Tout est bizarre : L’animal indestructible

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Mes hommages, nobles lecteurs, et bienvenue dans cette chronique bien étrange. Pour la présentation, sachez que je me targue d’une curiosité arrogante devant toutes ces petites choses surprenantes dont on ignore souvent l’existence. Ainsi, après plusieurs années de curiosité maladive, je me présente à vous avec l’idée féconde de vous partager mes grandes découvertes qui, je l’espère, sauront vous surprendre.

Mais trêve de mondanité, abordons par l’exemple. Je vous présenterai, en guise d’entrée, le premier de mes animaux favoris qui, de circonstance, sont toutes de bien étranges créatures.

Saviez-vous qu’il est possible qu’une espèce extraterrestre soit présente sur Terre?

Voilà une affirmation surprenante, n’est-ce pas? C’est pourtant possiblement le cas. En effet, le tardigrade, aussi nommé «ourson d’eau», est un minuscule animal pluricellulaire d’un demi-millimètre présent partout sur Terre. Là où la plupart des petits invertébrés remuent dans tous les sens, les tardigrades, eux, se déplacent avec lenteur, escaladant posément de minuscules débris dans une démarche nonchalante et pataude. Leur nom vient d’ailleurs du latin tardigrada, qui signifie «marcheur lent». Il est même possible de les voir à l’œil nu. Mais pourquoi seraient-ils extraterrestres dites-vous?

Premièrement, répondrai-je, ils forment une branche zoologique à part entière dans le merveilleux monde des animaux invertébrés. De plus, ils ne ressemblent à aucune autre espèce et n’ont aucun cousin génétique connu. Ils sont aussi très variables, plus de mille espèces de tardigrades sont connues à ce jour.

Deuxièmement, les tardigrades vivent partout sur la planète. Du sommet de l’Everest jusqu’au fond des fosses océaniques, dans les glaces de l’Antarctique et dans le sable des déserts. En fait, ils peuvent aisément survivre à des températures comprises entre -270°C et 150°C. Ils peuvent aussi résister aux radiations, à la sécheresse, aux toxines les plus puissantes et même au vide de l’espace.

Finalement, et c’est là qu’ils deviennent incroyables, les tardigrades ont un superpouvoir, celui de devenir invulnérable. En effet, ces petites créatures sont les seuls animaux connus à pouvoir accomplir une cryptobiose, c’est-à-dire qu’ils arrêtent leur métabolisme et entrent en état de stase. Pour faire cette prouesse qu’aucun de l’ensemble du vivant connu n’est capable, ils transforment l’eau contenue dans leurs cellules en un sucre non réducteur, le tréhalose, qu’ils sont capables de synthétiser. Ainsi, totalement inactifs et aux allures de raisins secs, les tardigrades deviennent presque indestructibles, immuables, immortels, et peuvent attendre très longtemps, en stase, que leur environnement soit propice à la vie. Ils peuvent donc survivre à des contraintes extrêmes qui tueraient même les bactéries et organismes unicellulaires connus.

Saviez-vous qu’il est possible qu’une espèce extraterrestre soit présente sur Terre?

C’est ce dernier point, et aussi le fait que le tardigrade soit une espèce singulière dans notre biosphère, qui a poussé les scientifiques à envisager l’hypothèse que ce petit animal soit arrivé sur Terre sur une météorite ou une comète, ce qui en ferait, le cas échéant, le premier voyageur intersidéral rencontré par l’Homme.

En fait, les chercheurs de la NASA sont si convaincus de cette hypothèse qu’ils ont envoyé des tardigrades en orbite pendant une semaine, exposés aux radiations et au vide de l’espace, pour ensuite faire écraser le satellite les transportant… Et les tardigrades ont survécu, ils s’étaient même reproduits! Ces petites créatures fascinantes sont donc, possiblement, d’un autre monde.

Néanmoins, pour ma part et sans vouloir briser la magie, je crois que la Terre est suffisamment vieille pour avoir mis au jour un tel chef-d’œuvre d’évolution. En fait, l’unicité du tardigrade dans la biosphère peut s’expliquer par son extraordinaire adaptation aux contraintes possibles. Ainsi, il ne possède pas de proches parents génétiques pour la simple raison qu’il n’a pas eu à évoluer ni à se diversifier. Le tardigrade a donc, à mon sens, atteint une sorte de perfection évolutive. Incroyable cependant de voir le potentiel du Darwinisme.

Pour qui voudrait se gaver davantage des singularités du tardigrade, sachez qu’il n’augmente jamais le nombre de ses cellules dans sa croissance. Il procède d’un grossissement cellulaire. On peut en déduire que ses cellules sont incapables de procéder à une mitose cellulaire, ce qui accroit d’autant plus le mystère entourant son existence surévoluée. Aussi, sa capacité à entrer en stase ne justifie pas une survie prolongée sans apport en oxygène. À cela, le tardigrade réagit par une anoxybiose. Lorsqu’il entre dans cet état, il se gonfle et flotte dans son environnement. Les chercheurs n’ont malheureusement pas encore élucidé les raisons de sa survie sans oxygène, ni les subtilités de l’anoxybiose.

C’est pourquoi le tardigrade est un de mes animaux préférés, et pourquoi la possibilité qu’il soit extraterrestre existe, bien que dans des proportions beaucoup plus limitées que ne laissait croire la démagogie de mon entrée en matière. Alors voilà un bon exemple de curiosité surprenante, et le tardigrade pourrait bien offrir à l’humanité les secrets d’une survie efficiente dans les conditions terribles du vide spatial.

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