Des histoires d’universitaires: La Honte

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Depuis plus d’un an, notre université est mise en scène sur la une du Nouvelliste. On devrait normalement se réjouir de cette visibilité dans les médias régionaux, mais ceux qui en connaissent les raisons sont loin d’avoir le cœur à la fête. C’est effectivement difficile d’apprécier quand le manque de professionnalisme des gestionnaires de son université rejaillit sur l’institution au complet.

Si vous ne lisez pas fréquemment le journal du coin, sachez qu’il s’est passé peu de semaines sans qu’un vice-recteur déchire sa chemise sur la place publique, quand il ne démissionne pas carrément avec fracas. À cela s’ajoutent aussi des histoires de troubles organisationnels et même de harcèlement sexuel. On pourrait presque penser que le quotidien s’est doté d’un feuilleton mettant en scène des universitaires et des cadres supérieurs, tellement on nage dans le drame.

À travers ces mélodrames, on revient souvent sur le cas de la nouvelle rectrice Nadia Ghazzali et son style de gestion. Plusieurs semblent considérer que son élection à ce poste marque le début des temps obscurs. On constatera qu’ils n’hésiteront pas à lui attribuer le blâme de chaque nouveau pépin, de chaque nouvelle démission. On lui reprochera d’être autocratique, de manquer d’écoute, de mettre en place des mesures arbitraires et, pourquoi pas tant qu’à y être, d’occuper le bureau voisin d’une toilette publique ayant dû être rénovée.

Nuançons

S’il m’apparait déjà saugrenu de rendre une seule personne responsable de toutes les catastrophes ayant lieu à l’UQTR, il convient d’autant plus de tenir compte de certains faits. On se rappellera que Madame Ghazzali n’était pas la seule à se présenter à ce poste. Elle a défait un opposant qui, contrairement à elle, faisait carrière à l’UQTR depuis de nombreuses années. Ce dernier était déjà vice-recteur, en plus d’avoir occupé d’autres postes administratifs et d’avoir été préalablement enseignant. C’était en quelque sorte le candidat maison, poulain de l’establishment, alors qu’elle arrivait de l’Université Laval.

Or, celui dont je tairai le nom exerce toujours son poste de vice-recteur, malgré le fait que la communauté universitaire ne lui ait pas confié le rectorat. Une telle situation est un terreau fertile pour les tensions et dissensions. Sans remettre le blâme sur le candidat défait, aurait-il été plus sage de sa part de retourner à des tâches d’enseignement dans ce contexte? Peut-être aurait-on ainsi calmé les guerres de clans dans les hautes instances, où une vieille garde affronte des nouveaux venus réformateurs ayant la rectrice comme figure de proue.

Néanmoins, il convient de constater qu’un reproche fréquemment formulé à l’endroit de cette dernière est sa propension à prendre des décisions unilatérales. Si tel est bien le cas, on peut se demander ce que fait le conseil d’administration. Le travail de la rectrice devrait être scruté par les administrateurs, qui ont aussi comme mandat de rendre effectives les décisions de celle-ci. Autrement dit, si Madame Ghazzali prend une mauvaise décision et qu’elle est appliquée sans poser de question, le CA a manqué à son devoir.

On peut donc interpréter de deux façons le manque de popularité des décisions de la rectrice. Soit le conseil d’administration est noyauté par ses sympathisants, soit certains administrateurs y siégeant manquent de zèle dans leur lecture des dossiers. Probablement un malheureux mélange des deux.

Vous pensiez avoir des prises électriques dans vos classes avant la fin de vos études? Espérez que les cravatés apprennent à gérer leurs conflits bientôt.

Et nous là-dedans?

Cette affaire semble passablement éloignée de l’étudiant moyen, comme si le pavillon Pierre-Boucher n’était pas sur notre campus. On aurait tendance à vouloir oublier ce bâtiment et le soap qui s’y joue. Qui aura affaire à un vice-recteur dans son parcours académique? Cela nous touche pourtant plus que ce qui peut paraitre à première vue.

En effet, plusieurs donateurs importants de l’UQTR ont suspendu leur apport financier tant que le climat chez les cadres supérieurs ne s’aplanira pas. Rappelons que la philanthropie compte pour beaucoup dans les entrées d’argent de n’importe quelle université et la nôtre n’y fait pas exception, particulièrement en contexte de coupures budgétaires. Si les services de base n’en souffrent pas, on peut faire une croix sur la liste d’achat de la bibliothèque et la (déjà lente) rénovation des salles de classe. Vous pensiez avoir des prises électriques dans vos classes avant la fin de vos études? Espérez que les cravatés apprennent à gérer leurs conflits bientôt.

On a dépensé plusieurs dizaines de milliers de dollars récemment sur un nouveau logo plus noble pour l’université ainsi que sur des fanions aux lampadaires et des affiches aux entrées. Le tout pour favoriser le sentiment d’appartenance des étudiants. Peut-être faudrait-il commencer par leur donner de quoi être fiers de leur université avant.

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