Changer la vie (5): Morale: Qu’est-ce que le bien? Le mal?

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Rien qu’entendre le mot «morale» a de quoi soulever le cœur le mieux accroché. Si je veux être lucide, je dois convenir que le terme a mauvaise réputation: c’est un mot rébarbatif, chargé d’un fort contenu négatif. Avons-nous raison de le tenir en aussi piètre estime? Malheureusement, oui! Nous vivons sur une morale empruntée. À qui? Aux civilisations agricoles d’il y a 3000 à 5000 ans, via l’Ancien Testament. Techniquement, nous sommes une nation industrialisée, mais moralement, nous sommes encore un peuple agriculteur. Exemple? Le code moral qui interdit le vol est celui d’une société féodale (oui, oui, même aujourd’hui: il suffit de regarder l’organigramme d’une université, d’une entreprise, d’un hôpital…) où les riches interdisent de voler, mais volent eux-mêmes… en toute légalité. Autre exemple? Certaines de nos valeurs comme la vie familiale, le rôle de la femme, la vie sexuelle, l’homosexualité, n’ont de sens que dans une économie agricole. Est-ce que les commandements, lois, codes, qui convenaient en ce temps-là peuvent convenir aujourd’hui?

Qu’est-ce que la morale? Dans une première étape, je pense qu’il est relativement facile de définir la morale comme «la science qui enseigne les règles à suivre pour faire le bien et éviter le mal.» Les problèmes surgiront à la deuxième étape lorsque viendra le temps de préciser: ces règles seront-elles d’origine divine? Ou humaine?

Le fondement de la morale? Kant a essayé de démontrer que la morale est autonome ou qu’elle n’est pas. Malgré ce qu’il en a dit, je pense que la morale est entièrement dépendante de notre conception de l’origine de l’univers. Si un Dieu a créé l’univers, et moi-même par extension, il est tout à fait en droit de m’imposer ses commandements… et, en créature soumise et reconnaissante, je n’ai qu’à prononcer un respectueux : Amen! Mais, si ce n’est qu’un mythe, c’est-à-dire un récit enfantin, cela ne donnera-t-il pas naissance à une morale enfantine? N’avons-nous pas avantage à revenir à la raison et à redécouvrir ce qu’est une morale adulte?

Morale enfantine

Traditionnellement, à la question: « D’où vient la morale? », on répondait qu’elle avait été donnée par Dieu. Et de fait, les normes éthiques de l’Occident sont celles du judéo-christianisme. Ce qui fait que la morale actuelle (chrétienne) est basée sur l’arbitraire (ce qui signifie: qui dépend du caprice, ici, d’un Dieu). Est-il possible d’avoir une morale stérile? Oui. Nous pouvons le constater: des Pharisiens de l’Antiquité aux faux jetons modernes, les gens qui ont perdu le sens de la «vraie» morale ne cherchent plus à se conduire honnêtement, mais à dissimuler leur conduite frauduleuse sous de belles paroles. Alors, quelles sont les caractéristiques d’une morale enfantine? Elle relève de la peur… que ce soit des parents, d’un Dieu vengeur, de l’enfer. Elle a également comme caractéristique les récompenses et les punitions. Enfin, elle est centrée sur la loi et l’obéissance. La morale chrétienne ne se retrouve-t-elle pas avec une note parfaite comme morale pour enfants?

Morale adulte

Sens moral. Faut-il descendre la morale du ciel? La séparer de la religion? Définitivement. Si l’exigence de la morale n’est pas inscrite en moi, elle n’est plus justifiée. La vraie morale est basée sur ce qu’est l’être humain avec son sens moral, ses émotions, sa raison. Qu’est-ce que le sens moral? Il consiste en ce que l’être humain sait, de connaissance immédiate (c’est-à-dire par expérience), qu’il doit faire le bien et éviter le mal. Autrement dit, chaque être humain doit répondre de toutes ses actions devant son tribunal intérieur. À partir du moment où j’agis selon mon sens moral, faire le mal volontairement ne m’est plus possible… sinon je me rendrais malheureux. Quelque chose me bouffera de l’intérieur: remords, culpabilité… si ce n’est ulcère, infarctus…

Qu’est-ce que le bien? Le mal? Le bien et le mal sont des notions tellement au cœur de la morale que, pour bien des gens, la morale se résume à ces concepts. Qu’est-ce que le bien selon le judéo-christianisme? Ce qui plait à Dieu. Le mal? Ce qui lui déplait. Yahvé étant une invention des rabbins juifs, n’est-ce pas, pour eux, une façon de manipuler à leur avantage le comportement des croyants? Et pour l’être humain, qu’est-ce que le bien? Tout ce qui tend à son bonheur. Le mal? Tout ce qui entraine du malheur.

Morale et bonheur. Pourquoi devrais-je agir moralement? Parce qu’il en va de mon bonheur. Ici encore, il y a deux façons de comprendre ce concept. Une façon enfantine: elle vient de l’étymologie «bon» et «heur», c’est-à-dire la «bonne» «chance». Dans ce contexte, le bonheur me tombe dessus à l’improviste sans que je n’aie rien à y voir… ou il tombe à côté, sans que je ne puisse tenir personne pour responsable, sauf le dieu de la chance. Dans une conception adulte, j’opte pour l’étymologie «bona» et «hora» qui signifie passer une «bonne» «heure». Dans ce contexte, le bonheur est, non seulement subjectif (je sais si je me sens bien, si je suis bien) et relatif (il ne sera jamais parfait), mais surtout, je peux le choisir, m’y exercer.

Sans liberté, pas de morale. Quand une lionne plante ses crocs dans la jugulaire d’un zèbre pour en faire son repas, dirons-nous, aussi cruelle que nous paraisse la scène, qu’il s’agit d’un acte immoral? Non. Nous dirons que c’est un acte instinctif qui n’a rien à voir avec la morale. Le domaine de la morale coïncide avec le domaine de la liberté. Comment définir la liberté? Comme «faire ce que je veux, comme, quand et parce que je le veux»? Sûrement pas. C’est une caricature de liberté… puisque ce que je veux pourrait me conduire au malheur. Et si je définissais la liberté comme «la capacité de faire des choix en fonction de ma survie et de mon bonheur»? La liberté n’en devient-elle pas une valeur irremplaçable pour ma nature… humaine?

Progrès moral? Le mot progrès est un concept-clé du XVIIIe siècle. Notre société unidimensionnelle en a restreint la portée au progrès technologique, quand ce n’est pas à la croissance illimitée de l’économie. Sans nier l’importance de ces progrès, peut-il y avoir une évolution de la morale? Oui. Passer d’une morale enfantine à une morale adulte représentera une amélioration incommensurable vers plus de bonnes heures.

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