La zone grise: La protection de la langue française, un mal nécessaire?

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métavers, zone grise, bock-côtéLe 28 février dernier, le rappeur et artiste multidisciplinaire Samian explique, dans une publication Facebook, avoir été empêché de participer au Festival international de la chanson de Granby (FICG) en raison de ses chansons qui ne sont pas exclusivement en langue française.

Samian souligne, qu’après avoir été invité à l’événement, l’organisation lui exige que son concert se fasse uniquement en français. « Mon dernier album est entièrement en Anishinabemowin » leur rétorque-t-il, tout comme « plusieurs de mes chansons sur mes albums précédents ». Pour cette raison, le festival a préféré refusé la présence de l’artiste puisque celui ne respectait pas cette consigne. Dans sa publication, Samian, offensé avec raison, pose une question des plus pertinentes: « Est-ce qu’encore, en 2022, les langues autochtones doivent être considérées comme des langues étrangères ? Ces langues ancestrales d’ici n’ont rien de menaçant pour le français! »

Toutes les langues ne sont pas nées égales

En refusant que Samian performe ses chansons pour soi-disant protéger la langue française, l’organisation du FICG s’est tirée une balle dans le pied. Tandis que certaines personnes ont indiqué que cette situation trahissait encore la mentalité colonialiste du Québec, et ce, un peu plus d’un an après la mort brutale de Joyce Echaquan, d’autres déploraient que la belle province soit tranquillement en train de devenir une parodie d’elle-même à force de scander avec insistance qu’il faille protéger la langue française. Pourtant, lorsqu’on parle de « protéger la langue française », ne s’agit-il pas de la protéger contre des menaces linguistiques potentielles (lire ici la langue anglaise)?

Le FICG serait-il devenu à la merci de ses subventions?

En quoi les langues autochtones menacent la survie de la langue française? En réalité, c’est plutôt le français et l’anglais, langues arrivées avec la colonisation du territoire nord-américain, qui nuisent aux langues autochtones. À cette ère où une majorité de gens rêvent d’un avenir sans discrimination, qu’elle qu’en soit la forme, le FICG a fait une faille majeure en insinuant que la promotion de la langue française prévaut sur tout.

Mentalité colonialiste

Le lendemain, constatant les réactions de mécontentement suscitées par le statut du rappeur, le FICG a publié sur sa page Facebook un message pour calmer les ardeurs des internautes. Avançant sans grande crédibilité que « notre mission est de faire la promotion de la chanson francophone » et que « nous souhaitons laisser une place aux auteurs-interprètes de cultures autochtones », le FICG tente de se justifier, mais ne réussit pas à convaincre de sa bonne volonté.
Le FICG, soutenu financièrement par les gouvernements québécois et canadien pour ses efforts de protection du patrimoine culturel et de promotion de la langue française, serait-il devenu à la merci de ses subventions?

Les fameuses subventions

Ce ne serait pas la première fois que l’on couperait l’herbe sous le pied d’un artiste d’ici parce qu’il n’emploie pas suffisamment, selon certains organismes, la langue française. Bien ces deux situations soit différentes, lire la publication de Samian m’a fait pensé au groupe de rap Dead Obies qui, en 2016, n’avait pas pu recevoir d’aide financière pour son deuxième album puisque celui-ci n’était pas assez français et pas assez anglais.
Sommes-nous en train de faire mourir la culture d’ici pour faire survivre la culture d’ici?
Le FICG, comme de nombreux autres événements ou organismes d’ici, existe pour faire la promotion de la langue française. D’abord, il convient de se demander pourquoi il serait important de le faire. J’imagine que la réponse juste à ce questionnement serait qu’il faut permettre à la culture québécoise de perdurer dans le temps et d’encourager les artistes d’ici à y contribuer. Toutefois, la société québécoise, et par le fait même sa culture, a grandement évolué depuis l’établissement de ses principes patrimoniaux.
De nos jours, des artistes comme Samian, Charlotte Cardin ou Dead Obies incitent la jeunesse québécoise à s’intéresser à la production musicale d’ici, même si ils et elles n’emploient pas uniquement le français. Dans un monde idéal, les organismes subventionnaires s’adapteraient à l’évolution musicale de la société québécoise pour réellement permettre à notre culture de florir. Parce qu’en empêchant des artistes de participer à des événements ou d’être subventionnéEs pour des raisons linguistiques, c’est un peu comme laisser mourir la culture vivante d’ici pour faire survivre une culture qui n’existe déjà plus.
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