Cinéma d’aujourd’hui: Maps to the stars / Ceci n’est pas un polar

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Maps to the stars

«I’m not used to glamour.»

Reconnu pour ses explorations de la psyché humaine, David Cronenberg nous sert avec Maps to the stars une œuvre qui marque par la qualité de ses atmosphères et par l’étrangeté de son traitement. Critique mordante des vedettes d’Hollywood, le film présente avec très peu de retenue les laideurs qui accompagnent la recherche absolue du succès.

Parce qu’il est un parcours tortueux au sein de l’hypocrisie, de l’envie et de l’égoïsme, Maps to the stars s’inscrit parmi les œuvres dont on apprécie la différence tout en la subissant. En ramenant la vie pulsionnelle des personnages à l’avant-plan, Cronenberg parvient à créer un univers à la fois envoûtant et sale, laissant une impression vague d’hypnose. Du film, on ne retient donc pas particulièrement la trame narrative plus que son «poids», ce qui nous rappelle à la nécessité d’explorer nos propres affects et nos propres parts d’ombre.

Pour parvenir à cet effet, le réalisateur a su tirer parti du jeu des acteurs tout en maîtrisant les codes du drame psychologique. Dans les rôles d’Havana Segrand, d’Agatha Weiss et de Benjie Weiss, Julianne Moore, Mia Wasikowska et Evan Bird font preuve d’une constance et d’une modération (même pour le rôle énorme d’Havana) qui assurent le rapprochement avec le spectateur. Julianne Moore occupe évidemment l’avant-scène tout au long du film par la qualité exceptionnelle de sa prestation, en répondant avec beaucoup de justesse au défi de son personnage qui est d’être à la fois monstrueux et attachant.

Par l’utilisation d’épisodes de déréalité combinés à des tableaux très réalistes (l’utilisation de noms réels est à ce niveau tout à fait appropriée), la réalisation réussit à plonger le spectateur au cœur même des états et des tourments que traversent les personnages sans verser dans l’exagération ni dans la simple recherche du malaise pour le malaise (sauf peut-être vers la fin où la tragédie devient extrêmement saturée). À ce niveau, la signature de Cronenberg est palpable et les amateurs y trouveront de quoi se sustenter. En son genre, le parcours serait en fait presque sans faute si ce n’était de la pauvreté de la réalisation lors des scènes d’«action» (la crise dans la famille, la scène avec le fusil, la frappe avec le trophée et l’incendie). En cherchant à retransmettre une réalité crue, la réalisation suscite au contraire une fausseté presque risible, grandement amplifiée par la carence des effets spéciaux.

Maps to the stars incarne à plusieurs égards ce qui fait l’intérêt des films indépendants, par la particularité du regard et du langage cinématographique. À condition d’être abordée comme une expérience, l’œuvre saura plaire à un large éventail de spectateurs, même s’ils n’en seront peut-être pas eux-mêmes immédiatement convaincus.

Ceci n’est pas un polar

«J’te demande juste de me dire si est clean

Premier film de Patrick Gazé, Ceci n’est pas un polar n’est pas vraiment un polar mais demeure quand même (et surtout) un polar. Jouant sur les deux tons (polar et comédie romantique), le film donne une certaine fraîcheur aux deux genres tout en ne se démarquant pas ni dans l’un ni dans l’autre.

Le film se divise en deux grandes orientations: il retrace le parcours amoureux d’André Kosinsky (Roy Dupuis), chauffeur de taxi de 50 ans en procédure de divorce, qui entame une relation ambiguë avec Marianne (Christine Beaulieu), tout en présentant l’enquête que mène André pour en apprendre davantage sur le passé obscur de sa nouvelle compagne. Le mélange des genres est ici réussi, offrant un film cohérent plutôt qu’une alternance décousue de tableaux. À ce niveau, Patrick Gazé fait preuve d’un travail intelligent qui traduit une bonne connaissance des deux genres comme du cinéma en général.

Stimulant intellectuellement, le film est du reste assez commun dans son contenu. Hormis la scène de la «première fois» entre les deux protagonistes (absolument délicieuse), certains échanges bien tournés (entre André et sa sœur mourante, notamment) et quelques clins d’œil qui font sourire (les contraventions, la chatte), le film offre en vérité peu qui ne puisse être trouvé ailleurs, en mieux. Le dénouement de l’enquête se révèle au final assez simple, tout comme le dénouement de la relation amoureuse qui, bien qu’amusant, ne réinvente rien. Dans le rôle d’André, Dupuis est fidèle à lui-même en rendant son personnage accessible et foncièrement humain, ce que Beaulieu réalise avec plus de difficulté pour le personnage de Marianne.

Considéré comme un polar ou comme une comédie romantique, Ceci n’est pas un polar est un film confortable que l’on peut choisir quand l’envie nous prend de simplement écouter un film. Vu plutôt comme un exercice de style, Ceci n’est pas un polar constitue une œuvre qui vaut le détour et qui a le mérite d’aspirer à quelques touches de nouveauté.


Prochainement au Cinéma Le Tapis Rouge:

Les Combattants de Thomas Cailley (à partir du 14 novembre – Présenté à la Quinzaine des réalisateurs lors du Festival de Cannes 2014)

Pas son genre de Lucas Belvaux (à partir du 14 novembre – Adaptation du roman éponyme de Philippe Vilain)

Birdman d’Alejandro Gonzalez Inarittu (à partir du 14 novembre – comédie américaine mettant en vedette Michael Keaton, Emma Stone et Edward Norton)

 

 

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