Cinéma d’aujourd’hui: Coups de cœur des années 2010

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Pour ce dernier tirage du Zone Campus avant la prochaine année scolaire, j’ai choisi de présenter deux films qui ne sont pas de la dernière année, mais qui méritent absolument d’être vus. Bon cinéma.

Her

«How do you share your life with somebody?»

Réalisée et écrite par Spike Jonze, Her (2013) est une histoire d’amour profondément touchante de laquelle on ressort le cœur gros et les idées un peu embrouillées. En remaniant plusieurs présupposés de la relation à l’aide d’un exemple singulier (un homme qui tombe amoureux d’une femme virtuelle), Jonze invite à retourner aux bases mêmes du sentiment amoureux et à questionner les balises trop souvent limitantes placées autour de lui.

D’un scénario simple, mais méticuleux (ce qui s’observe dans l’évolution patiente du récit), l’œuvre offre en réponse aux questionnements amoureux d’aujourd’hui un message frappant de simplicité, qui est d’aimer sans réserve ce qui doit être aimé sans réserve. Ainsi, tout en faisant réfléchir sur les principes un peu figés du «couple» et de la «relation», le film lance un appel criant à l’amour sincère vécu au-delà des conventions et du jugement des autres. On ne saurait en ce sens tarir d’éloges cette œuvre qui parvient avec beaucoup de chaleur à ramener l’homme au véritable sens de son expérience sociale, c’est-à-dire sa volonté de rencontrer et d’aimer l’autre pour ce qu’il est vraiment.

Pour mettre en forme ce message, Jonze a pu compter à la fois sur une musique riche en émotions (orchestrée par Arcade Fire) et sur une distribution qui excelle en tous points. Joaquin Phoenix, dans le rôle de Theodore, est tout simplement remarquable par sa capacité à transmettre la vulnérabilité de son personnage lors de scènes de grande intimité, lui qui doit composer seul avec la voix de Scarlett Johansson (Samantha dans le film). Alors que l’œuvre accumule les dialogues «taie d’oreiller», la mobilité du jeu de Phoenix et de Johansson parvient sans mal à créer l’intérêt nécessaire pour éviter les longueurs, tout en fournissant une tendresse et une complicité dont on ne peut que rester jaloux.

C’est donc un film aux nombreuses réussites que ce Her, film dont on conserve immanquablement la marque plusieurs jours (voire plusieurs mois) après son visionnement. Que l’on soit célibataire endurci, en couple ou en plein milieu d’une peine d’amour, pas d’excuses, il faut le voir au plus tôt.

Life of Pi

«Go on home I’ll leave you alone. I’ll respect that, I promess.»

Adaptation du bestseller de Yann Martel, Life of Pi (2012) est un film d’une beauté visuelle rarement atteinte au cinéma. Présentant l’odyssée d’un adolescent pris en pleine mer avec un tigre, le film offre un rite initiatique empreint de réflexions sur la spiritualité et sur l’épreuve de la foi.

Il faut le dire, si l’histoire et les réflexions soulevées dans l’œuvre ont leur intérêt (surtout en ce qui concerne la complémentarité des religions), ces dernières s’avèrent plutôt accessoires à côté des bombardements de lumière, des panoramas sublimes et des effets visuels célébrant les forces de la nature tout au long du film. Tirant parti de chaque scène comme s’il s’agissait de tableaux vivants, la direction photo multiplie les coups d’éclat tout en sachant continuellement renouveler son exploitation esthétique de la mer, du ciel et de la vie sauvage. Alliant ainsi ingéniosité et technologie de pointe, le film engendre une expérience d’exception que l’on voudrait deux fois plus longue, si les moyens avaient pu le permettre.

Centrée sur les interactions et la cohabitation difficile entre Piscine et Richard Parker (le tigre), l’œuvre ouvre qui plus est une fenêtre privilégiée sur la vie naturelle, offrant au spectateur une sorte de transe lui permettant de prendre contact avec sa propre nature perdue. Ce type de voyage, dosé habilement par la réalisation et le scénario pour ne pas verser dans un message clinquant et sans saveur, encourage au contraire à rouvrir de façon plus profonde et plus personnelle les considérations que l’on peut avoir sur la vie et sur la foi, au-delà des dogmes et de la dénonciation des dogmes. Le film offre ainsi une réflexion des plus pertinente autant pour les croyants affirmés que pour les athées convaincus.

Si le passage du roman au grand écran entraine souvent le pire, Life of Pi est au contraire une preuve que le film peut à l’occasion ajouter à la valeur du livre, si le tout est fait intelligemment et avec beaucoup de soins. À en frissonner encore au moment d’écrire ces lignes, je ne peux que vous enjoindre à ajouter immédiatement cette œuvre sur votre liste de visionnements obligés.

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D’autres coups de cœur des années 2010:

Beasts of the Southern Wild de Benh Zeitlin (2012; Introduction prodigieuse et personnages vivants)

Lincoln de Steven Spielberg (2012; Interprétation puissante de Daniel Day-Lewis)

Whiplash de Damien Chazelle (2014 – Film au rythme soutenu et jeu parfait pour J.K. Simmons)

Et pour des films de répertoire sur grand écran ici même à Trois-Rivières, visitez le Cinéma le Tapis Rouge (www.cinemaletapisrouge.com).

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