Vernissage à Presse Papier: Regardez-moi dans les yeux

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La dizaine de portraits imprimés par sérigraphie sur un tissu fibreux laisse place à la lumière et à la transparence. Photo: M.-C. Perras
La dizaine de portraits imprimés par sérigraphie sur un tissu fibreux laisse place à la lumière et à la transparence. Photo: M.-C. Perras

Entre Montréal et Québec, Éloïse Pagé-Plamondon se promène. C’est donc un passage obligé que de faire un arrêt à Trois-Rivières afin d’exposer dans la salle de l’Atelier Presse Papier. Fort de sa réputation, l’artiste avait eu vent de cet atelier singulier. Elle est donc venue présenter au public le résultat d’une trouvaille, l’élaboration d’une image à la fois délicate et inquiétante. La jeune femme accessible s’est rendue disponible lors du vernissage du 26 février dernier.

En entrant dans l’exigüe salle d’exposition de l’Atelier Presse Papier, une légère masse est visible au centre de l’espace. Une accumulation de ce qui semble des parties de visages sur un support vaporeux. Dans cet atelier où l’impression est à l’honneur, c’est à se demander quel matériau est utilisé pour ce travail-ci. Une impression fantomatique. Au premier coup d’œil, il est évident que c’est un travail en transparence, mais demeure un sentiment mystérieux.

En approchant davantage de l’œuvre, le mystère se dévoile peu à peu. Le visage d’une femme est imprimé une dizaine de fois sur autant de tissus de coton très mince. C’est le même tissu qui sert à essuyer le trop plein d’encre sur les plaques métalliques qu’utilisent les graveurs. C’est ce qui sert aussi aux fromagers, ce qui s’appelle du coton-fromage. Un tissu d’une grande fragilité, ce qui évoque immédiatement la délicatesse du geste de l’artiste et la douceur de la démarche.

Le visage d’une femme est imprimé une dizaine de fois sur autant de tissus de coton très mince.

Le portrait est celui d’Ève. Une vieille femme avec qui l’artiste a développé une relation de proximité, une voisine amicale. Les sérigraphies qui représentent le portrait de la femme se superposent et révèlent des spectres différents selon l’angle avec lequel le spectateur regarde l’œuvre. Lorsque le spectateur se tient directement devant les visages, qu’il regarde droit dans les yeux du personnage, toute la profondeur de l’âme s’y retrouve. En regardant en angle de côté, ce sont les rides et la lourdeur de la vie qui se lisent.

Le dispositif qui saisit à première vue libère la profondeur humaine. Photo: M.-C. Perras
Le dispositif qui saisit à première vue libère la profondeur humaine. Photo: M.-C. Perras

Bachelière en arts visuels de l’Université Laval, Éloïse Pagé-Plamondon s’est inspirée du livre de Günter Grass Pelures d’oignon pour élaborer son dispositif. «C’est une métaphore de l’identité humaine. En fait, on peut éplucher un ognon pour essayer de trouver son cœur, mais au final on se rend compte que ce n’est qu’une accumulation de couches», explique la jeune femme.

Éloïse Pagé-Plamondon a voulu mettre en évidence les yeux comme véritable porte pour entrer en contact avec une personne. L’impression d’interférence proposée par les portraits superposés laisse toutefois le regard du personnage bien en vue pour quiconque voudrait y plonger. Ève, ce portrait par accumulation, fait partie d’une série de cinq. «Je suis fascinée par les visages, surtout les visages qui ont les marques du temps sur eux, qui sont caractériels parce que pour moi c’est comme la carte topographique d’une vie», ajoute l’artiste.

L’impression d’interférence proposée par les portraits superposés laisse toutefois le regard du personnage bien en vue pour quiconque voudrait y plonger.

Éloïse Pagé-Plamondon exposera cet été à Colis Suspect, un centre de diffusion d’art actuel à l’aéroport des Iles de la Madeleine. Elle fait aussi partie du collectif d’artistes émergents Canadian Bacon. C’est à surveiller pour des expositions à Montréal et à Québec. Le collectif mise souvent sur des formules évènementielles regroupant une vingtaine d’artistes pendant une fin de semaine et ils se reconnaissent dans le street art.

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