L’Écon’homme: ABI, au bas de l’échelle.

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Étienne Desfossés – Chroniqueur économique

L’Écon’homme c’est une dose régulière d’économie, souvent pigée dans l’actualité, mais aussi suivant les idées que vous pouvez me fournir. Aujourd’hui c’est de l’actualité qu’est issu le sujet de ma chronique. En effet, je lisais mon actualité régionale, alors que j’apprenais un nouveau refus du parti patronal dans le conflit à l’Aluminerie de Bécancour Industriel (ABI). Je me disais, pourquoi ne pas en parler! Je n’aborderai pas le syndicalisme, ni les relations de travail, ce n’est point mon domaine… En revanche nous allons parler d’économie! En effet, c’est aux confonds de la microéconomie que ce trouve la machination menant à ces négociations de plus en plus serrées. Pour être précis, c’est dans la mécanique des coûts que se trouve la solution.

Histoire de coûts…

En effet, l’étude des coûts est une discipline économique peu appréciée des étudiants.es, mais la solution d’aujourd’hui s’y trouve. En effet, quand nous illustrons le comportement des coûts d’une entreprise, nous obtenons le graphique ci-joint, qui résulte en fait de coûts variables et de coûts fixes. Les coûts variables sont constitués de main-d’œuvre, de matières premières (minerais par exemple) et de tout ce qui varie en fonction du volume de production de l’ABI. D’un autre côté, il y a les coûts fixes, qui comme leur nom l’indique, ne varient pas selon le volume de production. Voyons de quoi retournent ces coûts…

Ce graphique présente une courbe parabolique représentant les coûts en entreprise. Cette courbe est un fondement de la science économique, prouvée par l’économiste Marshall et reproduit au sein de la microéconomie moderne.

Les coûts fixes sont des coûts dits de départ : les machines, le loyer de l’usine, les assurances…Mais aussi le démarrage des cuves dans le cas précis qui nous concerne. Mais est-ce un coût si important? Oui! En fait, nous comptons en millions de dollars le démarrage d’une série de cuves. C’est un coût considérable que l’on répartit sur les unités produites, afin d’en diminuer l’impact. C’est pourquoi, dans le graphique présentez plus haut, nous pouvons voir que le coût moyen est en diminution dès le début de la production, car un coût fixe de 10$ par unités, une fois la production doublée, en devient un de 5$ par unités, c’est ce que nous nommons les économies d’échelles.

ABI, au bas de l’échelle!

Dans le cas présent, ABI a décidé de fermer plusieurs séries de cuves, plus de la moitié, ce qui représente des milliers de dollars de coûts fixes supplémentaires au redémarrage. Ainsi, l’ABI redébute au début du graphique, dans la section où le coût moyen se trouve élevé, alors qu’elle se trouvait certainement au coût le plus bas de cette même courbe auparavant. ABI a perdu ses économies d’échelles et doit tout recommencer, ce qui pourrait la rendre non concurrentielle face aux autres alumineries du réseau Alcoa. Ainsi les dirigeants.es on intérêts à négocier serré, car ils.elles ont un manque à gagner énorme à rattraper.

Ma chronique n’est pas un argumentaire pro-patronat, comprenez-moi bien!

Ce qu’il faut savoir de l’ABI, c’est qu’elle n’est pas protégée d’une fermeture. En effet, c’est près de cinq usines qui ont été fermées par Alcoa, en 2014-2015. De celle-ci, n’oublions pas celle de Shawinigan qui a dû fermer ces portes, à la suite d’une position non concurrentielle vis-à-vis des autres alumineries du réseau. À coup sûr, lorsque près de 50% de la production d’aluminium se fait en Chine, on peut comprendre que notre compétitivité peut être moindre. Sans oublier que le marché chinois offre des salaires meilleur marché et souvent une législation complaisante pour les industriels.

Devant l’impasse de négociation que nous vivons actuellement, le gouvernement du Québec c’est impliqué personnellement dans le processus, en prenant une position du côté de l’employeur en demandant aux employés.es de mettre de l’eau dans leur vin. Mais pourquoi le gouvernement québécois et la MRC de Bécancour s’intéressent tant à ce dossier? Parce que le multiplicateur du produit intérieur brut (PIB) est de 38%. C’est donc dire que pour chaque dollar de revenu de l’industrie de la transformation métallique de premier niveau, 38 sous sont à nouveau dépensés parmi ceux-ci, auprès de sous-traitants. Ainsi, c’est un moteur économique important pour la région, engageant un garagiste pour réparer ces véhicules, faisant laver leurs uniformes chez le nettoyeur de la région et remplissant toutes sortes d’autres besoins auprès d’industries locales, faisant vivre le tissu économique régional. C’est un moteur économique en soi, créant un effet multiplicateur, ce qui est fort important pour une région rurale telle Bécancour.

ABI pourrait devenir non concurrentielle avec les autres alumineries du réseau Alcoa.

Que ce soit pour les employés.es ou pour la région, le conflit doit se régler, toutefois il n’est pas certain que cela arrivera, notamment si l’on considère les économies d’échelles et les coûts de l’entreprise. Ma chronique n’est pas un argumentaire pro-patronat, comprenez-moi bien, je suis pro-syndicats, toutefois, je crois important d’expliquer les motivations patronales, qui sont fondées sur des bases économiques. L’Écon’homme c’est ça : une dose bi-hebdomadaire d’économie!


La fermeture des cuves

https://www.lenouvelliste.ca/actualites/abi-ferme-la-moitie-de-ses-cuves-996e2920cd43de70df20e00ded003516

La compétitivité

https://www.lenouvelliste.ca/affaires/abi-un-miracle-que-ce-soit-en-operation-7e9e9dc5038d54db85b98da1b83ee100

L’effet multiplicateur

Statistique Canada, Multiplicateurs d’entrées-sorties provinciaux

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