Gabriel Wiethaeuper-Balbinotti : Du Brésil à l’Idylle

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Gabriel Balbinotti alors qu’il s’alignait avec les Patriotes cet automne. Crédit photo : Patriotes de l’UQTR (Facebook)

D’emblée, vous n’êtes pas sans savoir que la formation de soccer masculine des Patriotes de l’Université du Québec à Trois-Rivières a réalisé un véritable tour de force en remportant, il y a deux semaines environ, le Championnat canadien en finale, au CEPS de l’Université de Montréal, en l’emportant 2-0 face aux Carabins, l’équipe hôtesse. 

Pourtant, de dire qu’il s’agissait du plus grand exploit sportif universitaire trifluvien jamais réalisé pourrait peut-être s’avérer exagéré lorsque l’on se penche sur l’Histoire avec un grand H. 

Lorsque le joueur vedette de la formation, Gabriel Balbinotti, mentionne que cela s’avère être l’un des plus grands faits d’armes de sa jeune carrière déjà riche d’expériences, cela résonne et donne un nouveau souffle à cet exploit qui n’a pas fini de faire jaser partout en Amérique. Je me suis entretenu avec le numéro 14 de nos Patriotes et j’ai découvert, derrière ce nom à consonance sud-américaine, un chic type, une histoire unique et une motivation intrinsèque profonde, celle qui l’aura fait passer très récemment dans l’univers du soccer professionnel.

Enfance brésilienne, premiers coups de pieds

Après être né au Québec, c’est à l’âge de deux ans seulement que Gabriel et ses parents s’exilent vers le Brésil. Lorsque je lui demande si sa passion pour le soccer est arrivée tôt dans sa vie, le prolifique attaquant me répond qu’elle est sans doute née même avant lui, qu’elle était innée. Il n’en garde pas de souvenirs, mais ses parents lui ont souvent répété à quel point il aimait jouer avec les ballons, le faire circuler avec ses jambes quelques semaines à peine après avoir appris à marcher.

«Il paraît que c’était très important pour moi. Lorsque nous passions devant un marchand de ballons, mes parents devaient impérativement m’en acheter un, j’en tenais une belle collection» ajoute-t-il, tout sourire.

Ne nous méprenons pas, par contre. Gabriel ne passait pas ses soirées à prendre part à des entraînements, à marquer des buts et à faire gagner son équipe (pas encore du moins). Sa relation d’amour avec le football (ou le soccer ici) se limitait au cadre scolaire de la petite ville de Porto Alegre. Pour tout dire, il jouait au soccer à la récréation, le soccer dans sa plus libre expression. Pas de chandails ni de dossards pour séparer les équipes, ballon dégonflé, filets percés, cloche de l’école comme seule arbitre. Cela contrastait drastiquement avec l’éventuelle carrière qui attendait Gabriel. Le jour et la nuit. 

Gabriel en a passé justement, des jours et des nuits, au Brésil. Des jours à grandir, à mûrir et apprendre, des nuits à songer et à rêver à une carrière de footballeur comme les Ronaldo et les Ronaldhino de ce monde. Cinq ans après être arrivé au Brésil, il reprendra le chemin du Québec. Du haut de ses sept années et de ses trois pommes. Il était encore bien loin de se douter que ce retour vers la Ville du Hockey, la province tissée de Sainte-Flanelle, serait un grand pas dans sa carrière de footballeur. Quel paradoxe quand même.

Trouver sa «catharsis précoce»

Comme il vient d’en être question plus haut, c’est à l’âge de sept ans que Gabriel revient à Montréal. Il vit avec ses parents dans la métropole où il intègre alors, pour la première fois de sa vie, le soccer dit «de compétition» et organisé. Gabriel doit maintenant se soumettre à un cadre pour pratiquer son sport. Tel un peintre devant se limiter aux dimensions de sa toile, le fait que Gabriel ait à se plier à des contraintes logistiques sportives ne lui enlève pas la chance d’exprimer son talent. Il fait la pluie et le beau temps, à l’instar de dame nature, sur un terrain qu’il partage avec des jeunes de son âge, mais tous envieux de la qualité de son jeu. 

