La petite ténébreuse: Shell shock ⎯ Survivre tant bien que mal

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Chaque printemps, j’émerge de l’hiver avec bonheur. Cette année, le froid extrême me permet d’apprécier encore plus les températures printanières du moment. J’ai envie de me précipiter à la première crèmerie et d’engloutir des litres de crème glacée molle à la vanille. Chaque année aussi, j’émerge de la déprime saisonnière. Je fais partie des personnes qui sont frappées de plein fouet par le manque de lumière hivernal. Je prends de la vitamine D et je tente tant bien que mal de ne pas trop faire subir mon humeur déprimante à mon entourage… oui, je sais, c’est lourd. La santé mentale, on n’en parle pas comme d’une prise de sang. Alors imaginez, si vous trouvez mon introduction lourde et pleine de malaise, en 2015, comment les hommes revenant du front lors de la Première Guerre mondiale entre 1914 et 1918 devaient se sentir…

Fait avéré, les guerres me fascinent; la Première Guerre mondiale, la Seconde, la Guerre du Vietnam, de Corée, des Boers, etc. Mais au-delà des combats armés, ce qui me fascine le plus, c’est l’humain qui est au cœur des hostilités, et ce, souvent malgré lui. De nos jours, l’état de stress post-traumatique est de plus en plus connu et étudié. Cette condition frappe toute personne, à plus ou moins grande échelle, ayant subi un choc à la suite d’un évènement stressant, voire menaçant pour sa vie. Les soldats de retour à la maison en sont souvent frappés et plusieurs, malheureusement, ne s’en sortent pas. Ils ne peuvent affronter la douleur du quotidien et choisissent de mettre fin à leurs jours. Ce trouble de santé mentale ne date pas d’hier, bien qu’on réussisse à mettre des mots sur le sujet depuis peu.

Shell shock

Les premiers cas de chocs post-traumatiques répertoriés remontent à la Première Guerre mondiale. Plusieurs soldats reviennent du front frappés d’un mal étrange et incontrôlable. Certains soldats sont carrément retirés des tranchées, atteints par le mal après une explosion. Les symptômes sont multiples. Certains resteront paralysés ou seront gagnés d’un aveuglement temporaire. Le symptôme le plus troublant est celui des tremblements et des raideurs musculaires. Plus ou moins intenses, ces tremblements incontrôlables resteront parfois jusqu’à la mort des soldats.

Les premiers cas de chocs post-traumatiques répertoriés remontent à la Première Guerre mondiale. Plusieurs soldats reviennent du front frappés d’un mal étrange et incontrôlable.

Ce syndrome sera baptisé le Shell shock ou l’obusite, en français. Il est en fait le résultat de plusieurs facteurs combinés de stress et d’anxiété extrême, comme la peur de mourir, d’être tué violemment ou pire encore d’être enterré vivant ou déchiqueté par les obus tombant du ciel. Il faut rappeler ici que la Première Guerre mondiale est essentiellement une guerre de tranchées. Les hommes doivent maintenir et défendre leur position, en terrain boueux, humide, froid et hostile. Ils peuvent passer plusieurs semaines, voire plusieurs mois dans leurs trous à attendre la prochaine rafle d’obus. Le climat est idéal pour faire une grande place accueillante à l’anxiété. Or, le corps n’est pas fait pour subir un tel niveau de stress. Certaines personnes ont une grande résistance, d’autres résistent moins longtemps et craquent. La plupart se retrouveront à l’hôpital militaire pour y subir des traitements expérimentaux.

Traitement

Évidemment, un soldat frappé d’une obusite n’est plus fonctionnel. Cependant, les maladies nerveuses sont peu connues en 1915. Les victimes sont souvent qualifiées d’hystériques. Plusieurs médecins miliaires croient que leurs patients simulent leurs maux pour se sauver des combats et tentent donc de les renvoyer au front le plus rapidement possible.

Les traitements utilisés à l’époque pourraient facilement être qualifiés de torture, aujourd’hui. Les électrochocs sont monnaie courante. On tente de stimuler les nerfs affectés pour délier les muscles paralysés des patients. Parfois, on endort les patients avec du chloroforme pour vérifier la rigidité des membres en anesthésie. Devant la rigidité disparue à cause de l’anesthésie, les médecins en profiteront pour placer les malades dans des carcans métalliques destinés à les redresser. Inutile de dire que la douleur est insupportable au réveil… Malheureusement beaucoup de victimes de Shell shock mourront à l’asile, seules et abandonnées des leurs. On leur reprochait non seulement leur lâcheté, mais surtout leur manque de patriotisme.

Parfois, on endort les patients avec du chloroforme pour vérifier la rigidité des membres en anesthésie. Devant la rigidité disparue à cause de l’anesthésie, les médecins en profiteront pour placer les malades dans des carcans métalliques destinés à les redresser. Inutile de dire que la douleur est insupportable au réveil…

Au cours des conflits qui suivront, les progrès de la médecine et les travaux notamment de Sigmund Freud sur le cerveau humain permettront de mieux comprendre l’état de stress post-traumatique. Malgré tout, cette maladie demeure mystérieuse aux yeux des médecins militaires. Lors de la Seconde Guerre mondiale, il n’était pas rare de retourner un homme à la maison, pour une raison inconnue. Dans les rapports médicaux, on pouvait constater que le soldat avait quitté le front pour des gelures de tranchées, par exemple. Il était clair pour toute l’unité que le soldat en question n’était plus fonctionnel et surtout qu’il devenait dangereux pour ses pairs. Une situation qui est bien difficile à comprendre pour quelqu’un de l’extérieur… parce que les troubles mentaux, ça ne se voit pas. Ce n’est pas quelque chose de tangible. On ne peut pas mesurer un niveau de stress, comme on mesure un manque de fer dans le sang. Pour beaucoup de soldats, l’incompréhension de leurs proches minera beaucoup leur moral… et la situation est encore trop présente de nos jours…

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