L’humain approximatif: Les étudiants invisibles

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Photo: Mathieu Plante
Photo: Mathieu Plante

L’Université du Québec à Trois-Rivières a accueilli à l’automne 2016 un total de 858 étudiants internationaux. Je veux m’assurer qu’ils ne deviennent pas invisibles.

Pour les besoins de la cause, je m’inspire de Montaigne et de ses Lettres persanes. Je vais donc m’effacer derrière le dialogue pour laisser la tribune à ces étudiants invisibles. Leurs voix méritent d’être entendues. Je me suis donc entretenu avec deux étudiants. Le premier est issu de l’immigration (traditionnelle), le second est passé par le programme d’étude internationale. Ce programme est un précieux moteur d’échanges culturels et intellectuels. De plus, les étudiants qui passent par ce projet peuvent choisir de s’établir.

Le gouvernement est conscient de l’importance de la venue d’étudiants étrangers. L’apport culturel et le niveau d’expertise des diplômés sont les principaux intérêts. En Mauricie, c’est l’organisme Innovation et Développement économique Trois-Rivières (IDE) qui a pour mission d’attirer ces étudiants dans notre région. Scolarisés et bilingues, ils deviennent des candidats de choix pour l’immigration canadienne. Considérant que le taux d’accroissement démographique est de 1,2%, les étudiants internationaux sont un atout pour notre société (Statistique Canada).

Fred

Le premier étudiant est au Québec depuis 30 ans. Venu de France, Fred est fier de ses origines espagnoles et algériennes. Arrivé à Pointe-du-Lac à l’âge de 8 ans, il était une attraction à l’époque. L’immigration est un phénomène qui a pris de l’ampleur depuis. En plus de compléter une maîtrise en études québécoises, Fred s’implique dans différents comités universitaires. Le Canada est un pays stable avec de meilleures perspectives d’emplois que dans bien d’autres pays. Pour Fred, l’intégration des nouveaux arrivants passe par le dialogue entre les différentes communautés, l’éducation et le travail.

L’UQTR est une excellente plateforme à l’intérieur de laquelle on retrouve tous ces éléments. Mais malheureusement, il y a des lacunes au sein du programme d’études étrangères. La plus grande est probablement le manque de moyens : «Il faut que les étudiants soient mieux accompagnés, la bureaucratie est lourde et ils se perdent dans la paperasse administrative. Ils ont besoin d’une assistance supplémentaire», affirme Fred.

Amine

Le second étudiant est originaire du Bénin. Il complète une maîtrise en comptabilité. Comme toutes choses dans la vie, il y a du bon et du mauvais. Commençons par les bons côtés d’étudier à l’UQTR. Pour Amine, la souplesse des programmes et de la cote est un atout majeur. On peut ainsi changer de programme ou s’inscrire à des cours hors programmes avec une certaine aisance. L’UQTR offre une panoplie de service à ses étudiants: soins chiropratiques, kinésiologie, support psychologique, etc. L’accès au CAPS et à la garderie est aussi très apprécié.

Il y a malgré tout, des points moins positifs à son avis. Premièrement, les examens de fin de session au deuxième cycle devraient être composés par le professeur titulaire. On éviterait ainsi les conflits d’intérêts entre les professeurs et les étudiants, principalement lors des révisions de notes. Deuxièmement, la présence d’examens à répondre par vrai ou faux est contre-productive. La méthodologie et la pédagogie devraient plutôt être orientées sur la réflexion et le développement du raisonnement. La dissertation argumentative est le meilleur outil pour cela. D’ailleurs, risquer sa session et ses prêts et bourses sur des vrais ou faux est stressant et aberrant.

Risquer sa session et ses prêts et bourses sur des vrais ou faux est stressant et aberrant.

Troisièmement, plusieurs membres du personnel sont déconnectés de la réalité des étudiants étrangers et de leurs expériences. À ce sujet Amine déclare: «L’UQTR n’est pas un établissement isolé, il y a des gens de partout dans le monde, du Canada, d’Asie, d’Afrique. Chaque individu apporte son expérience pour enrichir celle des autres. L’enseignant doit toujours garder cette idée en tête pour éviter que la classe ne tombe pas dans une sorte de totalitarisme intellectuel.»

Amine conclue notre entretien: «Au final, ce que les étudiants souhaitent, c’est d’être diplômés et d’accéder le plus rapidement possible au marché du travail.»

Mal informée sur ses assurances octroyées par Desjardins, elle hérite d’une dette de 100 000$.

Le défi pour ne pas devenir invisible

Intéresser les étudiants à venir étudier au Québec et à peut-être même rester par la suite est un défi à relever. Pour cela, les instances devront s’intéresser aux difficultés que les élèves rencontrent. D’abord, plusieurs doivent occuper des emplois à faible salaire. Additionnés à l’éloignement, beaucoup décident de retourner chez eux. Ensuite, la socialisation est un autre obstacle. Dans un article datant de quelques années, on apprenait que 50% des étudiants étrangers affirmaient n’avoir aucun ami canadien. Ultimement, ces gens qui viennent étudier chaque année dans nos institutions, que ce soit au niveau professionnel, collégial ou bien universitaire, doivent prendre connaissance du fonctionnement de notre système. Pour cela, ils ont besoin d’aide, car il n’est pas aisé d’apprendre tout le modus operandi d’un pays étranger. On retrouve alors des cas, comme celui d’Awa Cheikh Diop. Cette étudiante, d’origine sénégalaise, a dû être hospitalisée pour une grossesse prématurée. Mal informée sur ses assurances octroyées par Desjardins, elle hérite d’une dette de 100 000$ (Radio-Canada.ca).

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