À l’âge de 12 ans, pour l’amorce de son secondaire, Gabriel déménage une seconde fois. Cette fois, l’exil de plus courte distance le mène ici même, à Trois-Rivières. C’est donc à douze ans que l’aventure trifluvienne de Gabriel Balbinotti commence, elle qui prendra une pause deux ans plus tard seulement.

L’Impact de Montréal lui fournira une invitation à intégrer sa fameuse et prestigieuse Académie.

À force de dominer ce qui se passe sur le terrain, il s’y fait vite repérer par une bande de recruteurs à l’affût, dont au moins un de l’organisation de l’Impact de Montréal qui lui fournira une invitation à intégrer sa fameuse et prestigieuse Académie. C’est la raison qui, à l’âge de 14 ans, mènera Gabriel à l’extérieur de la Mauricie vers la métropole.

Il s’agit de l’une des grandes fiertés de Gabriel au niveau de ses nombreux accomplissements de footballeur. Le jeune homme est fier de mentionner qu’il a passé cinq ans avec l’Académie de l’Impact : «j’ai fait partie de l’académie de U-14 (quatorze ans) à U-19 (dix-neuf ans)».

Je n’ai pas les statistiques exactes, je peux par contre vous dire que pour la majorité des jeunes chanceux à revêtir l’uniforme bleu, blanc et noir, ce dernier stage chez l’Académie de l’Impact à dix-neuf ans est un peu comme la dernière année dans la carrière d’un joueur de la Ligue de Hockey Junior Majeur du Québec. Suite à celle-ci, ils sont plusieurs à devoir faire le deuil d’une carrière professionnelle, à recouvrir la tombe de grandes pelletées de réalisme, à l’enterrer et à revenir sur terre, dans la vraie vie.

«En fait, je les ai affrontés dans l’uniforme du Bayern Munich»

-Gabriel Balbinotti

Pour Gabriel, ça aura été un peu le contraire, ces années lui ont permis de déterrer son plein potentiel, de creuser son talent et de l’amener encore plus loin. C’est à ce moment, selon moi, que la carrière de Gabriel courtise l’idylle, d’où le titre de ce reportage…

Un CV à faire baver

Si j’avais demandé à Gabriel de me rédiger son curriculum vitae en vue de notre rencontre, je serais reparti avec plusieurs pages, au format Word, sans doute.

Voici donc les faits marquants de sa jeune carrière, à partir de la fin de son passage à l’Académie de l’Impact, jusqu’à son arrivée chez les Patriotes cette année (je rappelle que mon interlocuteur n’a que 21 ans) : 

  • 9 mois passés avec la première équipe de l’Impact suite à son passage à l’Académie. Je le questionne, sachant très bien où cela mènera. «La première équipe..?». Il me répond : «Oui, exactement, avec Piatti et compagnie»… J’ouvre la bouche, consterné, mais ne dis rien.
  • «J’ai fait la pré-saison avec l’Impact avant d’être prêté aux Fury d’Ottawa, en USL (United Soccer League)»… je hoche la tête, envieux.
  • «J’ai pris part au match des étoiles de la MLS via les Académies. En fait, je les ai affrontés dans l’uniforme du Bayern Munich». Je lui demande : «Le Bayern Munich, la dynastie allemande?» Il me répond «Oui, exactement, j’y ai fait un petit stage de deux semaines» avec le même ton que si moi je lui avais parlé d’un stage de deux semaines en enseignement.

Il n’avait pas tout à fait terminé qu’il en avait déjà trop dit. Brillante carrière qui, en fait, n’a même pas pris son envol encore… Un genre d’apéro, pour le mettre en appétit. C’est peut-être pour ça que mon ventre s’est mis à gargouiller alors qu’il énumérait ses faits d’armes. J’avais faim de la suite.

