Le monde en questions: Marcher sur des œufs

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Religion. Vérité. Dieu. Moralité. Jésus. Ce sont les mots-clés que j’ai relevés, en parcourant les articles que nous avons écrits cette année.

Non, mais on aimes-tu pas ça la polémique juste un peu?

En fait, oui et non.

J’ai l’impression qu’en abordant ces thèmes dans un journal étudiant universitaire, c’est un peu comme si on avait essayé d’introduire en douceur un éléphant de huit tonnes dans un magasin de porcelaine. Heureusement, c’était un éléphant bien dressé. En tout cas, on essayait de le diriger avec délicatesse entre les allées bordées de tasses déjà fragiles, desquelles le moindre coup de trompe aurait eu raison.

Les regards des clients du magasin mettaient en évidence notre audace (voire notre effronterie). Et peut-être que, à notre insu, un coup de queue a envoyé valser une porcelaine ou deux.

Pourtant, notre but n’était pas de choquer inutilement. Néanmoins, choquer n’est pas toujours inutile.

Nous avons tous des réticences face à certains sujets. Et, bien sûr, il faut être compréhensif face aux réticences des autres – à défaut d’être en accord avec leur bienfondé, on doit accepter ces réticences et les respecter.

J’ai l’impression qu’en abordant ces thèmes dans un journal étudiant universitaire, c’est un peu comme si on avait essayé d’introduire en douceur un éléphant de huit tonnes dans un magasin de porcelaine.

Ainsi, on ne prend pas plaisir à éveiller des sentiments négatifs associés à des tabous. Certains sujets sont très délicats, et parfois, il semble qu’il vaudrait mieux les taire, parce qu’ils nous mettent mal à l’aise ou qu’ils nous semblent menaçants. Je sais aussi que nous avons amplement raison de nous méfier d’une religion fondée sur la peur, ayant pour objectif de contrôler un peuple abruti par un endoctrinement irrationnel.

Mais je crois vraiment qu’on gagne à reconsidérer plusieurs idées qu’on a jetées aux poubelles, pour voir si, après tout, elles n’allaient pas plutôt au recyclage (soyons verts!). Peut-être que, dans les idées qu’on a rejetées en bloc, il se trouvait des éléments de réponse qu’on cherche encore, en vain, parce qu’on se refuse à reconsidérer ces idées, même en dehors du cadre fallacieux ou aliénant dans lequel elles ont été emprisonnées dans le passé.

En fait, pour être honnête, je trouve ça dur de savoir, dans un paysage québécois comme le nôtre, ce qu’on a droit de dire ou non. Par exemple, j’ai l’impression qu’on peut proclamer haut et fort que les chrétiens ont des croyances infantiles, sans même justifier son point de vue. Mais si on suggère qu’il se pourrait que Dieu existe et qu’on ait à lui rendre des comptes à la fin de notre vie, on s’expose à recevoir des claques – des claques polies, certes, mais non moins vigoureuses. (D’ailleurs, même en écrivant cette dernière ligne, je sais que je marche sur des œufs.) Pourquoi?

On ne peut pas accueillir avec une curiosité saine une idée que l’on perçoit comme une menace. Et je crois que l’idée de Dieu, et surtout d’un Dieu qui ne serait pas simplement un père Noël cosmique, fait peur.

Pourtant, je crois qu’on gagnerait tous à baisser nos barricades et à reconsidérer le pourquoi de nos sentiments, de nos malaises et de nos craintes. Ce que je sais, c’est qu’il y a des questions qui planent. Et je suis persuadé qu’on ne s’aide pas en les ignorant. Et on ne s’aide pas non plus en censurant certaines opinions et croyances.

Bernard Werber a très bien exprimé la difficulté inhérente à la communication humaine: «Entre ce que je pense, ce que je veux dire, ce que je crois dire, ce que je dis, ce que vous avez envie d’entendre, ce que vous entendez, ce que vous comprenez… il y a dix possibilités qu’on ait des difficultés à communiquer. Mais essayons quand même…»

Et c’est ce que je propose. Oui, nous aurons des malentendus, ainsi que des blessures et des peurs qui nous empêcheront d’entendre clairement ce que l’autre a à dire.

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