
Si en novembre 2024, la chronique économique du Zone Campus titrait : Réduction des seuils d’immigration et ses impact, l’éditorial du même mois abordait la délicate question de l’immigration permanente au Québec. Pourtant aujourd’hui, 28 janvier 2025, cette réalité de la difficulté d’obtenir une réponse de la part du service d’immigration Canada touche le journal d’un peu plus près.
Je suis française. J’ai émigré à Trois-Rivières pour poursuivre mes études et changer d’air. J’avais déjà en poche en arrivant en 2019 une licence (équivalent du bac québécois) dans les métiers du livre et de l’édition. J’ai commencé plusieurs programmes, pour finir au DESS en communication sociale à l’Université du Québec à Trois-Rivières dont j’ai diplômé au mois de juin dernier. Depuis, j’attends.
J’attends quoi précisément ? J’attends que ma demande de permis de travail post-diplôme (PTPD) soit traitée par les autorités compétentes. Nous sommes le 28 janvier, et depuis plus de six mois, j’attends. Pourtant, je n’ai pas tardé pour faire ma demande, j’ai bien suivi tous les délais, dans le bon ordre ! Pourtant également, j’ai bien un emploi, ici au journal Zone Campus, à titre de cheffe de pupitre, de rédactrice (chroniqueuse) et de journaliste. Pourtant aussi, je participe à la société, je suis intégrée dans ma ville, j’ai un entourage, des amis, un logement décent, une belle famille, des projets. Mais malgré cela, j’attends.

Tout un processus
Pour ceux qui se demandent quel est le processus pour venir étudier puis travailler au Québec, le voici (du moins, entre 2019 et 2024):
- Il faut commencer par faire comme n’importe quel autre étudiant la demande d’admission dans un programme à temps plein auprès de l’université visée.
- Si l’admission est validée, il faudra alors faire une demande au provincial d’un Certificat d’Acceptation au Québec (CAQ), environ un an avant la date prévue du début des études envisagées. Il a une date de validité d’environ la durée estimée des études.
- Une fois reçu, il s’agit alors de faire une autre demande auprès du fédéral cette fois-ci d’un permis d’études. Sa durée correspond ou avoisine celle du CAQ et de la durée d’études indiquée sur la demande d’admission universitaire.
Si tu prends plus de temps pour compléter ton programme, peu importe la raison, ou si tu te réorientes, ou si tu es mal orienté et conseillé, et que tout cela te prend plus de temps que prévu par ton CAQ et ton permis d’études, il va falloir nécessairement et avant l’expiration refaire tout le processus précédant: cela va prendre entre deux semaines et quatre mois, de mon expérience personnelle. Et encore, cela peut parfois prendre encore plus de temps.
Lorsqu’enfin tu es recommandé au diplôme, il faut que tu aies déjà anticipé, et présenté ta demande de permis de PTPD deux à trois mois avant le moment où il est estimé que tu vas diplômer. Autrement dit, tu n’as pas encore ton diplôme assurément dans ta poche que tu dois déjà faire une demande pour la suite. Et celle-ci ressemble à celle pour étudier: provincial, fédéral, Saint-Graal. La petite twist cette fois-ci, c’est qu’en cas de permis d’études valide, tu es autorisé à travailler en attendant d’avoir une réponse, grâce à une autorisation provisoire répondant au doux nom de PT-PROR (Permis de travail… non, moi non plus, je ne sais pas bien à quoi les autres lettres font référence).
«(…) selon la première éventualité »

Pour écrire cette lettre ouverte, j’ai cherché à savoir ce que voulait dire exactement PT-PROR. Non seulement je n’ai pas trouvé, mais j’ai été encore plus confuse que ce que j’ai pu être ces derniers mois à cause de ce que j’ai trouvé: sur le site de l’IRC (Immigration, Réfugiés, Citoyenneté), il est possible de lire que ladite date dite d’expiration est là pour « aide[r] à dissiper les préoccupations [des employeurs, NDJ] à l’égard de votre statut et de votre autorisation à travailler au Canada».
«Votre lettre comporte automatiquement une date d’expiration fixée à 180 jours après la date de réception de votre demande.»
Aider à dissiper les préoccupations… Oui d’accord, mais pas vraiment, puisqu’en l’occurence, je tombe sur ce texte-là en suivant ma propre demande, mais l’article d »IRC s’intitule bien «Prolongation de votre permis ou modification de ses conditions de séjour». Or, je ne demande pas une prolongation, mais bien une demande initiale.
Alors, quelle solution ?
Ce faisant, quelle solution a-t-on concrètement face à toutes ces démarches, ces écrits qui se contredisent, et ma lettre du gouvernement qui me dit que je dois cesser de travailler à cette date ? J’ai passé de nombreuses heures à écrémer les articles gouvernementaux, à essayer d’avoir du retour d’expérience dans les groupes consacrés aux démarches d’immigration, j’ai sollicité le service aux étudiants internationaux de l’université, j’ai soumis le fameux formulaire de contact de l’IRC… La seule autre option qui s’offre à moi, et à nous en tant qu’équipe, c’est de solliciter l’aide du député provincial. Et d’attendre. Demain, nous écrirons donc au député, mais en attendant, et jusqu’à réception d’un vrai et franc feu vert, mes fonctions seront toutes suspendues.
Je laisse donc un bureau vacant avec une fonction remplie, je laisse à ma rédactrice en chef et mon directeur général des tâches que d’ordinaire, j’assume. Je laisse donc dans l’incertitude un emploi qui me ravie, sans savoir si je vais le retrouver, et pour mes supérieurs, sans savoir s’il faut me remplacer.
Mais sinon, on attend.