La p’tite vite: Nostalgie à l’odeur de «spray-net»

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Anthony Morin. Photo: Mathieu Plante
Anthony Morin. Photo: Mathieu Plante

Dans l’ombre d’une chevelure imposante et collante des années 90 se cache un amour secret… inavoué.

Ah nostalgie, quand tu gagnes mon cœur, je ne peux que livrer mon âme à la douce mélancolie d’un passé révolu où tout avait une odeur de «spray-net» (fixatif pour cheveux).

Retour vers le passé

Elle est loin l’époque de mon adolescence où, piégés dans un autobus en direction de l’école, nous subissions les goûts musicaux discutables de notre joyeux chauffeur moustachu. Aucune issue possible, je devais subir cette torture auditive. Un groupe musical en particulier, dont la chevelure défiait la gravité, a marqué ma jeunesse et a certainement inspiré cette chronique.

À l’époque le groupe les BB inondait les ondes de ballades à l’eau de rose. L’un de leurs succès était Tu ne sauras jamais (1994, album 3). La chanson raconte l’histoire d’un amour secret, inavouable. Jusque-là pas trop compliqué? Certes! Toutefois, jusqu’à ce que la fiction rencontre la réalité…

Un amour caché, mise en contexte

Imaginez-vous dans cette situation: elle (la personne) est belle au point où son image imprègne vos rêves et les rend plus beaux. Un simple sourire de sa part est comme une injection de pur bonheur. Vous devez faire tous les efforts possibles pour ne pas rougir lorsqu’elle plante son regard dans le vôtre ou bien vous parle. Dès l’instant où elle vous touche, votre cœur s’accélère à en perdre vos moyens. Malheureusement, cette idylle demeure une utopie, car jamais cette personne ne vous aimera en retour.

La situation est compliquée! Il est possible que l’un ou l’autre des protagonistes, voire les deux, soi(en)t indisponible(s). Les embûches s’additionnent et occultent les possibilités d’une possible relation. Malgré tout (et malgré vous), vous aimez celle-ci et vous ne pouvez vous résoudre à couper les liens qui vous unissent à cette personne.

Malheur, vous êtes porteur d’un amour impossible. À l’instar de Frodon et de l’Anneau unique (Tolkien, Le Seigneur des anneaux), il est fort à parier qu’au fur et à mesure que celui-ci grandira, plus la pression de le garder, sans le dévoiler, deviendra un grand fardeau dont il sera difficile de se départir.

Ce charmant Gollum... Photo: Giphy
Ce charmant Gollum… Photo: Giphy

Amour et confidence

L’amour, un sentiment puissant dont les racines puisent ses forces dans l’inconscient. Il peut être difficilement gérable, surtout lorsqu’il est gardé secret. On a l’impression de n’avoir envie de rien, de manquer d’énergie, d’être maladroit, distrait, ainsi que de manquer d’attention. Même l’appétit peut être affecté. Non, ce n’est pas la dépression, c’est l’amour. Concrètement, les sentiments amoureux refoulés accaparent les ressources limitées de l’attention et de l’autorégulation.   C’est un peu comme si les pensées amoureuses prenaient toute la mémoire vive de votre ordinateur et que vous ne pouviez même plus faire fonctionner internet. Voilà qui est embêtant… surtout dans le cas d’un secret.

La réplique culte de la trilogie épique de Peter Jackson: «je ne peux le porter pour vous, mais je peux vous porter vous!» (Le retour du roi, 2003) prend ici tout son sens. En effet il peut être d’un grand réconfort que de confier à une personne de confiance ledit secret.

Bien que l’amour soit un sentiment des plus bienveillants, révéler celui-ci peut être source de crainte et d’anxiété.

Selon le docteur en neuroscience David Eagleman, dans son livre Incognito, garder un secret important serait néfaste pour l’organisme à cause des hormones de stress sécrétées, notamment le cortisol. Le simple fait de confier celui-ci à quelqu’un, verbalement ou par écrit, aurait une incidence significative sur la baisse du taux d’hormones. En gros, l’auteur suggère un conflit inconscient entre deux parties du cerveau qui génèrerait l’ambivalence entre le désir de révéler le secret et la peur qu’il soit découvert. (Eagleman, 2015)

Mais pourquoi garder le silence?

Les raisons sont propres à chacun et, bien que l’amour soit un sentiment des plus bienveillants, révéler celui-ci peut être source de crainte et d’anxiété: la peur du rejet, la peur du jugement, l’anticipation des conséquences possibles sont quelques exemples de biais cognitifs pouvant interférer avec une révélation libératrice.

C’est pourquoi il peut être salutaire d’écrire pour soi-même les sentiments ressentis, voire de les lire à haute voix (sans public). Cette stratégie déjoue les mécanismes antagonistes du cerveau et soulage partiellement la pression psychique causée par le secret (Eagleman, 2015).

Un deuil à vivre

Il n’y a pas de recette miracle en ce qui a trait à l’amour. Lorsqu’il est réellement impossible, c’est la célèbre «peine d’amour», ni plus ni moins qu’un deuil avec les étapes que cela implique, pour enfin être capable de passer à autre chose sur le plan affectif. Cette capacité de résilience n’est pas chose facile à acquérir, mais la bonne nouvelle c’est que cela est possible… avec du temps.

Malgré tout, au fond de soi, on portera toujours cet amour qui jamais n’aura vu le jour.

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