
Marie-Josée Plouffe n’a pas d’âge. Elle a le cœur de l’enfant de 5 ans, la fougue de l’adolescente et la sagesse de l’ainée. Elle porte en elle un inspirant mariage de sensibilité et de force.
J’ai un grand respect pour cette femme, qui œuvre parfois comme une fourmi sous terre, sans qu’on ne le voie vraiment au grand jour. À première vue désordonné, son bureau est une bibliothèque de connaissances qui renferme mille trésors littéraires soigneusement rangés. Un chaos rigoureusement organisé, à l’image de celle qui y prend logis.
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Ayant grandi comme minorité visible dans le West Island de Montréal, Marie-Josée Plouffe doit sa droiture et son honnêteté à son père avocat. Quand on observe sa vie de près, on comprend aussi la grande influence de sa mère, infirmière de profession, qui a été aux prises avec l’ombre sournoise qu’est la dépression. Très jeune sensible à la santé mentale, Marie-Josée en fera plus tard le sujet de sa maitrise et de son doctorat.
Entrée dans le monde du théâtre
C’est en s’inscrivant en cachette aux auditions qu’elle fait ses études théâtrales dans la très contingentée formation du Collège Lionel-Groulx. Ces trois années intenses, où règne un régime presque militaire, sous l’épée de Damoclès des renvois annuels systématiques, lui rappellent le continuel et exigeant travail sur soi qu’elle a alors expérimenté.
Après ses études, elle commence à travailler comme comédienne dans le milieu montréalais, mais elle a besoin d’avoir «un discours sur sa pratique». Elle entame des études universitaires à l’UQAM en cheminement théorique et mise en scène. Elle s’était jusque-là toujours sentie comme la «bibitte» en décalage avec les autres, mais l’Université répondait enfin à sa soif de comprendre.
Changement de cap
À 28 ans, alors qu’elle tournait une publicité pour les Brownies de Vachon avec ce qui allait devenir la plupart du casting de Chambres en ville, elle se rend soudainement compte qu’elle veut changer de cap complètement et elle entame un retour aux études en génie mécanique… «Tu sais ce que ça veut dire?», lui a alors demandé son agente. Elle savait pertinemment que tous ses contrats se termineraient sur-le-champ. C’était une période de sa vie durant laquelle elle se cherchait beaucoup, entre des fréquentations presque dangereuses et des problèmes personnels.
C’est à ce moment qu’elle est appelée à animer un atelier de théâtre auprès de gens ayant de sévères troubles de santé mentale. Cette expérience déterminante dans la vie de Marie-Josée Plouffe est à la base de son enseignement valorisant d’aujourd’hui et de sa façon d’aborder les gens qu’elle croise. C’est la professeure qui permet à toutes personnes de travailler à son propre rythme.
En parallèle, elle vit une relation houleuse, de laquelle sont nés deux enfants, où un certain matin, il était temps de partir. Marie-Josée Plouffe se retrouve pratiquement à la rue et elle logera six mois dans un centre d’hébergement pour femmes. Après cette période de grandes réflexions, elle s’appropriera alors davantage sa vie, consciente que son histoire lui appartient désormais.
Malgré une grande noirceur, elle s’accroche à ses études et poursuit jusqu’au doctorat qu’elle décide de faire sur la pratique théâtrale des personnes handicapées.
Marie-Josée Plouffe n’a pas d’âge. Elle a le cœur de l’enfant de 5 ans, la fougue de l’adolescente et la sagesse de l’ainée. Elle porte en elle un inspirant mariage de sensibilité et de force.
Un bien long chemin
En 1996, elle fonde La Fenêtre, un centre d’immersion aux arts unique au Québec, qui offre un service d’ateliers d’art adaptés aux besoins spécifiques des personnes handicapées, tout en développant l’entraide et l’épanouissement personnel.
C’est en 2007 qu’elle appelle ses parents pour leur dire d’ouvrir une bouteille de champagne: elle obtient un poste comme professeure à l’Université du Québec à Trois-Rivières. C’est sincèrement là où elle a le sentiment de servir le mieux.
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C’est avec une générosité sans fin qu’elle me raconte sa vie en petites anecdotes finement cristallisées dans son cœur égratigné, comme de petites histoires, que j’écoute avec beaucoup de respect et de compassion.
La première fois que je l’ai vue, je n’ai pas tout de suite compris qui était celle qui donnait son cours en bas de laine. Désorganisée en apparence, lunatique personnage à la fois rigoureux et éclaté, Marie-Josée Plouffe est profondément une artiste dans l’âme et elle le restera, peu importe ce que la vie lui apportera.
Pour celle qui a cherché longtemps la lumière dans sa vie, le théâtre a été comme un guide qu’elle a suivi, à la manière d’Hansel et Gretel, lui faisant emprunter un chemin parsemé de petites lueurs.
Comprendre le parcours riche, parsemé d’ombres et de lumières, de la «Prof Plouffe» permet de saisir ce personnage à l’énergie de guerrière.
J’adore Marie-Josée! Quel professeur inspirante! Elle nous donne envie de nous dépasser semaine après semaine. C’est le premier cours que je suis à l’UQTR où je ne compte pas les semaines avant la fin de la session. Elle est presque fini et j’en suis la première étonnée! Je m’ennuie déjà de la « prof Plouffe »!
Il était temps que quelqu’un en parle ! Félicitation M. Lortie pour l’article, Marie-Josée est une personne qui mérite d’être connue, car elle connait sa matière tout en essayer de l’enseigner en utilisant différentes stratégies pédagogiques pour former les futurs enseignants en théâtre.