Aux heures sombres où personne n’écoute, où l’insidieux se glisse au sein des âmes les plus pures, le mal absolu gronde en son antre numérique et nous guette tous: la pornographie.
Il va sans dire que je ne suis pas réellement sérieux lorsque j’accable à outrance le délicieux sobriquet de «mal absolu» à la pornographie. Le tout est plutôt une question de point de vue. Pour certain(e)s, la consultation de contenu de cette nature tient du sport professionnel; pour d’autres, elle n’est qu’un passetemps ludique au même titre que le macramé. Pour d’autres encore, il s’agit du démon incarné.
Mais trêve de mondanités, la véritable question demeure: quoi faire lorsque notre conjoint(e) s’adonne à ce plaisir solitaire qu’est le visionnement de contenu pour adultes? Devrait-on éprouver de la jalousie, de la colère, de la peine, du réconfort, ou un puissant sentiment de vivre et laisser vivre? En réalité, toutes les réponses sont bonnes.
Je vous vois d’ici arborant vos grands yeux de biche devant les phares d’une camionnette, m’implorant de vous offrir une réponse… Malheureusement, je n’en ai pas. Comme je l’ai écrit précédemment, tout est une question de point de vue, mais surtout, de communication entre les partenaires.
Aborder le sujet, un premier pas vers l’entente
Comme me le stipulait la sexologue et psychothérapeute Pascale Albernhe-Lahaie dans une entrevue sur la question: «Avant d’initier une discussion avec son conjoint, par exemple sur la découverte de consommation de porno, il faut se questionner sur notre inconfort. Que cela parle peut-être de notre propre insécurité». Elle ajoute: «il peut y avoir des “facteurs aggravants” que l’on peut considérer face à notre inconfort». Par exemple: «notre insécurité, notre éducation, notre propre niveau d’aisance avec notre sexualité/érotisme, si cela rappelle de mauvais souvenirs comme une infidélité».
Ensuite vient la considération des facteurs externes. À ce sujet, madame Alberne-Lahaie énumère: «le type de pornographie, la fréquence [de consultation]; si la personne va aussi sur des sites pour “chater” ou d’escortes; si la personne paie pour le service; si on remarque un évitement de la sexualité: [tous ces facteurs] peuvent faire une différence. »
Selon moi, au-delà de votre position personnelle sur la question de la consommation de pornographie et/ou de la masturbation au sein du couple, il est primordial d’aborder le sujet avec délicatesse, diplomatie et respect de la réalité subjective de l’autre. Toutefois, si ce sont les sentiments hostiles qui vous habitent, il est de rigueur de décanter un peu la problématique avant d’entreprendre la conversation.
Il est également fort envisageable d’entreprendre la conversation dès le début de la relation, afin d’instaurer, au sein du couple, des balises comportementales claires, ou plus simplement, de verbaliser clairement les limites de chacun en matière de sexualité et de vie affective. En quelque sorte, il s’agit d’un contrat verbal qui engage les deux amants à respecter sans failles l’accord mutuel.
Il est primordial d’aborder le sujet avec délicatesse, diplomatie et respect de la réalité subjective de l’autre.
Dans son livre The Complete Idiot’s Guide to Amazing Sex, la sexologue Sari Lockers détaille certains des dangers que peuvent représenter la pornographie sur le couple, comme la possibilité d’engendrer de la jalousie, des attentes irréalistes, le risque de diminuer le désir et de créer une ambiance propice aux mensonges (Locker, 2005)
Par ailleurs, une étude datant de 2012, publiée dans la revue Journal of Social and Clinical Psychology et portant sur le lien entre la consommation de pornographie et l’engagement à un partenaire amoureux (traduction libre) suggère une corrélation positive entre le niveau de consommation de pornographie et le faible engagement dans le couple, ainsi que la propension au flirt, voire à l’infidélité. (Lambert, Negash, Stillman, Olmstead, & Fincham, 2012)
Les culottes à terre, diantre! Que faire?
Oh! Vous pensiez être en toute intimité, en compagnie unique de votre ordinateur ou autre et soudain, surprise, votre amant(e) vous surprend dans votre intimité sexuelle!
Dans un premier temps, je vous suggère amicalement l’arrêt immédiat du visionnement et/ou de l’activité masturbatoire. Prenez ensuite une grande respiration et assumez-vous. Ne vous lancez pas dans les explications farfelues ou la confrontation.
Rien ne sert de jouer à l’autruche, ce qui est fait est fait. Malgré tout, il peut y avoir des conséquences s’y rattachant. En effet, il fort à parier que, si vous avez opéré en catimini, un certain nombre de sentiments négatifs comme la trahison, la tristesse ou de la colère puissent être ressentis par votre partenaire. Accueillez toutes ces émotions et acceptez la juste part de vos responsabilités.
Par ailleurs, il sera grand temps, une fois la poussière retombée, d’avoir LA discussion afin d’y exprimer vos besoins, vos désirs, vos fantasmes, mais également vos limites et vos craintes. Le tout dans le respect. En définitive, tout est une question de logique.
Références:
Lambert, N. M., Negash, S., Stillman, T. F., Olmstead, S. B., & Fincham, F. D. (2012). »A Love That Doesn’t Last: Pornography Consumption and Weakened Commitment to One’s Romantic Partner ». «Journal of Social and Clinical Psychology», 31(4), 410-438. http://dx.doi.org/10.1521/jscp.2012.31.4.410
Locker, S. (2005). «The Complete Idiot’s Guide to Amazing Sex: Alpha»