Peu importe que vous soyez un étudiant international, un étudiant canadien ou un étudiant québécois, vous vous êtes peut-être demandé ce qui caractérise la façon de parler des Québécois francophones. Qui aurait donc un accent et quel serait-il? Je vous propose ici un topo superficiel de la question.
Tout le monde a un accent
Avant de commencer, toutefois, tirons quelque chose au clair : tout le monde a un accent! Que ce soit notre langue maternelle ou non, on a tous un accent en français. Les Québécois, les Français, les Belges, les Sénégalais – absolument tout le monde. Antidote définit un accent comme une « [v]ariation des caractères phonétiques d’une langue qui est propre à une région, un milieu ». Toutes les variétés du français ont cependant ces variations phonétiques (donc qui sont produites avec la voix, qu’on entend) puisqu’il n’existe pas de degré zéro de la langue. Le français, qui plus est, n’appartient à aucun peuple en particulier (heureusement!). Maintenant ce point important établi, plongeons dans les variations sur le plan sonore qui caractérisent l’accent québécois.
La multiplicité des voyelles
Le français québécois est caractérisé par un grand nombre de voyelles contrairement, par exemple, au français hexagonal. Au Québec, ainsi, on distingue complètement les voyelles nasales « an », « in », « on » et « un » alors qu’en France, par exemple, on confond à l’oral les mots « vent » et « vin ». Et si « un » peut sonner exactement comme « an » à plusieurs endroits en Europe, au Québec, c’est un son à part entière.
De même, le français québécois comprend deux « a » distincts : le « a » de « pâte » et le « a » de « patte ». On ne parle pas ici, dans le premier cas, d’un « a » très gras : le premier exige simplement une légère fermeture de la bouche et est prononcé dans le bas de la bouche plutôt que dans le haut. Encore une fois, pour un Québécois francophone, ces deux mots se prononcent complètement différemment et ne peuvent être confondus. J’ai entendu un jour une Québécoise dire à un Français qui l’invitait à manger dire de la « soupe aux pâtes » alors qu’elle était végétarienne : pour les Français, « pâte » et « patte » se prononcent de façon identique, mais pas pour les Québécois!
L’affrication : rien à voir avec l’Afrique!
Par ailleurs, l’accent québécois est généralement marqué par ce qu’on appelle des affrications, c’est-à-dire des ajouts, après des consonnes occlusives (donc des consonnes qui demandent une fermeture du passage de l’air suivie par une brusque ouverture comme « d » et « t »), de consonnes constrictives (donc des consonnes caractérisées par un bruit de friction comme « z » et « s »). Donc, quand on dit « tu étudies », on dit plutôt « tsu étsudzi » : on ajoute un « s » après les « t » devant « u » et « i » (donc on dit « tsi » et « tsu »), et on ajoute un « z » après les « d » devant « u » et « i » (donc on dit « dzi » et « dzu »). Dire et petite se prononcent « dzire » et « petsite », tout simplement.
La diphtongaison
Si l’affrication fait en sorte qu’on ajoute une consonne lors de la prononciation, la diphtongaison, elle, fait en sorte qu’on ajoute des voyelles, dans une certaine mesure, ou plutôt des « timbres différents » (Antidote) lors de la prononciation de ces voyelles. Ainsi, quand on prononce « fête » ou « rêve » au Québec, le « ê » n’est pas un pur « è » : il y a un genre de « a » qui s’ajoute devant, donc on prononce presque « faête » et « raêve ».
En tant que Montréalaise d’origine, je ne peux m’empêcher ici de souligner que la diphtongue est une source de conflits phonétiques entre Québec (la ville) et Montréal : les gens de Québec prononcent « baleine » et « arrête » avec un « è » pur tandis qu’à Montréal, on fait les diphtongues « aè ». Chaque ville est persuadée d’avoir raison alors que, bien entendu, c’est nous, les Montréalais, qui avons raison!
La diphtongue est socialement stigmatisée, par contre, même au Québec : plus une personne prononcera des diphtongues marquées, plus on jugera que son accent est peu raffiné, malheureusement.
Plusieurs accents
J’ai gardé une nuance importante pour la fin : les caractéristiques ci-dessus sont des généralités et le français québécois comporte, en fait, de nombreuses divisions. Il existe des accents et particularités régionales partout : ce n’est pas phonétique mais, à Trois-Rivières par exemple, on aime bien changer les genres des choses : dire « la bus » (comme à Québec) ou « la beigne », mais je digresse.
Ainsi, je vous ai parlé d’affrications, mais plusieurs accents de la Gaspésie n’en comportent pas du tout. Par ailleurs, la prononciation du « r », roulé ou non, peut changer d’une région à l’autre. Fait intéressant : elle change même d’une génération à l’autre. Vous remarquerez que certaines personnes de plus de 60 ou 70 ans roulent leurs « r ».
En conclusion…
Nombreuses sont les personnes qui pensent qu’avoir un accent, c’est mal parler. Mais n’oubliez pas que tout le monde a un accent. Et qu’avoir un accent, c’est simplement avoir une origine. J’espère ici vous avoir rendus fiers d’avoir ou de côtoyer l’accent québécois francophone. Et j’espère vous avoir permis de mieux le comprendre si vous êtes nouveaux ici!