Dans les lunettes du frisé: Ékonommy

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J’ai essayé tout l’été de m’enlever une phrase de la tête. Une seule. Un soir, je zappais sur la télévision et je tombe sur 125, Marie-Anne animée par Christiane Charrette. Son invité ce soir-là : Bernard Landry. Il dit : «René Lévesque m’a condamné à l’économie bien malgré moi, mais je n’ai jamais cru que l’économie était la valeur première d’un peuple. La première force du Québec, c’est la culture.»

Le ministre de l’Éducation, Yves Bolduc, semble d’avis contraire. «Les enfants ne mourront pas s’ils n’ont pas de livre», affirme-t-il. (Je le cite peut-être hors contexte, mais je m’en balance. Il l’a quand même prononcée cette phrase-là, qu’il assume maintenant!) Il semblerait que ces paroles s’inscrivent dans le discours à la mode par les temps qui courent : le discours économique, le fric, et toute la patente. Or, quand j’entends les Couillards, les Legault et même les Marois de ce monde brandir haut et fort leur discours plein de cash, quand j’entends ces vautours prononcés le mot économie, ma peau se glace, mon ventre torpille. Et quand leur pauvre discours trouve écho dans les profondeurs de la culture, c’est le point de non-retour, et je me demande : «Est-ce qu’il y a juste la foutu économie qui compte dans la vie?» Le mot résonne tout d’un coup : é-co-no-mie, économie, ÉCONOMIE, Écono… quoi? Mie.

Pourquoi je vous dis tout ça, à vous lecteurs? C’est que je crois fortement que par les livres, la littérature, la musique, l’art; bref, la culture, on accède à la vision d’un nouveau monde, un monde où les barrières sont baissées en permanence, un monde où les possibles s’ouvrent, où les rêves se battissent avec les matériaux de l’imaginaire, de notre imaginaire. Un monde par nous et pour nous. Et quand la fiction traverse les murs de la réalité, la vie se déploie, la vie commence parce que le rêve l’a enfin conquis, guéri.

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Cette critique, que j’ai surnommée, à l’aide de quelques collègues, la critique du frisé, s’attaquera à la culture et non aux boucles de cheveux que certaines personnes peuvent arborer fièrement. Bref, j’essayerai tout au long de la session de partager ma vision du spectacle culturel tel qu’il se donne à voir, ou tel que je l’ai vu et vécu, c’est-à-dire sans ornements et avec toute ma subjectivité.

Cette semaine je vous parle brièvement d’un spectacle que j’ai particulièrement trouvé louche au Nord-Ouest Café du centre-ville de Trois-Rivières : Dance Laury Dance, qu’il s’appelait le groupe originaire de Québec. Pour les non-initiés de la musique thrash métal (dont je fais partie), les cinq membres du groupe ont déjà monté sur scène avec Metallica en 2011 dans le cadre du festival d’été de Québec.

Je dois l’avouer, la musique meuble mon quotidien. J’écoute de tout: de Francis Cabrel à Eminem. Du thrash métal, ça non par contre. Je refuse. Mais j’y suis allé pareil, me laissant convaincre par des amis que Dance Laury Dance était phénoménal, et ils l’étaient, je dois le dire. Contre toute attente, le groupe avait une très bonne rigueur professionnelle: des musiciens talentueux, des mélodies bien ficelées, une musique accrochante et surtout une ambiance survoltée. J’avais l’impression de me retrouver dans le milieu de Guitar Hero.     C’était honnêtement le chaos au deuxième étage : un moshpit battait même son plein en face de la scène. C’était surréel, j’étais dans une béatitude totale. Je ne comprenais rien à ce qui se passait. L’incompréhension m’habitait, et bizarrement, j’aimais l’instabilité qui régnait.

Pour terminer, j’aimerais dédier, à la place de Dance Laury Dance, leur spectacle de ce soir-là aux Stephen Harper de ce monde. Parce que grâce à eux, j’ai apprécié encore plus mon expérience en tant que spectateur. En refusant de faire comme eux, en refusant de porter la cravate et la langue de bois, comme eux la portent si bien, j’ai pu entrer dans une sphère musicale que je ne connaissais pas. J’ai accédé à un nouveau monde, j’en ai même oublié l’orthographe du mot Ékonommy l’instant d’une soirée.

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