des athlètes qui connaissent mal ce qu’on attend d’eux auront de la difficulté à offrir de bonnes performances. La cohésion du groupe pourrait en être affectée.
Pour les rôles informels, il est préférable d’avoir un groupe varié : de bons motivateurs, un ou des bouffons, des athlètes plus silencieux, quelques mentors, etc. Ces rôles ne sont pas nécessairement positifs ou négatifs lorsqu’ils sont distribués de façon plutôt égale. Par contre, lorsqu’une équipe comprend un trop grand nombre d’individus semblables (plusieurs clowns, par exemple), cela peut devenir problématique. Il doit y avoir un équilibre dans la mesure du possible.
D’autres facteurs d’équipes qui vont influencer la cohésion incluent la communication et la performance. Ces deux derniers éléments sont généralement dans une relation circulaire avec la cohésion. Plus une équipe a une grande cohésion, meilleure sera sa communication et sa performance, et ces deux éléments vont contribuer, par le fait même, à développer une meilleure cohésion.
La cohésion est un processus difficile à mettre en place et à maintenir sur le long terme. Les nombreux éléments énumérés dans ce texte sont des catalyseurs qui pourront vous aider à atteindre cette cohésion tellement importante aux succès d’une équipe sportive. Je vous laisse sur une citation de Bixente Lizazaru, champion du monde de Soccer avec l’équipe de France de 1998, qui décrit bien le concept : «(…) pourquoi il y a des équipes qui pendant 3, 4 ans vont tout gagner et tout d’un coup ça s’écroule alors que ce sont les mêmes joueurs ? Parce que cette alchimie-là, c’est ce qu’il y a de plus dur à trouver, ce relationnel entre les joueurs. La gestion de groupe ça peut très bien se passer pendant un an, pendant une durée de 2 mois et puis il y a un petit grain de sable qui vient foutre le bordel. Il faut toujours être vigilant, c’est un équilibre instable incroyable.» Voilà qui définit bien la cohésion. Un équilibre instable incroyable.
[FL1]Carron, A. V., Brawley, L. R., & Widmeyer, W. N. (1998). The measurement of cohesiveness in sport groups. Advances in sport and exercise psychology measurement, 23(7), 213-226.
[FL2]Voir : Williams, J. M. (2010). Applied sport psychology : personal growth to peak performance. Boston Montreal, McGraw-Hill Higher Education.