
Le documentaire Forêts urbaines d’Anne-Marie Rocher, sorti au Québec le 18 avril après une première remarquée au festival Cinémania en 2024, arrive à point nommé dans un contexte d’urgence climatique et de prise de conscience croissante du rôle crucial de la nature en milieu urbain. À travers l’exploration de diverses initiatives canadiennes visant à réintroduire la nature dans nos villes, le film se présente comme un «véritable antidote au pessimisme».
Des défis pour une cinéaste chevronnée

La réalisatrice, Anne-Marie Rocher, forte d’une expérience significative dans le documentaire (notamment avec des œuvres primées comme André Markowicz, la voix d’un traducteur et Gugging), n’en est pas à son premier coup d’essai. La fondatrice des Productions Testa, a également dirigé l’Office National du film du Canada (ONCF) pendant plusieurs années.
Installée en Ontario, Anne-Marie fait face aux défis de la francophonie hors Québec qui jalonnent le monde du cinéma. En ce sens, elle nous a fait part des difficultés que peuvent devenir le fait de trouver du financement et de faire diffuser son film.
Un travail de longue haleine
Celle qui confie être «toujours à la recherche de la meilleure histoire» aborde ici un sujet d’une grande actualité avec une sensibilité palpable. Son intérêt pour la question des forêts urbaines, né de rencontres et d’un colloque en 2017, témoigne d’un engagement profond envers la thématique. Le choix de se concentrer sur le contexte canadien, bien que potentiellement limitatif pour une vision globale, permet de mettre en avant la richesse et la diversité des initiatives locales. On comprend, à travers les propos de la réalisatrice, que le Canada foisonne déjà d’exemples concrets de re-naturalisation urbaine, un aspect souvent méconnu. Par ailleurs, la pandémie de COVID-19 et ses confinements ont relancé un nouvel espoir d’une prise de conscience plus profonde et durable dans le temps.

Forêts urbaines : qu’est-ce que c’est ?

D’un parc de quelques pieds carrés à une forêts dense et riche au coeur d’une ville comme le Mont-Royal à Montréal, les espaces verts en ville sont divers et prennent une large variété de formes. En ouverture du documentaire, la parole est au professeur Christian Messier, qui esquisse une définition de forêt urbaine à l’idée du lien entre l’humain et la Nature. «Il faut pas perdre ce lien à la Nature, elle a tout ce qu’il faut pour nous guérir», nous confiait en entrevue Anne-Marie Rocher.
Si les anciens peuples entretenaient un lien puissant avec les éléments, nous, citadins, avons peu à peu rompu avec cet héritage, coulant dans le béton des territoires entiers. Mais avec les chaleurs de plus en plus suffocantes dans les grands centres urbains, il devient essentiel de réintégrer des bouts de Nature pour briser les îlots de chaleur, créer de l’ombre, ré-oxygéner les villes, mais également contribuer au bien-être physique et mental des citoyens.
«Une forêt urbaine (…) c’est ce qui unit l’humain, le citadin avec la nature. C’est l’ensemble de tous les arbres que l’on retrouve dans la rue individuellement, tous les arbres dans les parcs […] Si il n’y avait pas ces espaces, ces arbres en milieux urbains, je crois que les gens seraient complètement déconnectés de la nature»
Christian Messier, professeur et chercheur au département de sciences biologiques à l’UQAM et au département de sciences naturelles de l’UQO
Le documentaire réussit brillamment à faire découvrir autre chose, et que la forêt urbaine ne se limite pas aux grands parcs, mais englobe l’ensemble du réseau vert d’une ville, des arbres de rue aux initiatives citoyennes de verdissement. En mettant en lumière des projets concrets de restauration de la nature, le film offre une perspective tangible et encourageante. On y découvre des individus passionnés, œuvrant souvent dans l’ombre, qui transforment des espaces bétonnés en îlots de biodiversité et de bien-être. L’hommage rendu à ces acteurs du changement est sans conteste l’un des points forts du documentaire. Leur engagement et leur créativité face aux défis environnementaux urbains sont véritablement inspirants et communiquent un sentiment d’espoir bienvenu.

Si certaines critiques ont pu reprocher au film de ne pas assez approfondir les enjeux des politiques publiques sur le verdissement des communautés, on appréciera la douceur et la lueur d’espoir que ce documentaire fait naître chez le spectateur. Il est certain que les politiques urbaines impactent la présence ou l’absence de «bouts» de nature dans les villes, c’est un fait indéniable. Néanmoins, une fois ce constat fait, il en va de l’initiative individuelle d’agir et de faire sa part citoyenne. Et c’est cet aspect-là qui semble ressurgir de Forêts urbaines, et, soyons honnêtes, dont on a bien besoin.
Forêts urbaines est donc un documentaire nécessaire et porteur d’espoir. Il met en lumière des initiatives inspirantes et rappelle l’importance vitale de reconnecter l’humain à la nature, en particulier dans nos environnements urbains de plus en plus artificialisés.
Pour ceux qui souhaiteraient s’impliquer localement à Trois-Rivières ou aux environs, il est possible de suivre les projets de la Fondation Trois-Rivières durable sur leurs réseaux sociaux, ou de s’engager bénévolement dans l’Escouad’Durable pour faire une différence concrète.