
Publié en juin 2020, quelques semaines avant la deuxième vague québécoise du mouvement #metoo, le roman Le Prince, récit de fantasy à saveur féministe, marque le début de la carrière de romancière de la brillante journaliste Lili Boisvert.
Tandis que son éditeur lui avait demandé d’écrire «un essai sur la sexualité féminine et le mouvement #metoo», les seuls mots qu’est capable d’écrire l’autrice sont ceux qui composent le premier tome de la trilogie Anan.
Une épopée à travers la jungle

Dans Le Prince, le lectorat fait la rencontre de Chaolih, capitaine d’armée intrépide, et de son équipage clandestin. La jeune femme, qui se distingue en raison de ses surprenantes habiletés militaires, a été choisie par la reine pour mener le prince d’Anan à la reine d’un pays voisin. Toutefois, la mission n’est pas aussi simple qu’elle en a l’air: le peuple anasque, jusque là invaincu, se trouve en guerre contre le peuple inare qui est prêt à tout pour pénétrer le royaume de Chaolih. De plus, la capitaine, accompagnée d’une poignée de soldatEs, doit traverser une mystérieuse jungle peuplée de cannibales qui sont dôtéEs d’une puissance surhumaine.
Dans ce roman de presque 400 pages, Lili Boisvert peint de main de maître un univers parfois étonnant, mais toujours palpitant. Le royaume d’Anan, pays matriarcal construit sur un système politique d’avant-garde où prêtresses et politiciennes se côtoient sans gêne, permet de rêver, l’instant de quelques chapitres, à un monde différent. En utilisant les outils propres au genre de la fantasy, Lili Boisvert met de l’avant une société où la tradition est renversée de manière à souligner de façon brutale les inégalités et les problématiques de notre monde.
Sauver le prince, pas la princesse
Comme l’indique le titre du roman, le point central du livre n’est pas une jeune demoiselle en détresse, mais plutôt un jeune homme de sang royal. Tandis que la place occupée par les hommes dans le monde d’Anan reste nébuleuse, celle occupée par les femmes est, en revanche, très claire: les femmes sont en position de pouvoir dans toutes les strates de la société. Un certain passage du livre souligne d’ailleurs qu’il serait complètement farfelu qu’une société glorifie la force physique des hommes plutôt que la capacité d’enfanter des femmes. D’autres passages, plus brutaux, rappellent la triste réalité de l’objectification sexuelle, mais cette fois-ci, ce sont les femmes qui objectifient, et les hommes qui en souffrent.
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Afin de mettre de l’avant leurs caractéristiques intrinsèques, l’autrice ne décrit jamais l’apparence physique des personnages féminins. Un peu comme le font certains auteurs masculins lorsqu’ils décrivent les femmes, les descriptions physiques sont exclusivement réservées aux hommes. Lili Boisvert joue ainsi avec les attentes genrées du lectorat en leur offrant le contraire de ce à quoi il s’attend. Les rebondissements, tout de même nombreux, font la force du récit. Tandis qu’à un certain moment, tout espoir semblait être perdu, on se rend compte, d’une page à l’autre, que l’autrice n’a pas manqué d’imagination pour que ses personnages réussissent (ou non!) leur quête.
Le deuxième tome, c’est pour bientôt?
Bien qu’il soit parfois ardu de s’identifier au nombre impressionnant de personnages, Le Prince est un premier tome très accrocheur et captivant. Le principal problème du roman de Lili Boisvert, c’est simplement que la suite de la trilogie ne soit pas encore accessible en librairie. Un premier tome tout sauf décevant qui permet à tous et à toutes de voir d’un autre œil des enjeux qui, eux, sont loin d’être de la fantasy.
Cette critique a été réalisée grâce à la collaboration de Coopsco Trois-Rivières. Coopsco Trois-Rivières est une coopérative qui offre à ses membres et clientèle tous les produits et services pour répondre à leurs besoins. Le titre a donc été recommandé par leur libraire et a fait l’objet d’un service de presse.