Philippe de Grosbois enseignant de sociologie et membre de la revue À bâbord!, a écrit de nombreux articles sur les médias et le numérique et a deux publications chez Écosociété. Il est aussi militant syndical dans une perspective de justice sociale et d’une plus grande démocratie[1]. Voici donc une critique de son livre : « La collision des récits. Le journalisme face à la désinformation. »

« Épistémologie : ce qui nous permet, à une époque donnée, de considérer qu’une affirmation soit vraie ou fausse. »
La collision des récits est l’interprétation d’un chaos d’informations diversifiées, disséquées par Philippe De Grosbois. Selon lui, le journalisme vit une époque de transition où, sociologiquement et politiquement, plusieurs forces d’attraction se disputent le pouvoir. Une époque où il serait temps de changer nos méthodologies de communications, de revoir nos intentions afin d’agir en pleine conscience, pour une société nouvelle.
« […] une valse macabre entre la froide rationalité néolibérale, qui vient écarter de manière autoritaire toute sortie progressiste du système établi, et une réalité alternative construite dans le rejet de plus en plus violent du monde empirique et des revendications de populations marginalisées. »
Philippe De Grosbois, dans La collision des récits. Le journalisme face à la désinformation.
De la propagande à une transition
Pour De Grosbois, à l’origine, les médias traditionnels sont nés de la propagande et encore aujourd’hui, certaines entreprises l’utilisent toujours, en plus de la collecte de données, la publicité visée, ou bien d’autres astuces pour nous rendre plus dépendants. L’analyse complète de l’auteur est très éclairante, d’autant plus qu’il apporte des pistes de réflexion sur l’utilisation saine de nos réseaux sociaux, et éviter qu’ils aliènent ou polluent notre quotidien.
Une adaptation express
Les médias sociaux sont devenus accessibles rapidement pour tous, devenant les champions de la désinformation. Ceux-ci jouissent d’un rapport à la formalité non nécessaire, ce que les médias traditionnels ne peuvent se permettre afin de rester dans la neutralité… Pourtant « démonisé », cet enjeu pourrait ouvrir davantage le dialogue et la collaboration entre journalistes et citoyens. Ainsi, le journalisme se positionne plus près de son public, enrichie la confiance mutuelle en restant toujours à l’affût de l’adversité médiatique.
« C’EST EN ÉTANT EN PHASE AVEC CE SENTIMENT CROISSANT DE CRISE QUE LE JOURNALISME PEUT ESPÉRER ENTRER EN PLUS GRANDE RÉSONANCE AVEC LA POPULATION. »
Philippe De Grosbois, dans La collision des récits. Le journalisme face à la désinformation.
Neutralité du journaliste, parfois mal placée…?
Le besoin qu’a l’humain de mettre des étiquettes permettant de distinguer « le vrai du faux, le fait de l’opinion, la vérité du mensonge, etc. » sont issus d’une approche scientifique qui a structurée et figée notre rapport au monde autrement que « par la seule spéculation philosophique ». Bien que l’approche soit adéquate pour le journaliste, le problème est le manque de nuance dans le choix des structures. La désinformation se trouverait plutôt au cœur de la recherche et des démarches et non pas dans l’opinion de l’auteur. Pour cela, la démarche du journaliste se doit de rester objective, impartiale et exhaustive [indépendamment de son point de vue], pour donner le choix au lecteur de la perception du sujet analysé.
« L’importance de sonner vrai »
En effet, je constate qu’il serait hypocrite d’afficher une parfaite neutralité. Assumer ses opinions sans les déguiser derrière des faits en disant que l’intention est d’en extraire la vérité pure semble utopique! Incrustée à travers toutes institutions, la désinformation est partout autour de nous. Je crois que c’est aussi notre rôle et en tant qu’étudiants.es de « reprendre le contrôle de nos espaces [numériques] d’interaction et d’échange ».
L’approche de ce livre est une inspirante alternative à des perspectives nouvelles de nos comportements en société, à des outils pour élever notre conscience collective et enfin à se défaire de vieux dogmes bien ancrés dans nos médias d’information.
Les analyses de l’auteur sont d’une étonnante simplicité, suggèrent un acte d’engagement éclairé et personnel dans sa communauté et surtout, accessibles à tous.
[1] https://ecosociete.org/livres/auteures/philippe-de-grosbois