Par François Champoux, étudiant à l’Université du troisième âge (UTA) de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR)
Pardonnez-moi si je parle un peu trop de mon petit moi dans ce court texte ; j’essaierai d’être concis.
Il y a maintenant plus de 26 ans, j’arrêtais de fumer la cigarette. Oui, j’ai un certain mérite, mais la vérité c’est que j’ai eu peur de mourir dans ma jeune quarantaine.
Confronté au développement d’un cancer du poumon à la suite d’une radiographie qui laissait présager cette éventualité, mon médecin m’avait alors laissé comprendre que « cesser de fumer » mettrait les chances de mon bord, mais que, si le mal était déjà fait après toutes mes années de consommation de la nicotine et du goudron, il me faudrait bien envisager la mort, que je le veuille ou non !
Ainsi, au lendemain de cette épouvantable annonce, j’ai écrasé ma dernière cigarette en cherchant de quelle façon je réussirais à me défaire sans trop de mal de cette habitude que j’aimais tant : fumer la cigarette et le cigare, étant pour moi un beau moment de détente. J’ai finalement trouvé mon truc : je me suis permis de recommencer à fumer lorsque je serais vieux, c’est-à-dire à 65 ans ! Trouvant cette échéance trop éloignée dans le temps, j’ai ramené celle-ci à 55 ans, croyant naïvement que je serais vieux à cet âge !
Les deux échéances étant maintenant passées, je n’ai pas recommencé à fumer et je ne me sens pas encore vieux ! C’est bizarre ce qu’on peut imaginer quand on est jeune, ou moins jeune…; en fait, à n’importe quel âge.
Mon truc pour arrêter de fumer sans trop de mal s’est avéré excellent, car après seulement deux mois de sevrage, je ne ressentais plus aucune dépendance : complètement libéré de mon esclavagisme. Je ne pouvais pas croire que je réussirais aussi facilement, et tous les symptômes de ma dépendance à la nicotine avaient déjà disparu : toux du matin, maux de gorge périodiques, mauvaise haleine permanente, essoufflement occasionnel, etc.
J’étais renversé de la capacité de mon corps et de mon esprit à contrôler ce que je pensais ne jamais être capable de me défaire comme mauvaise habitude de vie.
J’étais renversé de la capacité de mon corps et de mon esprit à contrôler ce que je pensais ne jamais être capable de me défaire comme mauvaise habitude de vie. Mais j’avais eu peur… Par chance, ma santé aura toujours été au rendez-vous depuis toutes ces années d’abstinence, et j’ai recommencé à jouer au hockey en janvier dernier après 21 ans d’arrêt. Et je ne vous parle pas de ma santé financière…
Oui, quelle chance d’avoir eu peur, même si celle-ci est souvent, sinon toujours mauvaise conseillère.
Voici que notre premier ministre canadien veut légaliser la marijuana ; il faut se réjouir de cette décision pour plusieurs raisons dont la principale est tout simplement philosophique : la liberté de choix.
Toutes les personnes qui ont la chance d’atteindre l’âge reconnu de la maturité doivent être libres de faire les choix que leur conscience appelle à tout instant de leur vie. Alors, que faire de ma vie ? Dois-je jouir de tous les plaisirs que celle-ci peut me procurer ? Dois-je avoir ou non un conjoint ? De même sexe ou différent ? Dois-je avoir des enfants ? ETC. Être libre, comme notre pays nous permet de l’être, nous oblige à faire des choix, de les assumer et de nous y engager ! Voilà bien le plus drôle des paradoxes que nous pouvons lier à la liberté : c’est dans l’engagement que nous réalisons concrètement notre liberté ! C’est que vivre en société nous condamne à cette « liberté assumée » ; des choix s’imposent.
Être libre, comme notre pays nous permet de l’être, nous oblige à faire des choix, de les assumer et de nous y engager!
C’est encore Épicure qui vient me souffler sa maxime préférée : « peu suffit, trop nuit ». Ah si je pouvais fumer juste un petit peu de temps à autre ; ah si je pouvais boire du vin juste un petit peu de temps à autre ! Bon, il faut choisir et agir selon les appels à la vie et aux plaisirs de celle-ci. Oui, je peux un peu pour certains plaisirs, mais pour d’autres, même le peu est de trop pour moi.
Je suis bien heureux de la légalisation de la « mari », car quand je serai vieux, ça me permettra de faire encore des rêves de jeunesse et de jouir du moment présent. Entre-temps, je vais cependant m’abstenir de consommer cette drogue bientôt permise ; non, je ne consommerai pas la marijuana pour le moment, même si c’est légal puisqu’à mon âge, je suis toujours trop jeune pour recommencer à fumer…
Quelle chance de pouvoir faire le choix d’une santé à protéger ; enfin, tant que celle-ci sera au rendez-vous de tous les autres plaisirs à consommer modérément, je m’abstiendrai de me droguer pour être bien là et présent à la vie dans tous ses autres plaisirs à jouir.
Vive les plaisirs épicuriens de la vie !
NDLR. Il est également possible de lire cet article via le blogue personnel de notre collaborateur.