Un séjour patriotique à l’Université du Québec à Trois-Rivières

Gabriel ne s’en cache pas. Ce ne sont pas les études qui l’ont amené à fréquenter l’UQTR cet automne. Certes, il s’est inscrit au baccalauréat en Kinésiologie, dans la même cohorte que Michael Bournival (tiens, tiens), mais il l’a d’abord et avant tout fait pour aligner la formation de Shany Black, cette même équipe avec laquelle, quelques mois après le premier cours universitaire de Gabriel, ce dernier soulèvera la coupe des Championnats Canadiens.

Gabriel qualifie d’inoubliable sa saison passée chez les Patriotes, couronnée, comme une cerise sur un gâteau, par cette victoire in extremis face aux Carabins. Il mentionne avoir appris beaucoup avec ce groupe de joueurs. 

Il est appelé au septième rang lors du tout premier tour des sélections par la formation d’Hamilton, le Forge FC

Intrigué par la raison qui l’a mené à intégrer une formation universitaire après avoir goûté au soccer professionnel, je le questionne à ce sujet. Le jeune homme me répond qu’il l’a d’abord et avant tout fait pour s’illustrer et pour se faire remarquer par les recruteurs d’un circuit qui gagne en popularité au sein du pays, la Première Ligue Canadienne (CPL).

Gabriel comptait donc sur cette saison pour faire écarquiller les yeux des recruteurs des différentes équipes de ce circuit. Lors du repêchage suivant son parcours patriotique, preuve a été faite que sa mission a réussie. 

Le numéro 14 des Patriotes a devancé le numéro de son chandail pour voir son nom être appelé au septième rang lors du tout premier tour des sélections par la formation d’Hamilton, le Forge FC.

L’histoire est donc encore bien loin de finir de s’écrire pour Gabriel, elle n’aura que connu un nouveau chapitre lors des dernières semaines.

Un nouveau défi à Hamilton

Je ne sais pas si ça a un lien quelconque avec le nom de l’équipe qui a jeté sur lui son dévolu au repêchage, mais chez le Forge FC, tout reste à faire pour Gabriel. Le jeune homme aura donc à se forger un nom  : «Je m’en vais là en janvier et je dois faire mes preuves. J’espère fortement pouvoir décrocher un contrat et pouvoir devenir un footballeur à part entière, pouvoir jouer professionnel et gagner ma vie avec ma passion».

À ce sujet, rien n’est moins sûr et Gabriel le sait très bien. Malgré le fait que le succès lui perle au front davantage que la sueur, l’universitaire ne s’en laisse pas aveugler et demeure lucide.

Gabriel a deux choses devant lui : du talent et du temps.

Même s’il quittera en Janvier vers Hamilton, Gabriel ne ferme pas la porte à une future carrière en Kinésiologie. Même s’il trouve les cours de son baccalauréat complexes, Gabriel aime la matière que les enseignants lui inculque et se voit bien travailler auprès des athlètes plus tard. Je suis persuadé, à voir la lumière dans ses yeux lorsqu’il en parle, que Gabriel, malgré les difficultés qu’il peut rencontrer en classe, à force de persévérance, fera un kinésiologue hors pair.

Par contre, quelque chose me dit que ce sera pour plus tard, justement. Pour l’instant, ce sera plutôt à lui d’aller se faire traiter par des kinésiologues. Des jeunes fraichement sorti.e.s de l’université qui seront fier.e.s de travailler avec le grand Gabriel Wiethaeuper-Balbinotti, l’attaquant du Forge FC.

Chaque chose en son temps. Gabriel a deux choses devant lui : du talent et du temps. Habituellement, quand on y ajoute un peu de motivation et de coeur, ces deux ingrédients peuvent se transformer en réussites des plus grandes, en succès des plus nobles.

Réussites et succès dont Gabriel se délectera fort certainement. Personnellement, je ne l’ai jamais savouré, mais ça doit goûter l’idylle.

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