Le 1er octobre prochain marquera la tenue d’élections générales au Québec. En cette avant-veille électorale, le journal Zone Campus propose ici un bref portrait de la militance politique à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Conviction et engagement s’incarnent au rythme des aléas de la vie universitaire.
Si l’université forme des individus à occuper une place sur le marché du travail, elle est aussi un lieu où les idées prennent forme, où des citoyen.ne.s développent un esprit critique. En ce sens, l’espace universitaire est un endroit propice au débat. La grève étudiante de 2012 a d’ailleurs été un moment de réflexion collectif d’une rare intensité. Il faut sans doute remonter au référendum de 1995 sur l’avenir politique du Québec pour trouver pareille mobilisation de l’opinion publique.
Or, militance et engagement ne vont pas automatiquement de pair avec participation électorale. Une étude de la Chaire de recherche sur la démocratie et les institutions parlementaires de l’Université Laval, datant de 2016, démontre que la participation électorale des jeunes de 18-34 ans est en déclin depuis une trentaine d’années. Ce groupe d’âge est le plus passif lorsque vient le temps d’aller voter. L’étude, qui se penche sur les disparités régionales, ne relève toutefois pas les nuances à l’intérieur d’un même groupe d’âge. Nous sommes allés à la rencontre d’étudiant.e.s impliqué.e.s en politique pour avoir leur son de cloche.
«Je veux changer les choses, je veux changer le monde, ça ne se fait pas en restant assise chez nous à ne rien faire.» — Christine Cardin
Conciliation
La politique, tout comme les loisirs, le travail, la vie familiale, sociale ou amoureuse, est objet de conciliation dans la vie des universitaires. À l’instar de tout le reste, les limites sont ici celles que l’on veut bien s’imposer. «J’ai des cernes en ce moment», illustre Valérie Deschamps. L’étudiante au baccalauréat en histoire et militante indépendantiste est beaucoup sollicitée par la période difficile que traverse actuellement le Bloc Québécois, où elle s’implique. Celle qui tente d’équilibrer son quotidien entre ses études à temps plein, un emploi dans le monde communautaire et une vie de militance, souligne que «la cause» pourrait facilement l’accaparer à temps «plus que plein».
Politique active
Christine Cardin, qui termine un baccalauréat en psychologie, envisage pour sa part de se porter candidate à l’investiture pour Québec solidaire dans la circonscription de St-Maurice-Laviolette, en vue du scrutin d’octobre. «Toutes les décisions qui se prennent au gouvernement ont un impact direct dans nos vies, pour moi de ne rien faire et de laisser les autres décider pour nous est un non-sens», fait valoir l’étudiante à temps plein et mère monoparentale de trois enfants. Elle dit faire de la politique active par pur idéalisme: «Je veux changer les choses, je veux changer le monde, ça ne se fait pas en restant assise chez nous à ne rien faire», synthétise-t-elle.
L’étudiant en au baccalauréat en administration des affaires au campus de Drummondville, Kevin Paquette, milite de son côté à la Coalition avenir Québec (CAQ). Président de la Commission de la relève de la CAQ, Kevin milite depuis 2012, il a alors 15 ans. «Je ne viens pas d’une famille particulièrement politisée, mais la grève étudiante de 2012 m’a amenée à me questionner sur la société dans laquelle je voulais vivre», relate-t-il. Il dit avoir trouvé à la CAQ des valeurs qui le rejoignent. Sans exclure l’idée d’un jour se porter candidat, Kevin travaillera davantage sur le terrain lors du scrutin d’octobre prochain. Ses fonctions de président de l’aile jeunesse l’amèneront à encadrer les candidat.e.s de moins de 40 ans.
«La grève étudiante de 2012 m’a amené à me questionner sur la société dans laquelle je voulais vivre.» — Kevin Paquette
Quand les circonstances s’y prêtent
Pour Olivier St-Germain, qui en est à son stage de fin d’études au baccalauréat en communication sociale, «ça dépend vraiment du temps que l’on a à mettre». Le militant péquiste dit observer la situation actuelle avec un peu de recul. «Avec mon stage, je n’ai vraiment pas le temps et en plus je viens de participer aux Jeux de la communication», explique-t-il.
Olivier avait tenté de former un groupe de jeunes militant.e.s péquistes à l’UQTR il y a quelques années. «À notre événement de fondation, on avait eu Véronique Hivon qui était venue faire un discours», se remémore-t-il. Il dit toutefois avoir perçu une certaine frilosité du côté des autorités universitaires sur la nature de leurs activités: «On avait invité Paul St-Pierre-Plamondon et ça avait été plus difficile», relate-t-il. Le groupe politique s’était finalement dissous avant de prendre pleinement son envol.
C’est le manque de sentiment d’appartenance politique qui fait davantage obstacle dans le cas de Valérie Deschamps. L’étudiante engagée se dit d’abord et avant tout militante indépendantiste. Impliquée à Option nationale, Valérie digère mal la fusion de son ancien parti avec Québec solidaire. «Si les élections avaient lieu aujourd’hui, je ferais un dessin sur mon bulletin de vote», image-t-elle. Le vote stratégique n’est pas non plus une option: «je vote selon mes convictions», affirme celle qui se dit orpheline politique.
«La politique s’inscrit dans le cadre plus large de la vie étudiante, ce qui fait aussi partie du projet universitaire.» — Martin Lambert
Vincent Stril, président des Jeunes libéraux de la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec et étudiant en management à HEC Montréal, mentionne pour sa part ne pas avoir de club organisé à l’UQTR. C’est au sein de ces clubs que les militant.e.s du parti unissent leurs efforts dans certaines universités du Québec. Les jeunes militant.e.s mauricien.ne.s du parti travaillent en partenariat avec ceux et celles du Centre-du-Québec, précise-t-il.
Cadre institutionnel
L’université est un lieu apolitique, ce qui ne veut pas dire que les activités politiques y sont proscrites. Martin Lambert, conseiller aux activités étudiantes, soutient: «la politique s’inscrit dans le cadre plus large de la vie étudiante, ce qui fait aussi partie du projet universitaire».
Bien que l’UQTR ne dispose pas de réglementation explicite encadrant les activités politiques, aucune forme de sollicitation n’est cependant tolérée, précise le conseiller. «Il y a une marge entre faire valoir des idées et vendre des cartes du parti, tout est dans la manière», nuance celui qui autorise ultimement, ou pas, les projets qui lui sont soumis. Lors du dernier scrutin fédéral, le parti conservateur du Canada s’était ainsi vu refuser l’organisation d’un rassemblement qui visait clairement à recruter des membres, selon monsieur Lambert.