J’aime beaucoup les histoires d’athlètes ayant vécu des embuches importantes et qui ont su se relever et continuer à se battre pour atteindre leurs objectifs. Pour certain.es, l’adversité semble être un moteur important, puisque ces expériences les ont rendus plus fort.es. Le grimpeur Tommy Caldwell a dit que le fait de perdre un doigt l’a rendu meilleur alors que les médecins croyaient qu’il allait devoir renoncer à sa carrière. Incroyable, non?
Un nombre important d’athlètes d’élite ont vécu des obstacles et une grande adversité à un moment ou à un autre durant leur carrière sportive. Est-il possible que les difficultés puissent avoir des effets positifs d’une certaine façon? Fidèle à mon habitude, je suis allé voir ce que les recherches en psychologie peuvent nous apprendre sur le sujet.
L’exemple des Olympien.nes
Les athlètes qui se rendent aux Olympiques sont des exemples de réussite et des modèles pour beaucoup de jeunes athlètes. En ce sens, ils peuvent constituer une mine d’informations utiles pour comprendre le phénomène de l’adversité dans le sport.
Ces athlètes ont vécu des émotions négatives à la suite de ces événements, mais ont aussi utilisé ces affects d’une manière constructive.
Dans le cadre d’une recherche de 2015[1], des Olympien.nes ont été interrogé.es sur les difficultés qu’ils et elles ont vécues durant leur carrière sportive, et sur le rôle qu’ont joué ces événements dans leur développement. Parmi les expériences négatives énumérées, notons des blessures, des échecs lors de compétitions importantes, la non-sélection à une compétition ou le décès d’un proche.
Ces athlètes sont humain.es; ils et elles ont vécu des émotions négatives à la suite de ces événements, mais ont aussi utilisé ces affects d’une manière constructive. Les événements difficiles qu’ils et elles ont vécus ainsi que les émotions qui en ont découlé ont été un élément de motivation important pour ces sportif.ves de haut niveau. Un autre élément positif, que les Olympien.nes mentionnent avoir soutiré de l’adversité, est l’augmentation de leur confiance lorsqu’ils et elles doivent affronter de nouvelles situations difficiles. Ils et elles ont appris de ces événements et développé de nouvelles ressources qui leur ont été utiles par la suite.
Le lien entre l’adversité et la force mentale
Il a déjà été rapporté par plusieurs chercheur.ses que l’adversité pourrait contribuer au développement de la force mentale[2] (mieux connue sous le nom de mental toughness). Ce concept peut être défini comme suit:
«Posséder l’avantage psychologique inné ou acquis qui permet à l’athlète de gérer les nombreuses exigences sportives (entrainement, compétition) et personnelles par des moyens plus efficaces que ceux utilisés par les autres compétiteurs, et être plus méthodique et meilleur(e) que ses adversaires en demeurant déterminé(e), concentré(e), sûr(e) de soi et en contrôle sous pression»[3].
La force (ou endurance) mentale a été associée au succès dans différents domaines (Powell & Myers, 2017).
La force mentale a été associée au succès dans différents domaines[4]. Autrement dit, affronter de l’adversité développe ta force mentale, et cette dernière est un élément psychologique qui contribue à la réussite. Pour cette raison, il serait préférable pour les athlètes d’affronter des obstacles durant leur parcours afin de développer leurs aptitudes mentales.
Dans leur étude de 2017, Powell et Myers ont vérifié la façon dont la force mentale se développe chez des athlètes paralympiques. Ces athlètes ont souvent vécu des événements traumatiques durant leur vie et sont généralement des individus avec une force mentale exceptionnelle.
Les événements traumatiques qu’ont vécus ces individus sont décrits par ceux-ci et celles-ci comme étant «catastrophiques» et «bouleversant leur vie». Plusieurs d’entre eux et elles mentionnent qu’un processus d’acceptation doit se faire et qu’à la suite de celui-ci, un recadrage a été réalisé, de sorte qu’ils et elles vont percevoir ces épreuves comme une opportunité. Tout comme avec les Olympien.nes, les athlètes paralympiques mentionnent avoir développé une plus grande confiance en leur capacité à affronter des situations difficiles. L’adversité rencontrée leur a aussi permis de développer une meilleure connaissance d’eux-mêmes et elles-mêmes, et un haut niveau d’actualisation de soi.
Les Olympien.nes voient leur confiance augmenter lorsqu’ils doivent affronter de nouvelles situations difficiles.
La force mentale de ces athlètes se serait développée par le biais de leurs expériences formatrices (p. ex., l’événement traumatique, les défis rencontrés, l’engagement soutenu nécessaire à leur rétablissement) en collaboration avec le développement de différentes stratégies adaptatives et systèmes de soutien (p. ex., le support de la famille et des proches, le fait d’être entouré d’autres personnes handicapées, etc.).
En ce sens, ne serait-il pas préférable que les athlètes vivent de l’adversité tôt dans leur carrière afin de devenir plus solides mentalement le plus rapidement possible? C’est ce que suggèrent les auteurs Powell et Myers (2017), tout en plaçant l’accent sur l’importance d’avoir un environnement favorable offrant du soutien. De plus, comme le mentionnent ces derniers, il serait intéressant de voir ce qui fait en sorte que certains athlètes s’écroulent face à ces épreuves alors que pour d’autres, il s’agit d’une occasion de s’améliorer.
Il semble que Friedrich Nietzsche (ou Kelly Clarkson, si vous préférez) avait raison: «ce qui ne nous tue pas nous rend plus forts». L’adversité, les obstacles et les difficultés pourraient effectivement être des éléments importants dans le développement des athlètes et favoriser leur croissance [5]. La prochaine fois que vous ferez face à de l’adversité, pourquoi ne pas essayer de changer votre perception en vous disant qu’il s’agit d’une occasion d’apprentissage?
[1] Sarkar, M., Fletcher, D., & Brown, D. J. (2015). What doesn’t kill me…: Adversity-related experiences are vital in the development of superior Olympic performance. Journal of Science and Medicine in Sport, 18(4), 475-479.
[2] Gucciardi, D. F. (2010). Mental toughness profiles and their relations with achievement goals and sport motivation in adolescent Australian footballers. Journal of sports sciences, 28(6), 615-625.
[3] http://icspacifique.ca/wp-content/pdfs/pp/FR-performance-point-mp-1001-mental-toughness.pdf
[4] Powell, A. J., & Myers, T. D. (2017). Developing mental toughness: lessons from paralympians. Frontiers in psychology, 8, 1270.
[5] Sarkar, Fletcher & Brown, (2015).