
Le 11 décembre dernier, dans le cadre de ses Grandes conférences, l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) a accueilli Steven Blaney, ancien ministre de la Sécurité publique. Ce sont une vingtaine de participants qui ont assisté à sa présentation, intitulée « La fin de l’innocence : enjeux de sécurité nationale et lutte contre le terrorisme au Canada » qui revenait sur l’attaque de 2014 et les mesures qui ont été mises en place à l’époque. Steven Blaney est revenu sur l’attaque terroriste du 22 octobre 2014 à Ottawa, sans précédent sur le sol canadien. Celle-ci s’est produite au Parlement alors qu’avait lieu un caucus, par un individu dont la radicalisation serait due à l’engagement d’Ottawa dans sa lutte contre l’État islamique.
La fragilité de la sécurité nationale canadienne

L’année 2014 marque un moment charnière dans l’histoire sécuritaire du Canada. Les attentats terroristes d’octobre 2014, dont l’attaque du Parlement, ont secoué le pays et symbolisé la perte d’une certaine « insouciance », selon les propos de Steven Blaney. Le Canada, jusqu’alors perçu comme une nation pacifique et éloignée des conflits mondiaux, a été confronté à une réalité brutale, celle de la menace terroriste.
L’attentat à Ottawa a mis en lumière plusieurs vulnérabilités sécuritaires majeures. Le premier ministre de l’époque, Stephen Harper, fut identifié comme la cible la plus accessible lors de l’attaque, révélant un manque criant de préparation et de protocoles adaptés de sécurité. Face à cet événement, l’opinion publique et les institutions canadiennes ont pris conscience de la nécessité de renforcer la sécurité au niveau national. Le terrorisme était alors considéré selon Steven Blaney, comme la « principale menace pour la sécurité nationale », et le gouvernement Harper n’a pas tardé à réagir.
Sur la scène internationale, cette attaque a eu lieu dans un contexte géopolitique et géostratégique particulièrement tendu. Le Canada s’était déjà engagé dans la lutte contre l’État islamique en rejoignant une coalition internationale. Cette mission, couplée aux efforts en Afghanistan, témoignait de l’implication croissante du pays dans la lutte antiterroriste mondiale. Toutefois, cet engagement a également accru la visibilité du Canada aux yeux des groupes extrémistes, comme Al-Qaeda, et l’état islamique, le manifestant dans une posture plus vulnérable.
Équilibre entre sécurité et libertés fondamentales : la réponse gouvernementale
À la suite des attentats, le gouvernement Harper a rapidement pris des mesures pour combler les lacunes sécuritaires mises en évidence par cette attaque. En seulement 139 jours, un projet de loi a été élaboré afin de renforcer les capacités de lutte contre le terrorisme. Ce texte, selon Steven Blaney, a établi un « cadre légal clair » pour prévenir et contrer les attaques, en élargissant les pouvoirs du Service canadien du renseignement de sécurité. Ce dernier a pris en charge la sécurité nationale, tandis que la GRC s’était retirée partiellement de ce rôle à la suite des pressions internes.
Cette restructuration a soulevé des débats majeurs quant à l’équilibre entre la sécurité et le respect des droits fondamentaux. L’argument gouvernemental, selon le ministre de la Sécurité publique de l’époque, affirmant qu’il « n’y a pas de prospérité sans sécurité », a alimenté un débat public essentiel sur les limites des libertés individuelles en temps de crise. L’apparition croissante de propagande haineuse sur Internet a compliqué encore plus cette réflexion, illustrant l’évolution de la menace terroriste dans un monde numérique et mondialisé.
Ces mesures ont certes permis de renforcer la sécurité du Canada, mais elles ont également entraîné une prise de conscience collective de l’opinion publique qui a compris que le pays n’était plus immunisé contre les risques terroristes. Ce tournant a marqué une nouvelle ère où les préoccupations sécuritaires occupent désormais une place centrale dans les politiques publiques du Canada. Ladite conférence de l’ex-ministre est d’actualité pour une veille stratégique en ce sens que, bien qu’évolutive, la menace terroriste reste persistante à l’échelle mondiale. De plus, les groupes extrémistes adaptent leurs méthodes malveillantes en utilisant les technologies numériques et les réseaux sociaux pour renforcer leurs activités.
Lors de la séance de questions-réponses largement portées sur la radicalisation au regard du profil du terroriste, Steven Blaney a souligné que « la radicalisation commence par le discours », mettant en avant les dangers des discours haineux et extrémistes, notamment à caractère religieux. Il a conclu en affirmant que, grâce aux mesures prises depuis 2014, le Canada est aujourd’hui mieux préparé, avec des outils renforcés pour les forces de l’ordre afin de contrer ces menaces.
Références
https://ici.radio-canada.ca/info/long-format/2113947/fusillade-ottawa-parlement-securite-capitale