
Le Centre d’exposition Raymond-Lasnier de la Maison de la culture de Trois-Rivières a confié son espace au Montréalais Simon Beaudry, ainsi qu’à l’ancien étudiant de l’UQTR François-Matthieu Bouchard. Bien qu’aux antipodes, leur propos et leur démarche se rejoignent par la sculpture installative. Nouvelles technologies, hybridité, performance, ready-made pour l’un et impression 3D pour l’autre: les deux univers offrent deux voyages bien différents.
Le spectateur est accueilli dans la salle d’exposition par une petite statuette représentant une icône religieuse entaillée dans la poitrine, d’où s’écoule du sang dans une chaudière. Juste à côté trône un pot de sirop d’érable transparent, dans lequel se trouvent des poils de barbe. Ces surprenantes installations annoncent le ton de la recherche identitaire québécoise, qui est omniprésente dans l’ensemble de l’exposition de Beaudry.
L’artiste multidisciplinaire souligne que sa pratique est en mutation, puisqu’il tend à explorer de nouveaux médiums. Fort d’une expérience de performance, où la rencontre avec le spectateur dans l’espace public est importante, l’artiste montréalais se dit enclin à exploiter davantage cette voie. Entre vidéos, impressions numériques et sculptures, Simon Beaudry s’inscrit aisément dans le style urbano-contemporain. Sa grande distinction est son attachement à un propos ouvertement politique. Rares sont les artistes qui prennent position.
Sa grande distinction est son attachement à un propos ouvertement politique.
Tout en citant Claude Gauvreau et en s’inspirant d’Armand Vaillancourt, Beaudry se plait à inventer des fictions à partir d’images tirées de la réalité. C’est ce qu’il a fait avec des archives de Radio-Canada, pour recréer une fausse nouvelle qui met en scène l’une de ses performances. Comme certaines de ses œuvres, celle-ci demande à connaître l’anecdote derrière. Ce n’est pas un énorme défaut, mais l’explication bonifie toutefois l’appréciation de ce photo-roman.
Le panneau de signalisation, placardé au mur à la manière d’un ready-made, vient aussi avec une histoire particulière. L’artiste engagé avait collé une fleur de lys et une d’érable sur trois poteaux dans la ville de Montréal. Ces interventions légèrement désobéissantes référaient aux deux solitudes. Alors qu’il circulait à vélo, il a aperçu ce panneau, qui avait été renversé à la suite d’une collision. C’est donc ce poteau qui se retrouve dans le centre d’exposition.
Beaudry reprend le mythe de la Chasse-Galerie dans une vidéo ludique et fort crédible. Un ciel nuageux est filmé à travers le hublot d’un avion. Au loin, le bateau de la Chasse-Galerie est visible, toutes rames pagayant. L’illusion est parfaite.

Une autre vidéo reprend les images de deux attentats politiques. Les images de Pauline Marois, qui sort abruptement de la scène du Métropolis, dialoguent avec celles du caporal Denis Lortie, assis dans la chaise du Président de l’Assemblée Nationale, mitraillette à la main. C’est d’autant plus troublant que plus tôt cet automne, les deux causes ont été comparées par un avocat.
Les œuvres conduisent à un recueillement, laissant le regard se déplacer comme le glissoir de la fermeture éclair.
La salle réservée à François-Matthieu Bouchard était beaucoup plus épurée que la précédente. Le calme tamisé de son exposition repose du tumulte qui parcourt la première section. Ses impressions 3D en plastique biologique représentent des fermetures éclair, rappelant des épines dorsales.
Les œuvres proposent l’échine de la création, la manière qu’ont les idées de naître et de circuler. Certaines impressions sont petites, et d’autres occupent un espace grandiose. Les œuvres conduisent à un recueillement, laissant le regard se déplacer comme le glissoir de la fermeture éclair. La disposition dans le grand espace permet un parcours sinueux, tout comme les prises de décision qui marque les choix de la création.
Véhicule et Sclap de Simon Beaudry et Méandres de François-Matthieu Bouchard sont présentées jusqu’au 8 janvier 2017.