Par Maxime Bilodeau, chroniqueur
Je déteste les formules toutes faites et ce, peu importe le domaine dans lesquelles elles s’inscrivent. Mais je les déteste encore plus lorsque celles-ci ont trait au conditionnement physique et à la mise en forme. Qu’est-ce que j’entends par «formules toutes faites»? Vous savez, tous ces plans d’entraînement et diètes alimentaires supposément efficaces promettant mille et un résultats en un temps record que l’on retrouve principalement (et sans surprise) dans les revues et sites internet grand public et qui sont endossés sans vergogne par les Josée Lavigueur de ce monde.
Pourquoi me répugnent-elles? Pour la simple et bonne raison qu’elles simplifient (infantilisent?) quelque chose qui, à la base, est extrêmement complexe et qui, conséquemment, nécessite bien plus qu’une formule s’apparentant à du copier-coller.
Pour vous faire un parallèle, c’est comme si vous regardiez une émission de décoration à Canal Vie et décidiez à la suite de ce visionnement de vous construire une maison de A à Z. Inutile de vous dire que cette idée ne viendrait probablement même pas en tête de la majorité des individus. Si toutefois elle venait par pur hasard (ou pure folie, c’est selon) s’y déposer, elle aurait tôt fait d’être expulsée par ce que l’on nomme le gros bon sens. En effet, à l’aide d’arguments matériels et logistiques tous plus flagrants les uns que les autres, celui-ci nous ferait réaliser l’ampleur de la tâche et l’illogisme de l’entreprise.
Et pourtant, lorsqu’il est question de conditionnement physique, c’est comme si ce même gros bon sens prenait le bord chez ces mêmes individus. Je ne sais pas si c’est le désespoir causé par la vue de leur état de forme et/ou de santé ou simplement le manque de connaissances et d’informations quant à la chose sportive qui cause ce comportement dépourvu d’inhibitions face aux formules toutes faites, mais disons que celui-ci est assez inquiétant. Non seulement il mène à de nombreuses dérives et déceptions (dont la fameuse reprise de poids à la suite d’un régime tout simplement impossible à suivre et inadapté à la réalité de l’individu), mais en plus, et surtout, il cause un tort incroyable à la réputation de l’activité physique. Et oui, il lui colle une étiquette de chose simple et facile à faire, ne nécessitant pas trop de connaissances et pouvant être apprise dans un livre voire même, comble de l’insulte, dans une revue populaire.
En voulant tout standardiser et en offrant une ligne directrice universelle, ces formules bafouent le plus important des principes d’entraînement, soit celui d’individualisation qui veut que «tout programme d’entraînement doit prendre en compte les besoins spécifiques et les capacités de l’individu pour lequel il a été réalisé». La raison derrière ce principe est fondamentale (élémentaire) : aucun être humain ne possède la même capacité d’adaptation au stimulus d’entraînement pour la simple et bonne raison que tout un chacun est doté d’une génétique qui lui est unique.
Concrètement, cela signifie qu’aucun individu ne devrait jamais adhérer exactement au même programme d’entraînement que son voisin. Vous comprendrez qu’en se fiant à des formules toutes faites prises à gauche et à droite, c’est exactement le contraire qui se produit. Idem lorsqu’on fait affaire avec un entraîneur peu scrupuleux (ou simplement blasé) qui propose, à quelques différences près, le même programme d’entraînement à sa clientèle depuis de trop nombreuses années.
Et n’oubliez pas que pour tripper sur quoi que ce soit dans la vie (comme le sport et l’entraînement), il faut invariablement se faire un peu chier pour l’apprendre.
Tel que mentionné précédemment, il est non seulement contre-productif de procéder ainsi, mais c’est également le meilleur moyen de passer à côté de l’essentiel de la démarche d’entraînement. Qu’est-ce que l’essentiel, me demanderez-vous ? C’est un bagage de connaissances à partir duquel un individu puise pour initier des changements durables qui se traduiront par l’atteinte d’objectifs définis. Autrement dit, c’est la capacité de savoir ce que l’on fait au lieu de bêtement se le faire dicter par autrui.
Car s’entraîner, ce n’est pas seulement un petit projet banal que l’on mène lorsque la saison estivale, synonyme de frivolité vestimentaire, se pointe le bout du nez. Non, s’entraîner, c’est un cheminement à part entière qui comporte son lot d’apprentissages, de remises en question et surtout d’échecs. Ces possibilités de revers sont d’ailleurs ce qui différencie les formules toutes faites des vraies démarches d’entraînement. Alors que les premières vous bercent d’illusions, les secondes vous gardent fermement les deux pieds sur terre. Alors que les premières vous déçoivent immanquablement, les secondes vous outillent pour mieux vous relever lorsque vous serez soumis à l’adversité.
En définitive, je ne peux que vous suggérez de vous méfier de ces ouvrages et méthodes soi-disant scientifiques qui, en vous promettant monts et merveilles, trahissent d’emblée le caractère rigoureux et objectif de ce qu’est la Science de l’entraînement. Et n’oubliez pas que pour tripper sur quoi que ce soit dans la vie (comme le sport et l’entraînement), il faut invariablement se faire un peu chier pour l’apprendre.