Qu’est-ce qu’un être humain?: Un être pour la mort

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Jankélévitch disait que «l’angoisse ultime s’appelle la mort.» Qu’est-ce que cela signifie? Que pour bien des gens, la mort représente la peur à la puissance dix et qu’elle risque fort d’empoisonner leur vie quotidienne. Y a-t-il moyen de vivre sereinement notre vie tout en étant conscient que la mort nous attend au bout de notre histoire? Devons-nous imaginer une vie après la mort pour donner un sens à celle-ci?

L’être humain, un être pour la mort?

Certains auteurs sont tellement angoissés par la fin de la vie qu’ils qualifient l’être humain «d’être pour la mort.» Est-ce juste? Un simple regard sur la vie d’un être humain suffit pour se rendre compte qu’il est un être qui joue, apprend, travaille, baise, voyage, écoute de la musique, bricole, etc. Ne voir que le terme du voyage, c’est dénaturer effroyablement la réalité. C’est comme si vous alliez dire à M. Ford qu’il construit ses autos pour le cimetière de voitures. Quelle pitoyable absurdité! Bien sûr, à plus ou moins long terme, elles y aboutiront. Mais que de chemins parcourus depuis leur sortie de l’usine! Quelles sont les attitudes possibles face à la mort?

Conception sur-naturelle de la mort

De même, nous pouvons avoir une conception sur-naturelle ou naturelle de l’univers, de même pour la mort. Et, de même une conception sur-naturelle du monde nie la réalité du monde au profit d’un monde céleste, de même une conception sur-naturelle de la mort nie cette vie-ci en faveur d’une vie dans l’au-delà. Pour bien des gens, la mort est si difficile à accepter qu’ils font comme si les morts s’en allaient vers un monde meilleur où ceux qui vivent actuellement les rejoindront. Cette conception n’a rien de nouveau. Un des premiers textes écrits de l’histoire de l’humanité, l’épopée de Gilgamesh, relate sa «quête de la vie éternelle ». Pour nous qui vivons dans les années 2000, les idées religieuses d’âmes jugées devant le tribunal de Dieu, la croyance en une vie après la mort, l’idée d’immortalité nous sont tellement familières que nous ne sommes plus conscients de leur présence… et de leur influence. Est-ce que l’habitude que nous avons de ces idées fait qu’elles sont vraies?

Conception naturelle de la mort

La civilisation occidentale a posé un tabou sur la mort. N’est-ce pas une tactique de l’Église pour nous garder angoissés artificiellement et pour mieux nous imposer son au-delà? Devons-nous transgresser cet interdit et réfléchir sur la mort? Indubitablement. Qu’est-ce que la mort? C’est un point final à ma vie. Je nais, je vis et je meurs. Telle est la synthèse de ma vie. Comme je fais partie de la nature et qu’il n’y a rien au-dessus d’elle, il n’existe aucun ailleurs où je peux aller après la mort. Je me dissous dans la nature. Voilà la réalité à laquelle j’ai à faire face quand je mets de côté les mythes. Le puis-je?

Les animaux et la mort

À partir du moment où je choisis de comprendre l’univers avec ma raison plutôt que de recourir à des mythes et que je préfère l’évolution à la création, la comparaison avec les animaux peut m’aider à comprendre la mort. Quand un chasseur tue un pigeon ou un ours, quand un boucher saigne un poulet ou une vache, quand nous tuons une fourmi ou une araignée, nous soucions-nous de leur vie future? Pouvons-nous croire en une résurrection des humains… et pas à celle des animaux? Pourquoi y aurait-il une vie éternelle pour nous et pas pour eux? L’être humain est le produit de l’évolution. Il a évolué à partir de vies inférieures. Pourquoi aurait-il un sort différent?

Pour certaines personnes, la mort est une cause de terreur; pour d’autres, elle est un rappel que la vie est courte.

La mort et les animaux

Les humains se croient supérieurs à tous les animaux. En ce qui concerne la mort, ils veulent être les seuls vivants conscients du fait qu’ils doivent mourir un jour. Est-ce si certain? Les animaux sont-ils conscients qu’ils sont mortels? Voici l’exemple de Koko, une femelle-gorille, qui, après 25 ans d’entrainement, maitrise plus de 1 000 concepts de la langue des signes américains, tout en comprenant près de 2000 mots en anglais. Quand son entraineuse, Penny Patterson, lui a demandé: «Qu’est-ce que la mort?», elle lui a répondu, après un moment de réflexion, en montrant trois signes: «Douillet, caverne, au revoir.»

Éloge de la mort

La mort doit faire partie de la réflexion humaine: elle constitue la 3e des grandes questions: où vais-je? À ma naissance, si j’ai une certitude, c’est que la mort est inévitable et qu’elle peut survenir à n’importe quel moment. Pour certaines personnes, ce sera une cause de terreur; pour d’autres, un rappel que la vie est courte. C’est le fait de garder en mémoire que la vie ne tient qu’à un fil qui lui rend toute sa valeur. Et si nous pratiquions la méditation d’Épicure sur la mort? «Persuade-toi que chaque jour qui se lève peut être le dernier. C’est alors que tu recevras chaque heure comme inespérée.»

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