Le mouvement étudiant vient de franchir une nouvelle étape. Pour la première fois en près de 20 ans, nous sommes en situation de dégel. C’est le pire cauchemar de certains et la fin d’un des chapitres les plus importants de l’histoire du mouvement étudiant pour la majorité. En imposant une indexation modulée à l’inflation, le gouvernement du Québec prend ses responsabilités auprès de la population et demande aux étudiants un effort de raison.
Le printemps érable est terminé. La hausse déraisonnable du gouvernement précédent a été annulée et le gouvernement de Pauline Marois a choisi la voie du dialogue et du compromis afin de réévaluer la contribution à demander aux étudiants universitaires.
L’indexation n’est évidemment pas l’issue idéale sur la question des droits de scolarité. Cependant, dans la position dans laquelle se trouve le Québec, le gel ou la gratuité représentent un luxe qu’on ne peut se permettre maintenant.
La réalité économique dans laquelle nous sommes n’est pas propice au gel ou à la gratuité. Dans une situation de déficit budgétaire, alors que l’on coupe dans la recherche et qu’on impose une taxe santé aux citoyens, il semble logique de demander aux étudiants d’en faire un peu plus. Cette contribution très modeste s’accorde également avec l’opinion publique qui a démontré à plusieurs reprises qu’elle désirait que les étudiants participent plus raisonnablement au financement de leurs études.
Rien n’empêche que dans quelques années, lorsque les finances du Québec iront mieux, nous puissions renégocier notre contribution avec le gouvernement. Cependant, il faut savoir accepter le compromis lorsque celui-ci s’offre à nous et choisir les batailles que l’on peut gagner. Soulignons d’ailleurs une victoire importante des étudiants lors du Sommet, avec la promesse faite par le gouvernement de se pencher sur le cas des frais institutionnels obligatoires, une tare de la facture universitaire sur laquelle il faut absolument s’attarder.
L’équité
D’une certaine façon, l’indexation s’avère plus équitable que la gratuité. En effet, elle représente un réajustement en dollars constants qui se marie avec un réinvestissement considérable dans le programme de prêts et bourses ainsi qu’un rehaussement du seuil de contribution parentale dans le calcul de ce programme. Cela aidera à rendre l’université encore plus accessible à tous.
Ne l’oublions pas, le programme des prêts et bourses est ce qui rend notre système équitable entre les étudiants issus de familles plus riches et ceux venant de familles plus pauvres. Les plus fortunés sont appelés à contribuer aux études de leurs enfants et les plus modestes ont accès à un support considérable venant du gouvernement.
Encore une fois, il ne s’agit pas d’un système parfait. Certains accuseront les institutions financières de s’enrichir, mais pour les plus pauvres d’entre nous (dont l’auteur de cette chronique a malheureusement fait partie), il s’agit d’un support nécessaire et grandement appréciable. Non seulement pour payer sa facture universitaire, mais aussi pour se loger et se nourrir.
Dans un autre ordre d’idées…
Le Sommet n’a pas été un exercice futile. Outre les droits de scolarité, le fonctionnement des universités a aussi scruté à la loupe. D’ailleurs, un nouveau Conseil des universités et la création d’une loi-cadre sur la gouvernance ont émergé de ce Sommet. Les recteurs comprendront qu’ils n’ont pas carte blanche en ce qui concerne la gestion. Il est vrai que les universités ne sont pas des sociétés d’État, mais il reste qu’il s’agit tout de même du denier public dont il est question ici. D’ailleurs, les étudiants seront plus impliqués dans l’organisation de leurs instituons.
Soulignons par contre une très grande déception issue de ce Sommet : le manque flagrant de financement de nos universités et le peu d’ouverture de la part du gouvernement à aborder les questions de la recherche et de la qualité des programmes. Il s’agit d’une réalité sur laquelle il faudra se pencher lors des chantiers de travail ainsi que lors des prochaines rencontres ce printemps.
En somme :
Lorsque l’on y pense, plusieurs des chantiers que le gouvernement met en place au lendemain du Sommet concernent des préoccupations et des revendications des étudiants. L’adaptation des prêts et bourses, la gestion des universités et les orientations de celles-ci ont toutes déjà été relevées par les fédérations étudiantes ainsi que d’autres associations étudiantes et civiles. Le gouvernement a accepté de revoir le milieu des études supérieures et d’en améliorer certains aspects. Évidemment, ces nouvelles mesures ont un prix pour les étudiants : l’indexation.
L’indexation risque fort d’être entérinée par la FEUQ, la FECQ et la TaCEQ. Personne, sauf l’ASSÉ, ne souhaite revivre les périodes troubles du printemps passé. Il faut en venir à l’évidence : nous sommes en bien meilleure posture qu’à la même date l’an passé. Ne serait-il pas temps de mettre un peu d’eau dans notre vin?
L’AGE UQTR a une position très ambivalente concernant les droits de scolarité en refusant toute modification à ceux-ci sans la tenue d’États généraux. Il serait intéressant de se demander si cette position a toujours sa place dans la nouvelle réalité post-Sommet. Il serait peut-être souhaitable de demander l’opinion de nos membres concernant la nouvelle réalité des droits de scolarité et peut-être réévaluer notre position face à ceux-ci. Chose certaine, cela doit se faire de la façon la plus démocratique qu’il soit, avec une pluralité de membres et de voix, pas à 72, un mardi après-midi.