Depuis plusieurs années, l’Institut de recherche sur l’hydrogène (IRH) de l’UQTR attire beaucoup l’attention. En effet, alors que la nécessité d’une transition énergétique s’impose, l’hydrogène et son grand potentiel énergétique en séduisent plusieurs. J’ai rencontré Monsieur Bruno Pollet, codirecteur de l’Institut et chercheur émérite, pour mieux comprendre l’engouement autour de cet élément gazeux.
L’IRH
Avant son arrivée au Québec, le codirecteur de l’Institut a travaillé sur des projets internationaux en Grande-Bretagne, au Japon, en Afrique du Sud et en Norvège. Fondée en 1994, L’IRH regroupe donc d’abord une équipe de chercheurs à l’expertise de pointe. Monsieur Pollet et plusieurs de ses collègues font en effet partie des meilleurs chercheurs au monde en matière d’hydrogène. Ils travaillent presque tous en ingénierie afin de produire des systèmes énergétiques plus verts. Par ailleurs, l’Institut a également une vision multidisciplinaire. Ses travaux pigent dans le savoir des sciences de base et des sciences sociales. Pour peut-être éviter les erreurs du passé, les réflexions sur la transition énergétique prennent en compte les revendications des peuples autochtones. Les chercheurs de l’Institut se penchent notamment sur des questions d’éthique et de parole citoyenne.
L’IRH a premièrement été reconnu comme un pionnier en matière de storage d’hydrogène. La chose peut sembler anodine, mais détrompez-vous : on n’entrepose pas l’hydrogène de la même manière que nos manteaux l’été venu. Les chercheurs de l’IRH ont innové dans ce domaine en développant de nouveaux matériaux appelés hydrures métalliques. Ces derniers s’obtiennent par une combinaison chimique qui permet d’emprisonner l’hydrogène dans des structures métalliques. L’UQTR est chanceuse de compter en ses rangs un des plus grands chercheurs au monde dans ce domaine : Monsieur Jacques Huot.
Plus récemment, en 2021, le centre de recherche s’est également lancé dans la production d’hydrogène. C’est au moyen de « grosses machines » appelées électrolyseurs que l’on transforme l’eau en oxygène et en hydrogène.
Pourquoi l’hydrogène ?
L’hydrogène, c’est un gaz plus léger que l’air et très combustible. Cette dernière caractéristique en fait un élément chimique à fort potentiel énergétique. En fait, c’est un gaz tellement puissant que c’est ce que la NASA utilise pour alimenter ses fusées. Il peut être employé dans plusieurs secteurs, notamment le transport. Une voiture à l’hydrogène peut fonctionner avec une pile à combustible. Il s’agit d’un système qui permet de transformer l’hydrogène et l’oxygène de l’air en énergie. Avec cela, fini les émissions de Co2 : seule de la vapeur d’eau est dégagée. Monsieur Pollet voit l’hydrogène comme un « vecteur énergétique très intéressant qui pourrait éventuellement remplacer le fossile ».
Si cette solution énergétique est très alléchante, plusieurs choses freinent son utilisation massive. D’abord, la production et le storage de l’hydrogène demandent beaucoup d’énergie. Pour obtenir un seul kilogramme d’hydrogène, on a besoin de 50 à 55 kilowattheures. C’est une très grande quantité d’énergie. Si l’on veut storer de l’hydrogène dans une voiture, on doit soit le pressuriser avec une pression très élevée ou le liquéfier. Dans les deux cas, il s’agit de procédés très énergivores.
Prohydrogène et antihydrogène
Vous serez peut-être étonné.e.s d’apprendre que l’hydrogène fait l’objet de controverse. Monsieur Pollet décrit la situation en faisant un parallèle avec la question des vaccins qui divisait les gens durant la Covid. De la même façon, il y a donc les antihydrogène et les prohydrogène. Selon Monsieur Pollet, le phénomène des fake news aurait sa part d’implication dans le débat. « Nous sommes dans une société où la désinformation règne, nous dit le chercheur. Le problème est que l’on s’éloigne tellement de l’expertise. On a des personnes qui lisent des choses sur Internet, sur les médias sociaux et là, comme par miracle, ce sont des experts. » Le co-directeur de l’IRH rappelle qu’il faut se référer aux véritables experts : les scientifiques.
« Le problème est que l’on s’éloigne tellement de l’expertise. On a des personnes qui lisent des choses sur Internet, sur les médias sociaux, et là, comme par miracle, ce sont des experts. »
Bruno Pollet, codirecteur de l’Institut de recherche sur l’hydrogène
Justement, en tant qu’expert, Monsieur Pollet a une vision assez pragmatique de l’avenir de l’hydrogène. Selon lui, il ne s’agit pas non plus du St-Graal. L’hydrogène est encore très cher. Aussi, si l’on voulait remplacer toute l’énergie fossile, il nous faudrait des quantités énormes d’hydrogène. Malheureusement, nous ne sommes pas rendus à ce point. Pour l’instant, la priorité est d’utiliser l’hydrogène dans les secteurs « Sans regret », soit ceux qui sont difficiles à électrifier. On parle entre autres de l’industrie de la cimenterie, de l’aciérie, de la production d’engrais et d’ammoniaque.
Il ne s’agit donc pas de faire de l’hydrogène la seule source d’énergie verte. Il fait plutôt partie d’un plus large éventail de solutions dont fait notamment partie l’hydroélectricité et l’énergie éolienne. Monsieur Pollet se fait encourageant en mentionnant que le Québec est bien placé pour produire de l’énergie verte. D’une part, les barrages hydroélectriques favorisent le virage écologique. Le gouvernement prévoit également investir le vaste territoire québécois pour construire des parcs solaires et éoliens.