Éditorial: Élections fédérales ⎯ Pourquoi je ne vous ai pas dit pour qui voter

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C’est encore une fois avec tristesse que nous faisons face aux limites de notre format. Cet éditorial, que je rédige presque deux semaines avant la date du scrutin, ne sera publié que le lendemain de celui-ci. Cela m’empêche d’honorer une pratique répandue dans les journaux nord-américains.

En effet, il est coutumier d’écrire un éditorial à quelques jours d’un vote important afin de présenter le point de vue du journal. Par exemple, La Presse a pris position dans ses pages du 7 octobre dernier en faveur d’un gouvernement du Parti libéral (PLC).

D’ailleurs, je dois à leur préface l’idée que je vais développer ici. Si l’équipe éditoriale du journal montréalais plaidait en faveur de cette tradition, je vais plutôt défendre le contraire. À l’idée de dire à mes lecteurs et lectrices pour qui voter, j’ai effectivement un peu vomi dans ma bouche.

Tout d’abord, je dois dire que l’appel à la tradition me semble bien faible comme argument. Si nous en venions à baser toutes nos décisions sur ce genre de raisonnement, il est évident que les résultats en seraient pour le moins catastrophiques. Il est indéniable que le progrès ne vient pas en regardant en arrière. L’histoire est une bonne conseillère, mais en aucun cas un exemple à suivre.

Ensuite, le problème est que cette prise de position reste nécessairement teintée d’une certaine idéologie. Quiconque vous soutiendra que son argumentaire est neutre, car basé sur des arguments rationnels, échoue à voir la poutre dans son oeil. Les arguments eux-mêmes que nous choisissons démontrent notre vision du monde et nos biais idéologiques.

Par exemple, revenons au texte de La Presse. On y salue l’effort du Nouveau Parti démocratique de s’éloigner de ses racines socialistes comme un point en sa faveur. Or, pour quiconque se considère progressiste, cela constitue plutôt un argument contre eux.

Quel est le problème ici? C’est qu’un court texte argumentatif comme un article éditorial ne permet pas d’élaborer par rapport à la grille idéologique particulière à travers laquelle nous réalisons notre analyse. Évidemment, La Presse est reconnue pour avoir une certaine ligne éditoriale foncièrement fédéraliste et d’extrême centre. N’en demeure pas moins que ce ne sont pas tous les lecteurs qui le savent.

Dans le cas d’un journal étudiant comme le Zone Campus, il est attendu que l’opinion se situera plus à gauche. N’en demeure pas moins que, sur une question telle que celle d’à qui donner son vote, je me sentirais mal de tenir pour acquis que tous et toutes qui me lisent ont la même inclination politique que moi.

Finalement, cela m’amène à mon dernier argument et celui qui me tient le plus à coeur. Une thèse implicite de la très grande majorité de mes textes est celle de la rigueur intellectuelle. Particulièrement dans un contexte universitaire (mais non exclusivement), il n’est pas suffisant de se fier à ce que l’on nous présente de prime abord pour développer une opinion éclairée.

Se faire une tête sur un sujet implique de s’informer à beaucoup plus qu’une source, de confronter son opinion initiale et, dans les cas comme les élections, de se pencher sur ses propres motivations et besoins.

N’étant moi-même pas à votre place, loin de moi l’idée de vous dire quel candidat est le meilleur pour vous. Qui plus est, tenter de le faire de toute façon serait me rendre complice de la propagande de l’une ou l’autre des idéologies qui se battent actuellement pour nos votes. Cela serait un manque de respect de mes propres convictions et de votre intelligence.

L’histoire est une bonne conseillère, mais en aucun cas un exemple à suivre.

Exercice de futurologie

Comme j’ai dit plus haut, la rédaction de ce texte a lieu très antérieurement au moment où il sera lu. Je ne peux donc que faire des hypothèses sur le gouvernement qui a été porté au pouvoir avant-hier.

Le calendrier eut-il été différent que je me serais peut-être hasardé à discuter des implications concrètes de la composition du parlement pour notre université. En effet, malgré que l’éducation soit une compétence provinciale (c’est-à-dire du ressort unique du gouvernement québécois dans notre cas), la recherche scientifique s’est invitée dans la campagne par la porte de derrière.

À tel point que même le Parti conservateur (PCC) a dû affirmer à plusieurs reprises l’importance de la recherche au Canada.

Rappelons que les autres partis fédéraux se sont tous engagés à remettre la science de l’avant. On sait que celle-ci a été passablement malmenée par les dix années de règne conservateur, où notamment le climatoscepticisme s’est invité au gouvernement. C’est donc un grand soulagement de constater les déclarations des chefs de partis comme quoi leurs décisions vont se baser sur des faits scientifiques.

Espérons que cela se traduira par des actes concrets.

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